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Narcose (2) : La Mémoire du Crime
Jacques Barbéri
Editions La Volte, roman (France, 1992), science-fiction, 195 pages, avril 2008, 18€

Aux commandes de La Volte, Mathias Echenay a entrepris un travail éditorial qui relève de la saine provocation, même s’il consiste à réactiver un univers particulièrement délétère : en l’occurrence, cet espace modulaire Granville où, dès 1989, Jacques Barbéri avait, avec « Narcose », mis le meilleur de sa prose et le pire de ses fantasmes.

Trois ans plus tard, c’était au tour de « La Mémoire du Crime », que voici lui aussi réédité, d’enfoncer le couteau dans la plaie...



Tout Barbéri réédité, assorti de quelques somptueux bonus ? C’est bien ce qui risque d’arriver, pour la plus intime jouissance de lecteurs au coeur bien accroché, prêts à en déguster dans tous les sens de ce verbe. S’ils se sont auparavant aventurés dans « Narcose », frottés à sa population d’êtres mi-hommes mi-bêtes, s’ils ont partagé les affres d’un Anton Orosco doutant de tout -à commencer par sa propre existence-, s’ils ont partagé ses contradictions de looser écartelé entre copulations de rencontre et l’amour qu’il voue à l’image de Celia, et si le sort a voulu qu’ils puissent s’extraire, indemnes ou à peu près, de cet univers verbal aux extrêmes pouvoirs d’addiction, la réédition de « La Mémoire du Crime » offre aux plus téméraires la chance ou la malédiction de s’y replonger jusqu’au cou.

Datant de 1992, publié lui aussi dans la mythique collection « Présence du Future » (Denoël), « La Mémoire du Crime » n’est nullement une suite à « Narcose », tout en lui empruntant son décor déjanté. Et en affichant une certaine parenté avec lui, question parcours chaotique du personnage principal. Dans ce cas de figure-ci, c’est la dérive obsessionnelle d’un créateur du nom d’Harry Botkine, passé maître dans le rodéométathrombix - soit l’orchestration de performances acoustiques sous perfusion collective - que nous sommes conviés à partager. Harry Botkine, qui se glisse dans la peau d’un enquêteur des temps informatiques pour se lancer à la recherche de ce qui reste de Pricilla, autre Célia, femme de sa vie d’excès. Pricilla, dont dès les premières pages, le cadavre lui est livré, vidé de sa substance, dans un cocon façonné par une monstrueuse araignée...

« La Mémoire du Crime » se différencie pourtant de « Narcose » par sa structure apparente et par certains de ses enjeux narratifs. Car, là où le premier opus narcotique assumait un somptueux désordre, au point de pousser Orosco à tenter d’échapper aux pages du livre-même, se la jouant Alice au pays des horreurs, ce roman-ci se donne pour ordonné, voire hyper-structuré : composé de neuf parties faites de courts chapitres qui seraient bien les fragments d’un grand miroir brisé, tandis qu’un épilogue vient clôre le tout.

Une structure qui n’est, on l’aura pressenti, qu’un trompe-l’oeil destiné à mettre un semblant d’ordre au coeur du désordre, ainsi qu’à conférer à la narration le sentiment d’une irréversibilité fatale : comme dans ces polars d’un autre âge dont Barbéri détourne les stéréotypes par jeu désabusé. Pour faire comme si, puisque tout serait faux. Pour tuer le temps et pour se perdre, puisque tout se disperse dans les méandres de la mémoire...

« La Mémoire du Crime », une autre invitation à boire le calice jusqu’à la lie, quitte à vomir la vie et au point d’en vouloir, encore et encore... D’en redemander, pour voir jusqu’où osera aller ce manipulateur qui a Jacques pour prénom, et pour savoir, aussi, ce qui attend de pauvres diables condamnés à vivre les fantasmes d’un écrivain nommé Barbéri...

Auquel cas, alleluïa !, il se fait que La Volte annonce la parution prochaine d’un inédit pur jus : « Le Tueur venu du Centaure ».

De quoi se repaître, encore et à jamais, de vérités aussi immédiates que le sont orgasme et mort violente.

À LIRE ÉGALEMENT SUR LA YOZONE

-  Du scotch et des amphèts : le rêve ?
« Narcose » de Jacques Barbéri
Délices & Daubes n° 113
(Henri Bademoude).

- Narcose (1) : critique (Alain Dartevelle)


Titre : La Mémoire du Crime (roman, 1992)
Série : Narcose (2)
Auteur : Jacques Barbéri
Couverture : Philippe Sadziak
Éditeur : La Volte
Première publication : Présence du Futur n°534 (Denoël)
Site Internet : fiche recueil (site éditeur La Volte)
Pages : 195
Format (en cm) : 23 x 17
Dépôt légal avril 2008
ISBN : 9782917157060
Prix : 18€



Alain Dartevelle
7 décembre 2009


JPEG - 29.9 ko
Réédition La Volte (avril 2008).



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L’édition originale (Présence du Futur, 1992).



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Ne pas oublier : « [Narcose->8863] » (La Volte).



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