Cette dix-septième enquête de Varg Veum prend un tour assez personnel, car le privé est obligé de se replonger dans son passé, celui de sa famille plein de trous. Norma lui donne d’ailleurs un indice sur son père qu’il n’a jamais connu.
L’enquête qui lui est confiée s’apparente à un véritable casse-tête, car Emma a déménagé du jour au lendemain de son appartement, sans signaler où elle allait. Du moins, c’est ce que prétendent ses colocataires et le propriétaire. Il cherche aussi du côté de son père qui a été jeté dehors quand Emma avait deux ans. Si cette dernière a essayé de renouer le contact avec lui, il n’en est pas de même pour cet homme assez impressionnant appartenant à un gang de motards. Quelle brouille a pu entraîner son éviction familiale ?
Faute d’indices ou de vraies pistes à suivre, Veum ratisse large, pose des questions qui n’ont pas forcément grand rapport avec l’affaire en cours. Il remue un passé douloureux pour de nombreuses personnes et remonte des faits sordides à la surface. Il se fait plus d’ennemis que d’amis, mais il en a l’habitude. Les années lui ont appris à l’accepter.
Il va sans dire que ceux qu’il harcèle de questions gravitent autour d’Emma, donc de son cercle familial plus ou moins lointain. Au fil des intervenants, des degrés de parenté évoqués, le lecteur s’y perd assez vite, peine à reconnaître les personnes déjà croisées et le récit se révèle assez lourd, car il n’avance pas vite dans ses préliminaires. Il faut vraiment que Varg Veum donne un grand coup de pied dans la fourmilière pour que les choses bougent et que chacun retrouve un réel intérêt à l’affaire. Et là, autant dire que Gunnar Staalesen met les bouchées doubles avec un détective malmené. Le point de départ, la disparition d’Emma, débouche sur plusieurs affaires satellites, pas forcément en rapport, mais cela montre, entre autres, que les vieilles rancœurs ne disparaissent jamais. Gunnar Staalesen a l’art et la manière de lever le voile de la société pour en révéler ses travers.

« Grande sœur » se révèle très noir, décrypte l’humain capable de si belles choses comme du pire. Dans ces pages, le spectre balayé est large avec des personnes très différentes, pensant pour l’essentiel avant tout à elles-mêmes. Les petits secrets conservés jalousement des années, des décennies durant, représentent autant de bombes en puissance. Varg Veum se découvre une grande sœur bien plus âgée et se replonge dans son propre passé en quête de réponses. Ce roman démarre doucement, avant de prendre sa vitesse de croisière dans les pas de Varg Veum, un privé n’hésitant pas à remuer la fange pour en extraire la vérité, dût-il y laisser des plumes.
Varg Veum, un personnage attachant qui révèle les zones d’ombre de la société norvégienne et qui mérite vraiment d’être suivi.

Titre : Grande sœur (Storesøster, 2016)
Auteur : Gunnar Staalesen
Traduction du norvégien : Alex Fouillet
Couverture : Photo © Jarno Saren / Millennium / Plainpicture (détail).
Éditeur : Gallimard (1ère édition française : éditions Gaïa, 2021)
Collection : Folio Policier
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 384
Format (en cm) : 10,7 x 17,7
Dépôt légal : novembre 2023
ISBN : 9782073036483
Prix : 9,20 €

Autres enquêtes de Varg Veum :
 Cœurs glacés
 Où les roses ne meurent jamais
 Piège à loup

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