Ulli Lust, de son vrai nom Ulli Schneider, est née en 1967 en Autriche. Elle commence par des études de mode et de design d’où elle se fait renvoyer pour mauvais comportement. Devenue punk, elle fugue avec une copine en Italie sans rien, une expérience traumatisante qui la marquera pour le restant de sa vie. Ensuite, elle reprend ses études de graphisme à Berlin pour devenir dessinatrice de bande dessinée. Elle fonde avec des compagnons d’études les bandes dessinées « Monogatari » qui prônent le fond sur la forme (à lire). Ulli Lust gagne de la notoriété en dessinant des bandes dessinées érotico-mythologique (« Spring Poems »), un de ses genres de prédilections. Elle se lance, par la suite, dans la bande dessinée-reportage qui lui vaut des publications dans des quotidiens comme le Monde.
Mais finalement, l’ouvrage qui la fait connaitre du grand public et lui vaut plusieurs prix (Prix Révélation du festival d’Angoulême 2011 et Prix Artémisia 2011) est « Trop n’est pas assez » (littéralement traduit par « Aujourd’hui est le dernier jour du reste de ta vie »). Un roman graphique qui se lit comme un aveu que l’auteur a eu du mal à faire. Elle aura, en effet, attendu 20 ans avant de pouvoir revenir sur cette sombre partie de sa vie comme une sorte d’exorcisation. Cette autobiographie lui demandera un travail titanesque de 4 ans, soit environ 3 jours par page.
Ma première impression n’a pas été bonne, avec ce dessin noir et blanc assez brouillon, pas facile à lire. Mais après m’être lancée dans la lecture, je découvrais un roman graphique d’une intensité saisissante ! Le trait d’Ulli Lust sert finalement à merveille le propos d’une jeune fille perdue et persuadée de prendre les bonnes décisions. L’auteur transcrit l’ambiance poisseuse du milieu punk Autrichien, avec un dessin précis au trait noir et gras qui accentue le malaise dans lequel la jeune fille se trouve. A l’opposé, les paysages des villes Italiennes baignées de soleil sont lumineux et chauds, avec de très belles perspectives. Le dessin est jeune, sensible et dynamique, j’ai eu une impression d’un trait croqué sur le vif. J’ai adoré les expressions des personnages : un trait suffit à saisir l’intention et le caractère, on les aime, on les déteste. Malgré donc ma première impression, j’ai plongé en frémissant dans « Trop n’est pas assez » pour ne plus le lâcher.
Le scénario est magistral, j’ai voyagé avec Ulli et j’ai partagé ses peines. J’ai ri, j’ai pleuré, j’ai tremblé pour elle qui est devenue mon moi inconscient qui a vécu pour de vrai tout ce qu’ado je m’étais jurée de faire en pensant que ce serait fun. Un récit qui mérite amplement ses prix, féministe et reflet d’une société qui fait peur. Encore une fois, j’ai eu l’impression de la lire sur le vif, de devenir sa copine. Je me suis attachée à cette adolescente punk et j’ai presque été triste de la quitter lorsque j’ai tourné la dernière page.
À lire absolument tout en étant conscient que certains passages sont assez durs.
Trop n’est pas assez Auteur : Ulli Lust
Traduction : Jörg Stickan
Éditeur français : Çà et là
Format : 17x23 cm
Pagination : 464 pages bichromie
Date de parution : jeudi 18 novembre 2010
Numéro IBSN : 978-2-916207-46-9
Prix : 26 €
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