“Nils”, vous l’avez compris, c’est le combat de la nature face à la technologie. Simpliste certes, même un peu réducteur mais assez proche du contenu de cette saga qui se dévoile à peine. Dans une quête où un père et un fils se trouvent enfin, où les théories de l’un et de l’autre se rejoignent, Jérôme Hamon a choisi d’opposer frontalement ceux qui vivent pour et par la nature, croyant même en sa réalité magique, à ceux qui développent la technologie pour exploiter, envahir, s’approprier, détruire. Dans leurs pérégrinations, ils rencontrent un clan qui protège la nature, ils découvrent d’étonnantes entités, les Élémentaires, sans qui aucune vie ne serait possible, et vont brutalement devoir affronter les machines et les émissaires de Cyan, ce royaume qui prône la technologie et sur-exploite chaque élément du vivant.
Nils a beaucoup de choses à apprendre sur lui-même et sur les anciens dieux !
La fable se fait reflet de notre monde, en perte de croyances, malhabile pour protéger le vivant, diabolique pour embraser des pays entiers.
Jérôme Hamon ouvre sur un scénario qui commence sur un rythme assez lent mais parfaitement maîtrisé, pour que chacun découvre l’ambiance dans laquelle les personnages évoluent, dans un rythme quasi poétique. L’idée générale n’est pas nouvelle mais le traitement qu’en fait le scénariste est irrésistiblement moderne et parfaitement (malheureusement) d’actualité. De bons dialogues, des personnages attachants, un univers proche de la mythologie nordique... et un graphisme d’exception.
“Nils” est un gros coup de cœur et une petite perle graphique !
Tout d’abord l’objet en lui même est un petit bijou. Une couverture qui invite à plonger dans ce monde imaginaire, des couleurs mystiques et une typographie travaillée qui incite tout de suite au conte fantastique. On remarquera le vernis sélectif, discret et très élégant qui entoure le titre. La dernière de couverture illustre (en vernis sélectif aussi) les deux personnages principaux dans une magnifique mise en page.
Le dessin, les couleurs, la mise en scène, c’est Antoine Carrion qui hausse le ton et qui nous fait un numéro superbe. On connaît sa faculté à entrer dans des univers « habités », depuis son travail chamanique sur “Temudjin” (à lire absolument, édité aux éditions Daniel Maghen), sa propension à faire cohabiter la force et le rêve, la violence et la poésie, à faire s’épouser légendes et onirisme. Son dessin a souvent la souplesse du trait des grands mangakas, ici bien entendu, on pense à Miyazaki, et il nous laisse souvent, rêvassant, sur quelques cases emplies de la magie de ses couleurs. Beaucoup de brun pour la nature qui se meure mais aussi la force de l’ours, énormément de bleu pour la froideur d’un monde qui plie devant l’acier vivifié par la technologie.
Le travail d’Antoine Carrion est sans aucun doute la grande réussite de cette série qui débute, qui annonce une épopée écologique extrêmement prometteuse.
Cet ouvrage est de bout en bout magnifique et réalisé brio, il reste à “Nils” à nous emporter plus loin dans sa légende...
(T1) Les Élémentaires Série : Nils
Scénario : Jérôme Hamon
Dessins et couleurs : Antoine Carrion
Éditeur : Soleil
Collection : Métamorphose
Format : 33 x 25 cm
Pagination : 52 pages couleurs
Dépôt légal : 25 mai 2016
Numéro ISBN : 978-2-302-04848-5
Prix public : 14.95 €
À lire sur la Yozone :
Temudjin (T1) La belle Mort
Temudjin (T2) Le Voyage immobile
Illustrations © Antoine Carrion et Éditions Soleil, collection Métamorphose (2017)