Genre : Héroïc Fantasy
Durée : 2h58
Avec Elijah Wood (Frodon Sacquet), Ian McKellen (Gandalf le Gris), Viggo Mortensen (Aragorn), Sean Astin (Sam), Liv Tyler (Arwen Undómiel), Cate Blanchett (Galadriel), John Rhys-Davies (Gimli), Billy Boyd (Pippin), Dominic Monaghan (Merry), Orlando Bloom (Legolas), Hugo Weaving (Elrond), Sean Bean (Boromir), Ian Holm (Bilbon Scquet), Andy Serkis (la voix de Gollum), Sala Baker (Sauron), Marton Csokas (Celeborn), Brad Dourif (Gríma), Bernard Hill (Roi Théoden), Christopher Lee (Saroumane le Blanc)
Il y a fort longtemps dans les Terres du Milieu, Sauron, prince de Mordor et seigneur des ténèbres, forgea un anneau unique aux terribles pouvoirs. Par chance, Sauron fut défait, mais son Anneau ne fut pas détruit. Il envoûta ses porteurs, du roi des Hommes Isildur à la pitoyable créature Gollum... jusqu’au jour où un explorateur hobbit, Bilbon Saquet, le trouva et le ramena dans sa province : la Comté.
De nombreuses années se sont écoulées dans la paisible Comté. Mais alors que le vieil hobbit fête ses 111 ans, le mal se réveille en Mordor, et l’Anneau aspire à retrouver son maître...
Adapter « Le Seigneur des Anneaux » sur grand écran est un des plus grands défis qui soient. Des centaines et des centaines de pages, un univers vaste et foisonnant, sans oublier des millions de fans prêts à crier à l’assassinat... Peter Jackson, de son propre chef, a osé. Le réalisateur de « Brain dead », « Bad taste » ou encore « Créatures célestes », n’avait pas l’habitude des projets titanesques, des budgets colossaux, des pressions écrasantes... mais il a osé. Ce simple fait mérite le respect.
Si Jackson est resté fidèle à l’œuvre, il l’a néanmoins retravaillée avec acharnement, lisant le livre une centaine de fois de la première à la dernière ligne, et le peaufinant en souplesse pour faire de l’œuvre littéraire une oeuvre de cinéma avec ses caractéristiques propres.
Ainsi, par exemple : pour des raisons de rythme, le sympathique personnage de Tom Bombadil a été éludé ; pour des raisons d’équilibre, les personnages féminins ont été étoffés, telle Arwen d’après les annexes du livre ; par définition, le visuel de l’œuvre, bien qu’appuyé sur les illustrations préexistantes de Alan Lee, est une création. Et puis, bien sûr, il y a les scènes de combat, du simple duel au champ de bataille démesuré, qui se résument bien souvent chez Tolkien à quelques lignes évasives.
Ces scènes de batailles sont littéralement époustouflantes. Les plans s’enchaînent, la caméra virevolte, la musique tonne, dans un chaos apparent qui reflète la sauvagerie et la contingence de la guerre. Nous sommes plongés au cœur de la mêlée, et tout va trop vite pour nous. Même quand il n’y a que deux belligérants, quand les deux magiciens Gandalf et Saroumane s’affrontent, l’intensité est présente (malgré l’intelligence de Jackson de ne pas recourir à des effets vulgaires comme les boules de feu et les incantations en pseudo-charabia...).
Si un mot pouvait définir le travail réalisé par Peter Jackson, ce serait probablement « rythme ». A partir d’un premier livre dense et quelque peu hermétique, pour ne pas dire ennuyeux, et dont certains n’ont pas su franchir le cap, le talentueux néo-zélandais nous livre trois heures de spectacle haletant et surdynamité. Mis à part le temps mort de Fondcombe, la quête est sans répit, l’action et l’émotion se répondent en un dialogue effréné qui laissent le spectateur pantelant au fond de son siège.
Le second point fort du film est l’interprétation. Peter Jackson, on le sent bien, aime ses acteurs ; il leur offre sans cesse des gros plans pour laisser éclater leur talent, pour que le charisme brut et charnel des acteurs donne sa pleine mesure. Il les a soigneusement sélectionnés parmi des centaines et des centaines de candidatures spontanées (dont certaines stars, fans de l’œuvre de Tolkien), il n’a pas hésité à refuser des pointures, a en renvoyé d’autres si elles ne convenaient pas... jusqu’à être sûr d’avoir LE casting qu’il fallait. Et il ne s’y est pas trompé. Les palmes reviennent à Sean Bean en Boromir, Ian Holm en Bilbon ou encore Ian McKellen en Gandalf (et Viggo Mortensen aka Aragorn dans tout ça ?). Leur jeu est... shakespearien. Ils jouent avec puissance et flamme, déclament, rient et meurent avec un talent qui transcende le commun de leur profession. Seules les prestations des elfes peuvent sembler défaillantes, mais ce serait oublier que les elfes ne sont pas des hommes, qu’ils sont froids, impassibles et gracieusement... louches ; et ce serait également oublier que leurs voix françaises ne sont pas irréprochables.
Bien sûr, rythme et interprétation ne sont pas des arguments de vente aussi efficaces que les effets spéciaux. Mais en ce domaine réside une surprise de taille. En effet, les images de synthèse (d’une compagnie néo-zélandaise fondée par Jackson : la Weta), bien que très présentes, ne sont pas omniprésentes. Dès qu’il l’a pu, Peter Jackson a employé le système D : doublures naines et géantes pour chaque acteur, masques et combinaisons en tout genre, acteurs jouant à genou, ou bien sur des plans différents afin de générer à l’écran l’illusion d’un écart de taille...
Les décors, qu’ils soient naturels (Ah, la Nouvelle-Zélande !...) ou en image de synthèse, sont magnifiques, au seuil de l’onirique. Et pour une fois, on a le temps de les admirer, d’entrer en eux et de plonger au-delà des deux dimensions de l’écran.
Ce film, s’il en a tous les ingrédients, n’est pourtant pas « hollywoodien ». Une myriade de petits détails l’en distingue. Les plus significatifs à mes yeux sont les mains sales des héros - au sens propre -, la terre sous leurs ongles, leurs traits tirés, leurs cheveux collés... La crédibilité est là.
Alors bien sûr, certains trouveront les passages dramatiques trop « crémeux » ; la bande originale efficacement efficace de Howard Shore tantôt trop « guimauve » tantôt trop « Carmina Burana » ; les dialogues trop « verbeux » ; les scènes d’action trop « tching-tching-aaargh !... » ; mais personne ne pourra objectivement conspuer le film. Dire cela d’une adaptation de l’un des plus grands chefs-d’œuvre de la littérature est un doux euphémisme pour signifier l’ampleur du tour de force. Car c’est bien d’un tour de force dont il s’agît, et pour s’en convaincre il suffit de se rappeler du nullissime « Donjons et Dragons » ou d’imaginer ce qu’en aurait fait tout autre réalisateur, même sans aller jusqu’à évoquer les récidivistes du pire que sont Schumacher ou Emmerich.
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« De toute façon, comme Jackson le dit lui-même, aucun film ne peut prétendre atteindre le degré de complexité de l’œuvre de Tolkien. »Alors pourquoi lui faire un procès qui n’a pas (haut) lieu d’être ?« Aussi, personnellement, je lui dis »bravo". Je suis allé voir le Seigneur des Anneaux une fois, et il m’a passé la bague au doigt.
7 janvier 2002
FICHE TECHNIQUE
Titre original : The Lord of the Rings : The Fellowship of the Ring
Réalisation : Peter Jackson
Scénario : Frances Walsh, Philippa Boyens, Peter Jackson d’après le roman de J.R.R. Tolkien
Producteurs : Peter Jackson, Barrie M. Osborne, Tim Sanders
Coproducteurs : Rick Porras, Jamie Selkirk, Frances Walsh
Producteur associé : Ellen Somers
Producteurs exécutifs : Michael Lynne, Mark Ordesky, Robert Shaye, Bob Weinstein, Harvey Weinstein, Saul Zaentz
Musique originale : Howard Shore, chansons de Enya
Image : Andrew Lesnie
Montage : John Gilbert
Distribution des rôles : Victoria Burrows, John Hubbard, Amy MacLean, Liz Mullane, Ann Robinson
Création des décors : Grant Major
Direction artistique : Joe Bleakley, Dan Hennah, Philip Ivey, Rob Outterside, Mark Robins
Création des costumes : Ngila Dickson, Richard Taylor
Décorateur de plateau : Tanea Chapman, Dan Hennah, Alan Lee, Victoria McKenzie
Production : New Line Cinema, The Saul Zaentz Company, WingNut Films
Distribution : Metropolitan Filmexport
Effets spéciaux : Digital Domain, Weta Digital, Video assist design and build, BBVC/Kelly’s Eye Ltd.
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Les autres films de la trilogie :
=> Les deux Tours
=> Le retour du Roi
Photos © Metropolitan Filmexport