Des racines pour se reconstruire
Tsell est leur petite fille, née dans une grotte au premier temps des neiges. Dans le refuge qu’ont trouvé Bo et Hama dans la forêt. C’est là qu’ils font la découverte d’un petit être qui s’appelle Douze et qui les invite à rejoindre ceux avec qui il vit, sous les racines de l’arbre millénaire, dans un immense refuge, un véritable dédale de galeries, dans le monde du Bas. Ils se nomment Deux, Trois, Neuf, Treize, selon leur ordre de naissance. Si un chiffre manque, c’est qu’un des leurs a quitté cette vie. Là Hama, amputée des deux mains, trouve un abri pour son bébé, tandis que Bo, le forgeron, s’enfonce dans les profondeurs pour essayer de redonner à son amour une étincelle de rêve.
Au sein de cet étrange et épatante communauté, ils vont réapprendre la confiance accordée à l’autre.
Quand Anna décide de rejoindre l’air et la lumière, la gamine est submergée par l’immensité et la diversité d’un monde dont ses parents ne lui ont jamais parlé. Pour elle, le temps de découvrir l’histoire de Bo et Hama devient essentiel. Le monde des ombres est un marqueur important de leurs vies, symbole de leur rencontre amoureuse et de leur résistance face à la guerre. Tsell en est curieusement porteuse, son ombre évoluant tel un théâtre en perpétuelle mouvance.
Adaptant le superbe roman d’Anne-Laure Boudoux (Gallimard Jeunesse, 2014), métaphore douce-amère de la vie des réfugiés fuyant toute oppression que ce soit, Frédéric Bihel a construit un somptueux ouvrage qui rend hommage aux bâtisseurs, aux artisans d’un monde simplement convivial et bienveillant, et à la magie créative du théâtre.
Il s’empare magnifiquement du monde du Bas, de l’histoire tragique d’un homme et d’une femme et de la puissante poésie d’une résistance forgée dans les affres de cette horreur qui ne cesse de renaître : la guerre. On pense aux effarantes destructions des deux conflits mondiaux du XXe siècle comme à celui, aussi barbare, qui sévit en Ukraine, aux réfugiés qui courent le monde, et on apprécie d’avoir lu une telle œuvre, porteuse de tant de germes d’humanité. Un pur chef-d’œuvre pour une Bédéthèque de référence qui poussera ceux qui ne l’ont déjà fait à découvrir le roman d’Anne-Laure Boudoux.
Tant que nous sommes vivants Scénario : Frédéric Bihel, d’après le roman d’Anne-Laure Boudoux
Dessin : Frédéric Bihel
Couleurs : Frédéric Bihel
Éditeur : Futuropolis
Pagination : 144 pages couleurs
Format : 24,6 x 30,8 cm
Date de parution : 4 mai 2022
Numéro ISBN : 978-2754831666
Prix public : 24 €
Illustrations © Frédéric Bihel et Éditions Futuropolis (2022)