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Rébétiko (T1) La mauvaise herbe
David Prudhomme
Futuropolis

Après ses collaborations avec Cothias et des adaptations de textes littéraires (le roman de Brassens « La Tour des Miracles » , chez Delcourt avec Etienne Davodeau, puis de textes comme « La Farce de Maître Pathelin », de façon plus confidentielle), David Prudhomme s’était consacré, en compagnie de Pascal Rabaté, à l’attachante chronique familiale de « La Marie en plastique ». Le voici à présent qui, sous le coup d’une soudaine révélation, se lance seul et presque à corps perdu dans un projet ambitieux que magnifie son graphisme simple et efficace...



La réalisation de “Rébétiko” a tout du coup de cœur et de la divine surprise : la découverte qu’existait en Grèce, dans les années 30, un courant musical souterrain par le biais duquel un petit peuple de réprouvés et de laissés-pour-compte exprimait sa rage et ses espoirs - ses désespoirs et ses déconvenues aussi -, à la manière d’un exutoire. Un blues à la grecque, en somme, bien qu’originellement, ce furent des immigrés d’Asie mineure, nourris d’alcool et de haschich du côté d’Istamboul, qui introduisirent le rébétiko dans les faubourgs mal-famés d’Athènes... Où il s’implanta et se développa si bien qu’elle passe actuellement, à côté du très touristique sirtaki, pour authentiquement et populairement grecque.

Les débuts n’en furent pas moins pénibles, la vie de ces musiciens de l’ombre s’apparentant à une forme de résistance, alors même qu’une dictature à l’idéologie fasciste entendait imposer sa chape à toutes les strates de la population hellène. A travers la dérive de cinq amis et musiciens qui se jouent de la traque policière pour aller d’une fumerie clandestine à l’autre - de téké en téké comme on les appelait -, fumer le narguilé avant de taquiner bouzouki et blaglama, et de donner de la voix, David Prudhomme restitue une époque méconnue et fascinante, où certains choisissaient de risquer leur vie pour le plaisir de faire se dérouler, tels des volutes de fumée, la musique de leur âme.

Un époque révolue et foncièrement surprenante. Puisqu’en effet, la démarche des Rébétikés n’a rien de fondamentalement politique, mais correspond à l’expression d’un individualisme forcené : de la revendication d’une liberté totale, dont celle de se saouler et de se droguer à mort, avant de livrer en musique le meilleur de soi-même. Le plaisir de l’instant avant tout, et advienne que pourra. Vivre chaque minute comme si c’était la dernière. Vivre le meilleur et le pire dans un monde de violence et de misère, d’amours, de rencontres et de passions fatales...

Oui, il y aussi de la provocation adolescente, dans ce bel album adoptant le rythme d’une folle virée entrecoupée de confidences entre amis et de bouffées de nostalgie. Provocations gratuites et sans illusion... Celles d’éternels adolescents qui peuvent aussi bien mourir ce soir, dans une rixe au couteau, que décrocher le contrat qui les rendrait célèbres, sous d’autres cieux plus accueillants, mais où le sentiment d’urgence serait moins perceptible. Sans toutefois préjuger de la fin de la trajectoire, il est sûr que le charme des « beautiful loosers » n’est pas près de s’éteindre...


T1 : La Mauvaise herbe
- Série : Rébétiko
- Scénario et dessin : David Prudhomme
- Éditeur : Futuropolis
- Dépôt légal : 8 octobre 2009
- Pagination : 104 pages couleurs
- Format : 24,5 x 32 cm
- ISBN : 978-2-75480-0191-1
- Prix public : 20 €


Illustration inédite © David Prudhomme et Futuropolis (2009)



Alain Dartevelle
9 janvier 2010




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