Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Gens de la Lune
John Varley
Gallimard, FolioSF, science-fiction, roman, traduction (anglais, E-U), 880 pages, octobre 2008, 10,50€

John Varley a récolté trois Hugo et deux Nebula, c’est un écrivain brillant et original comme il le démontre dans ce très long roman qui fait partie de l’univers du “Canal Ophite”.



C’est Hildy Johnson, journaliste au “Tétin”, sélénite qui vient de fêter son premier centenaire, qui raconte ce qui lui est arrivé pendant cette période cruciale de sa vie et de celle de la Lune.

Notre satellite est un des huit mondes où survit l’Humanité après que les Envahisseurs aient détruit la Terre et ses habitants. Sous les dômes immenses, tout a été refait à la manière d’une vie normale au 23e siècle, des cités trépidantes avec ses stars, ses matchs de slash-boxing (un catch à mort), ses boutiques où on se fait refaire entièrement, y compris en changeant de sexe, ses mag-blocs d’informations, comme celui où travaille Hildy, et ses reconstitutions du Texas ou de la Pennsylvanie.

Tout est géré par le Calculateur Central, dit C.C., une super Intelligence Artificielle qui fait la pluie et le beau temps, entre autres, sur King City et les autres villes de la Lune.
Dès le début de ce très long roman, Hildy discute avec C.C. et toute la trame du livre va reposer sur cette relation étrange entre un casi-dieu électronique et un individu humain (d’abord homme puis femme).

La qualité d’écriture de Varley est un véritable plaisir, jamais lourd, toujours drôle, détaché et sarcastique, n’hésitant pas à interpeller le lecteur et sa culture, posant des vraies questions fondamentales avec subtilité et intelligence.

Hildy a un problème, il (elle) a des tendances suicidaires. Après 100 ans de vie et au moins autant à vivre, comment motiver son existence ? Comment éviter l’ennui, la répétition ? Comment marquer son époque quand on n’est pas un grand savant ou un grand artiste ? Faut-il se perpétuer, soi-même, ses enfants ou ses gènes ? Que devient l’Humanité quand presque tout est possible grâce à la biotechnologie ?
Mais C.C. aussi a ses problèmes, il est trop puissant, trop intelligent, trop grand, avec personne pour le limiter. Il a lui aussi une conscience, a-t-il aussi un subconscient ? Ou sont-ce toutes ses composantes qui ont du mal à fonctionner avec ensemble ? C.C. serait-il schizophrène ?

Le dernier quart du roman fait intervenir les Heinleinistes en un hommage appuyé mais lucide de Varley au Maître disparu. Ces gens-là, plus anars que libertariens, ont réussi à s’isoler de C.C., à échapper à son contrôle absolu, en développant en secret des technologies qui pourraient autoriser l’Homme à survivre dans le vide, au moins transitoirement.

Alors que le rythme du roman est lent mais extraordinairement prenant grâce à la qualité de l’écriture, les événements se précipitent sur la fin. Mais je ne vous la raconterai pas.

On sent que John Varley a de la bouteille (il est né en 1947), en plus d’un talent certain pour écrire des choses graves avec légèreté et humour. Les questions qu’il pose sont celles d’un homme qui a beaucoup vécu, beaucoup expérimenté et beaucoup réfléchi.

Ce roman est, à mon humble avis, un des plus intelligents textes de science-fiction jamais écrits et, malgré son extrême longueur, il se lit avec plaisir parce que l’humour est toujours là, en permanence, derrière et par-dessus les horreurs et les drames, pour mettre en perspective les raisons de vivre.



Titre : Gens de la Lune (Steel Beach, 1992)
Première édition française : Denoël, collection Présence du Futur (1994)
Auteur : John Varley
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Jean Bonnefoy
Editeur : Gallimard
Collection : Folio SF
Directeur de collection : Pascal Godbillon
Format (en cm) : 17 x 10,8
Pages : 880
Dépôt légal : octobre 2008
ISBN : 978-2-07-035905-2
Prix : 10,50 €


Un dossier sur John Varley en Yozone


Hervé Thiellement
3 décembre 2008


JPEG - 13 ko



Chargement...
WebAnalytics