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Dernier Vœu (Le)
Andrzej Sapkowski
Bragelonne & Pocket, roman traduit du polonais, fantasy, 336, 414 & 313 pages, 2003, 2005 & 2008, 7,30€ & 20€

Geralt de Riv est un sorceleur, un chasseur de monstres qui combat le mal. Si certaines créatures fantastiques, mauvaises par essence, ne méritent qu’un coup de son glaive en argent, d’autres sont victimes de malédictions, que le mutant aux cheveux blanchis se fera un devoir d’exorciser, par des méthodes parfois surprenantes.

« Le Dernier Vœu » rassemble plusieurs souvenirs de Geralt, qui reviennent à la surface tandis qu’il fait le point sur sa vie suite à une vilaine blessure. À défaut de lever le voile sur sa formation et ce qu’il a alors subi, c’est l’occasion pour nous de le suivre lors de différentes missions, à la résolution parfois surprenante.



Un peu de fantasy polonaise ne fera de mal à personne. En dépit de cette idée que l’Europe possède un pot commun d’imaginaire, idée soulevée par l’auteur lors des Imaginales 2009, le style d’Andrzej Sapkowski apporte une bouffée de renouveau à la fantasy.
Les noms des royaumes sonnent évidemment plus slaves, ce qui nous changent des éternelles variations tirées de Tolkien ou simplement anglophones.

Mais la manière d’aborder cet univers est aussi subtilement différente. On a ici affaire à un Moyen-âge encore un peu rude, pas encore empesé d’une étouffante étiquette qui maquille de faux-semblants les conversations entre nobles. Geralt tutoie les rois et reines, s’adresse à eux d’homme à homme, et non de vassal à suzerain. Et eux de répondre de même, reconnaissant au sorceleur une compétence dont ils ont besoin, et qu’ils respectent. Même si parfois, certaines Majestés sont aussi vives à promettre le bâton que l’or…

L’autre nouveauté de cette fantasy d’Europe de l’Est est la très faible influence des jeux de rôle américains. L’univers du sorceleur, peuplé de monstres et de chimères, tient plus de celui des contes des frères Grimm que de “Donjons & Dragons”. La magie, loin des incantations exubérantes de couleurs, emploie plus volontiers les décoctions maison et les plantes, dont une bonne moitié bien connues de notre monde, instillant une autre parenté avec notre passé médiéval européen. L’atmosphère sombre, rustique, rappelle l’esthétique du film de Terry Gilliam, « Les Frères Grimm ».

Sapkowski puise dans les contes classiques, détournant subtilement des personnages connus de tous. Blanche Neige devient une redoutable tueuse, secondée par les sept assassins, pas tous de petite taille, qui l’ont recueillie après que le chasseur engagé par sa belle-mère l’eut violée. La Belle et la Bête apparaissent également, subtilement bouleversés, la Belle s’avérant mortelle.
L’auteur sait également glisser de simples allusions, comme lorsqu’il évoque la fin du métier d’attrape-rats à pipeau, profession que “le joueur de flûte de Hamelin” a rendue célèbre, menacée par les alchimistes et leurs poisons, ainsi que par la prolifération des chats domestiques. Dans un univers qui paraît parfois un peu rustre, Sapkowski s’emploie à décrire un monde en mutation, où des gens comme son sorceleur, chargé d’éliminer les monstres hérités du passé, travaillent à leur propre perte. Un monde où la subtilité sera de mise, où il faudra parfois choisir un moindre mal, et où les monstres ne sont pas tous laids, et vice-versa.

Un excellent livre, succession de courtes aventures où la réflexion l’emporte souvent sur l’action, et où la connaissance des malédictions et une certaine éloquence font autant merveilles qu’un glaive en fer ou en argent. Tout dépend de ce qu’on a en face… Le tout dans un style qui nous sort de nos habitudes de lecture.

Mais alors, une question brûlante : pourquoi nous a-t-il fallu attendre si longtemps pour découvrir ce chef-d’œuvre, best-seller dans son pays ?
Bragelonne le traduit en 2003, alors que le roman a déjà 10 ans. Sous une couverture de Michael Welply (ci-contre), pas forcément très aguichante, le succès est limité. Idem pour la réédition poche, illustrée plus finement par Étienne Le Roux.

Le déclic se fera néanmoins, car les droits ont été vendus à divers médias : le cinéma (un film polonais paraît-il assez raté), la BD, la télévision, et le jeu de rôles. C’est ce dernier point qui est déterminant. Adapté en jeu vidéo, “The Witcher” va être sacré jeu de l’année 2007, et accueilli par le public comme un digne successeur de “Baldur’s Gate” et “Neverwinter Nights”. La tête de loup, symbole du sorceleur, dévore les visuels. Malgré la crise et les échecs d’adaptation sur consoles, un numéro 2 ne devrait pas tarder à sortir sur PC.

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The Witcher
La tête de loup, symbole des sorceleurs


Au point qu’il va être repris par Bragelonne, qui réédite « Le Dernier Vœu » et entreprend d’en traduire les volumes suivants : « L’Épée de la Providence », « Le Sang des Elfes », « Le Temps du Mépris », ces deux derniers volumes sous-titrés “la saga du sorceleur” (ainsi que les trois autres à venir). C‘est Étienne Le Roux qui est à nouveau chargé de la couverture. Il utilise de la couleur directe pour les deux premiers tomes (voir ci-contre), avant de revenir à du dessin plus classique mais d’aussi bel effet pour la “saga”. La tête de loup sert désormais d’estampille à la série.

On retrouvera alors avec plaisir le barde Jaskier, la vénérable Nenneke et la jolie et mystérieuse Yennefer dans la suite des aventures de Geralt. Certaines décisions prises dans « le Dernier Vœu » auront des conséquences, et on en apprendra un peu plus sur la formation de sorceleur, devine-t-on à la lecture des quatrièmes de couverture.

La suite bientôt sur Yozone !


Titre : Le Dernier Vœu (Ostatnie Zyczenie, 1993)
Auteur : Andrzej Sapkowski
Traduction (du polonais) : Laurence Dyèvre

- Pour la première édition :
Couverture : Etienne Le Roux
Editeur : Bragelonne
Site Internet : fiche du roman
Pages : 336
Format (en cm) : 23,8 x 15,4 x 2,6
Dépôt légal : mai 2003
ISBN : 2-91437-049-0
Prix : 20 €

- Pour l’édition de poche (édition ici chroniquée, et apparemment épuisée) :
Couverture : Etienne Le Roux
Editeur : Pocket
Collection : Fantasy
Numéro : 5862
Pages : 413
Format (en cm) : 17,7 x 10,8 x 1,8
Dépôt légal : avril 2005
ISBN : 2-266-15143-6
Prix : 7,30 €

Les coquilles relevées :

Texte - 915 octets
Le Dernier Voeu - corrections

- Pour la réédition en grand format :
Couverture : Etienne Le Roux
Editeur : Bragelonne
Site Internet : fiche du roman
Pages : 313
Format (en cm) : 23,8 x 15,4 x 2,6
Dépôt légal : janvier 2008
ISBN : 978-2-35294-140-8
Prix : 20 €



Nicolas Soffray
8 juillet 2009


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Le Dernier Vœu, première édition, 2003
couverture de Michael Welply



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Le jeu vidéo Action-RPG sur PC
The Witcher



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La réédition 2008



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