Trois ans après la parution du « Boulevard des crimes », Pierre Christin nous renvoie, cette fois-ci, dans un Paris disparu, le Paris de sa jeunesse (il est né en 1938). Il aborde deux thèmes historiques forts dans cet album, mélangeant la grande et la petite histoire. D’une part, la spoliation des biens juifs pendant la dernière guerre mondiale, sujet régulièrement d’actualité. En effet, la politique d’aryanisation, commença en 1940, elle consistait à déposséder les juifs en leur interdisant toute activité commerciale. Celle-ci, par extension, pouvait porter aussi bien sur les biens (œuvres d’art, meubles), sur l’immobilier ou sur le financier (compte en déshérence). La mission d’étude sur la spoliation des Juifs de France, dite « Mission Mattéoli », a été installée en mars 1997 par Alain Juppé, alors Premier ministre. Les conclusions ont été rendues le 17 avril 2000. Une commission pour l’indemnisation des victimes de spoliations intervenues du fait des législations antisémites en vigueur pendant l’Occupation a été mise en place en septembre 1999.
D’autre part, la guerre d’Algérie, à travers l’enquête de Victor Maziéro. C’est un conflit qui se déroula de 1954 à 1962, principalement en Algérie, alors colonie française. Elle opposa l’Etat français aux indépendantistes algériens, mais fait partie de façon plus générale du mouvement globale de décolonisation. Elle fut aussi considérée comme une guerre civile entre des communautés. Le conflit déboucha sur les accords d’Evian le 18 mars 1962 qui virent l’indépendance de l’Algérie. Elle eut comme conséquence d’entraîner la chute de la quatrième république. L’action se passe en février 1960, à Alger, c’est la fin de « la semaine des barricades ». Cette insurrection de la population algérienne d’origine européenne est la résultante du limogeage du colonel Massu. Les principaux instigateurs furent Pierre Lagaillarde et Jean-Jacques Susini qui créèrent l’O.A.S (organisation de l’armée secrète) le 11 février 1961. Le journal « Combat » né sous la résistance est d’abord une tribune pour le mouvement résistant éponyme. Il fut publié de 1941 à 1974, il couvrira de façon complète toute la Guerre d’Indépendance.
Pierre Christin, au travers de ces sujets, nous montre une France qui subit une mutation, dans cette fin des années 50. Modification architecturale et sociale avec l’évocation des bidonvilles de la banlieue parisienne (Nanterre) qui tranche avec la bourgeoisie de la place Vendôme, alors que l’on aperçoit le C.N.I.T. (Le Centre des nouvelles industries et technologies) en arrière plan. Cet espace d’exposition fut construit en 1958 sur la commune de Puteaux.
Une histoire dure, par les sujets traités, truffée de références et ancrée dans l’Histoire.
On ressent, malgré tout, un léger flottement dans le scénario, dû peut-être au format de l’album. La conclusion du scénario est rapide, trois pages, et, à mon avis, légère. Loin de ce que la verve de l’auteur sait créer.
Annie Goetzinger est toujours fidèle à son style, très à l’aise dans tout ce qui touche la mode ou le design. Ses couleurs pastels viennent éclairer son dessin toujours un peu rigide et adoucir le propos éprouvant. Mais le tout dégage un charme et une élégance distinguée, en restant toujours dans le ton de la série noire.
Un tandem de charme et de choc, qui fonctionne à merveille mais qui, sur ce scénario, aurait pu nous proposer une histoire sur deux tomes.
(T7) Les Diamants fondent au soleil Série : Agence Hardy
Scénario : Pierre Christin
Dessin : Annie Goetzinger
Couleurs : Annie Goetzinger
Éditeur : Dargaud
Dépôt légal : 29/06/2012
Pagination :48 pages couleurs
Format :240 x 320 mm
ISBN : 978-2205-06709-5
Prix : 11,99 €
A lire sur la Yozone :
Agence Hardy (T6) Boulevard des crimes
©Dargaud édition 2012