La violence, le sexe... Deux thématiques qui sous-tendent la longue confession autobiographique à laquelle se livre celui qu’on appelait jadis Amédée, du temps où il était un jeune homme enrôlé de force dans la marine. Du temps où il faisait son apprentissage, d’autant plus dur que la sensibilité de celui qui ambitionnait d’être un simple potier, son inadéquation au métier de loup de mer, en avait fait le souffre-douleur de tout l’équipage, jusqu’à finir abandonné sur un ilot désert. D’où des séquences féroces, de vexations et de tortures mentales autant que physiques.
Une vie de marin à laquelle Amédée aurait pu et dû se résigner, si le destin n’avait frappé à deux reprises : lors de sa capture par une jonque pirate et lorsqu’une graine lui tombe sur la tête. Une graine s’enracinant dans sa calotte crânienne et se développant ensuite, lentement mais sûrement, jusqu’à devenir un arbuste parasite promettant de devenir grand, au risque de tuer l’homme dont il se nourrit.
Pour ralentir le cours funeste des choses, il y aura la science d’un vieux sage qui taille l’arbre ainsi qu’un bonsaï, alors même qu’Amédée, devenant un colosse tatoué de la tête aux pieds, se met au service des pirates pour mener les abordages et tombe amoureux fou de la jeune Changaï Li. Une phase de son existence d’une grande intensité, où alternent carnages et scènes d’alcôve, Amédée sentant bien qu’il doit tirer le meilleur de la vie avant que ne survienne l’inéluctable : son sang qui devient sève, sa peau qui se mue en écorce, sa chair qui se solidifie.
Tant de souffrances, tant d’amour et tant d’action pour finir immobile, massif, enraciné dans une embarcation emplie de terre, à ressasser ses souvenirs, espoirs et regrets à un vieux capitaine et à deux de ses matelots montés à bord du vaisseau végétal, avant d’y bouter le feu à la demande de son seul occupant. Une longue confession que ce même capitaine rapporte ensuite à d’autres sans qu’on sache trop quelle est la part de vrai, quelle est la part de faux dans cette fable sans morale. Une histoire de marins, quoi, qui se suffit amplement à elle-même : les faits et les paroles déroulent leur mystère ainsi que dans les albums de Fred - on parle du père de “Philémon” - dont Fred Bernard partage le prénom ainsi que bien des traits.
L’homme bonsaï Scénario et dessin : Fred Bernard
Couleur : Delphine Chédru
Éditeur : Delcourt
Collection : Mirages
Dépôt légal : 26 août 2009
Pagination : 128 pages couleur
Format : 20 x 26,5 cm
ISBN : 978-2-7560-1774-7
Prix public : 14,95 €
Illustrations © Fred Bernard et Guy Delcourt Production (2009)