Genre : docu scientifico-fictif
Durée : 1h48

Avec Amanda (Marlee Matlin), Frank (Barry Newman), Jennifer (Elaine Hendrix), Homme dans le métro (Armin Shimerman), Reggie (Robert Bailey Jr), Elliot (John Ross Bowie), Bob (Robert Blanche), etc.

Aaah les questions existentielles, quel panard ! La métaphysique, le sens de l’univers et de la vie, l’irréalité des choses... des thèmes sur lesquels j’adore méditer. Combien d’heures passées sur radio Ici & Maintenant à écouter des sciences philosophiques ? Autant de sujets passionnants qui mériteraient le meilleur des films. Peut-être le sortira-t-on un jour. Une chose est certaine ce ne sera pas pour 2007, ou alors il faudra se dépêcher.
Mais soyons un brin concret...

« Que sait-on vraiment de la réalité !? » (“What The Bleep Do We Know ?” en vo) est un docu-fiction (mi docu réel, mi fiction) parlant de physique quantique et de rapport avec le réel. Le départ sonne comme une bande-annonce, des images défilent dans tous les sens sur une bonne dizaine de minutes. À cela s’enchaînent des questions, des questions et encore des questions, posées par la voix-off et tombant vite à plat à force de répétition (« Est-que... ? Est-on certain... ? Pourquoi... ? » : une véritable overdose de points d’interrogations).

Puis la fiction commence enfin. Le cadre s’installe, sans trop savoir pourquoi on suit une jeune femme dans son quotidien. Son jeu n’est pas fameux (encore que l’actrice ne fait sans doute que ce qu’on lui demande) et pas très cohérent. Elle est censée être sourde mais parle presque normalement. Elle parvient à lire sur les lèvres sans que son interlocuteur n’ait besoin d’articuler. Elle s’extasie bouche ouverte et yeux écarquillés devant des tas de petits évènements plus ou moins surnaturels, qu’on pourrait faire survenir dans n’importe quel ordre. Bon, admettons que le démonstratif soit un parti pris, mais pour nous montrer quoi ? Des idées intéressantes, certes, mais bien floues.
« L’histoire » continue en rebondissant : on découvre la colocataire de notre héroïne, une actrice au jeu caricatural, ce qui n’arrange rien, jouant la blondasse idiote.
Le déroulement s’empêtre. Il n’est pas du tout à la hauteur du discours, un discours en fait bien prétentieux. On est censé se sortir de la science classique, découvrir les mystères de l’âme, de la réalité, de la physique quantique. Que de belles promesses ! On sombre de plus en plus dans l’abstrait. Ces séquences de fiction surréaliste sont entrecoupées d’entretiens de physiciens aux tons plus évasifs les uns que les autres. Ils se disent en décalage avec notre vision matérialiste du monde, pourtant... Certains sont en costard-cravate, et presque tous s’expriment devant un décor mirobolant (grande maison studieuse, paysage de rêve...). Ils déclament avec des sourires d’auto-contemplation leurs grandes théories sur l’homme, l’espace et le temps. Parfois avec tant de conviction que leur jeu est bien meilleur que les actrices du film.

Lorsque le générique de fin se décide à pointer le bout de son nez, on passe en revue chaque intervenant du documentaire se mettant à faire l’étalage de ses diplômes et des universités où il enseigne. Un générique-CV, ça restait à inventer !
Pour parler de science philosophique, pour vulgariser la physique quantique, il ne faut pas être qu’un chercheur ou un scientifique. Il faut aussi être un poète et un communicant, deux qualités indispensables qui ne brillent que par leur absence de la première à la dernière minute.

Le pari était de parvenir à faire ce film et à trouver des distributeurs, pari réussi. Je ne parierais sur vraiment rien d’autre...

Tom Décembre

UNE AUTRE CRITIQUE

Quand tout déraille, la vie, la société, les femmes, les hommes, les vaches, les croyances et le reste, l’humanité a toujours eu une fâcheuse tendance à piocher dans les bonnes vieilles recettes du passé pour essayer d’en tirer une idée de plat contemporain, crédible et appétissant.
« Que sait-on vraiment de la réalité ?! » est de ce point de vue totalement réussi.
Prenons un peu de physique quantique (le genre de truc qui attire la curiosité mais s’avère réellement incompréhensible à moins d’avoir entre les bras un bon doctorat en physique), des idées vieilles comme l’humanité (“Connais-toi toi-même”), touillons le tout, assaisonnons de quelques témoignages de « scientifiques » censés crédibiliser le propos général, pimentons de quelques nanas pas désagréables à voir et taratata, nous obtenons un vrai-faux docu pseudo scientifique vendant à la criée Dieu le Père et sa grande mansuétude.

Car au fond, tout ça ne parle que de ça. Dieu par ci, Dieu par là, une église (irlando-américaine) en guise de décor principal célébrant un mariage alibi à la démonstration, un paquet de malheurs (point trop graves cependant, ils sont psychologiques, personne ne vit en Somalie dans ce doc) et le tour est joué.
Le résultat ? Décevant, sans signification réelle, pas vraiment instructif ou vulgarisateur non plus. Une satisfaction : une définition intéressante (“la physique des possibles”) des théories quantiques.

Le reste ? Très, trop américain. Pas que ce soit grave, mais simplement trop éloigné de notre culture ou de nous pour que le propos nous semble instructif et fiable. Mais bon, il y a des clients, il y en a toujours eu et il y en aura encore.
Critiques principales et malheureusement nombreuses, l’aspect scientifique du sujet reste peu clair, certaines théories balancées comme absolues et reconnues sont plus que sujettes à caution et toujours cette omniprésence divine en justificatif incontestable du moindre murmure (ça fatique et ça énerve à la longue).

Bon, soyons francs, un laïc comme moi a du mal, beaucoup de mal, et tant qu’à réfléchir à ces sujets, il préfère se resservir quelques bonnes tranches de Saint Augustin, de Platon, de Montaigne ou de Pascal (liste non exhaustive). C’est peut-être un peu vieux jeu, moins marrant qu’un mariage trop alcoolisée qui part en délire psyché (vers la fin du doc), mais au moins ça ne donne pas des idées du style « pour maigrir, il suffit de convaincre son corps qu’il peut maigrir ! » (véridique et affirmé comme un théorème fondamental). Bref, le fond de l’air effraie un peu et sent parfois la secte masquée (ou l’école de pensée aux idées troubles).

« Que sait-on vraiment de la réalité ?! ». Ben, après ce doc, pas grand-chose de plus qu’avant...

Stéphane Pons

FICHE TECHNIQUE

Titre original : What the bleep do we know ?!
Réalisation : Mark Vincente, Betsy Chasese et Willian Arntz
Scénario : Betsy Chasese, Willian Arntz, Matthew Hoffman

Producteurs : Betsy Chasese, Willian Arntz

Musique : Christopher Franke
Photographie : Mark Vicente
Décors : Nava
Maquillage : Larry Day
Casting : Danny Stoltz
Monteur : Jonathan Shaw

Production : Captured Lights (USA), Lord of the Wind Films (USA)
Distribution : Medula Films (France)
Presse : Idoïa Serrano Azcona

SITE INTERNET
http://www.quesaitonvraimentdelarealite-lefilm.com