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Last Man On Earth (The) - Je Suis une Légende
Film fantastique americano-italien de Sidney Salkcow & Ubaldo Ragona (1963)
8 mars 1964 (USA) - 10 août 1964 (Italie)


Genre : Fantastique (Fin du Monde)
Durée : 1h26

Avec Vincent Price (Dr. Robert Morgan), Franca Bettoia (Ruth Collins), Emma Danieli (Virginia Morgan), Giacomo Rossi-Stuart (Ben Cortman), Umberto Raho (Dr. Mercer), Christi Courtland (Kathy Morgan), Antonio Corevi (le Gouverneur), Ettore Ribotta (le journaliste TV), etc.

Un homme, le Docteur Morgan (Vincent Price), est le dernier survivant sur Terre d’une terrible et mystérieuse pandémie qui a décimé l’humanité. En quelques semaines, un étrange virus a transformé les hommes en une nouvelle race de vampires vivant la nuit.
Seul au monde, il s’obstine à combattre et tuer les vampires qu’il trouve le jour puis se barricade la nuit venue... Cependant, son combat n’est-il pas vain et sans espoir ?

Une succession de plans larges, avenues vides, immeubles abandonnés, terrains vagues désertés, voitures délaissées sur les trottoirs, puis les premiers cadavres... Éparpillés, au milieu de rues à l’abandon, de places envahies par les détritus.
Et toujours cette musique lancinante et répétitive en fond sonore. Dernier plan très bref de cette séquence d’ouverture, le panneau prémonitoire d’une congrégation religieuse quelconque annonce : « The End has Come » (Litt. La fin est là).
Seconde séquence, un réveil sonne, un homme sort de son sommeil, intervention lapidaire d’une brève voix off (“One more day...”-Un jour de plus...). L’homme se lève, il a dormi habillé. Premiers gestes, il va cocher la date de ce nouveau jour sur une éphéméride de fortune dessinée contre un mur crasseux. La caméra se recule et le spectateur comprend, en découvrant l’impressionnante liste de mois et d’années qui apparaissent peu à peu, que cela fait un bon moment que cet intrigant cérémonial dure.
Quelques instants plus tard, l’homme prononcera ses premiers mots. Un appel sur une fréquence radio internationale qui restera sans réponse. Il aura fallu attendre la fin des six premières minutes de ce « The Last Man on Earth » pour entendre la voie de l’acteur Vincent Price alias le “Dr Robert Morgan”, alias “le dernier homme sur Terre”.
Réalité objective, l’homme est bien seul, infiniment seul.
Réalité subjective, c’est dans cette ambiance délétère et angoissante que démarre la première adaptation du roman « Je suis une Légende » de Richard Matheson.

Dramatiques à souhait, les quinze premières minutes du film sont ensuite consacrées à la vie morne et désespérante de ce Robinson Crusoe post-apocalyptique. Les éléments du scénario se mettent en place les uns après les autres, tous aussi logiques, surprenants et incongrus : tous les matins, l’homme accomplit un rituel immuable. Préparer son petit-déjeuner, vérifier et alimenter un groupe électrogène, ramasser les cadavres gisant devant sa porte, tailler quelques pieux, vérifier les plantations d’ails, en suspendre un nouveau bouquet sur sa porte, prendre sa voiture, aller chercher de l’essence, de la nourriture, de l’ail (encore), récupérer quelques miroirs.
L’homme entame ensuite une chasse étrange où il décime à grand coups de pieux dans le cœur plusieurs personnes réfugiées dans un sommeil apathique dont elles sortent à peine au moment fatidique, puis il brûle leur corps. On comprend qu’il y passe le reste de sa journée, de toutes ses journées même depuis des mois, des années.
Le soir venu, harassé et fourbu par sa longue journée de labeur, il rentre chez lui, met un disque de jazz à fond les manettes, se barricade avec soin. Des êtres aux pas mal assurés encerclent sa maison, tentent maladroitement d’y pénétrer. Lui n’en a cure, se sert un verre et s’endort. Une journée de plus est passée, une autre s’annonce. Et tel un Sisyphe poussant sa pierre sans répit, tout est destiné à recommencer sans fin.

Premier choc, au-delà du film fantastique se cache donc une thématique existentialiste omniprésente.
Frappant, « The Last Man on Earth » (1964) s’inscrit aussi dans les règles immuables du film de zombies. Des êtres maladroits et lents, à la démarche dégingandée, qu’un homme normal repousse ou distance sans problème.
Pour la petite histoire, George A Romero avouera lui-même s’être largement inspiré de ce film pour « La Nuit des Morts Vivants ». On le vérifiera plusieurs fois, certaines scènes étant tournées quasiment à l’identique dans les deux œuvres (l’approche des vampires-zombies autour de la maison du-des survivants, une main qui tente de franchir le seuil d’une porte avant que celle-ci ne soit violement refermée, etc). L’utilisation du Noir et Blanc dans les deux films à quatre ans d’intervalle, renforçant cette sensation d’objets cinématographiques liés et complémentaires.
Grosse différence cependant, dans « The Last Man on Earth », la sensation de danger ou d’encerclement n’est absolument pas omniprésente a contrario de « La Nuit des Morts Vivants » tout entier construit sur cette émotion primale.
Nulle volonté de survivre à tout prix ici, juste le besoin de vivre car il le faut bien. On avait parlé d’existentialisme, la sensation est renforcée par un contexte absurde, au sens camusien du terme, évident.

Utilisant le principe du flash-back, c’est à partir de la vingt-huitième minute du film que sont livrées les raisons du drame. Durant presque une demi-heure, la narration va reprendre un cours plus classique, racontant simplement une histoire de fin du monde.
Nouvelle bascule du scénario à l’heure de projection et fin du flash-back, une femme surgit dans la vie du survivant. Elle est contaminée, mais le Dr Morgan va tenter de la soigner. Puis les événements vont s’enchaîner à nouveau dans un final malheureusement confus et bâclé.
Apparition nocturne d’un commando, des dizaines d’hommes équipés d’armes militaires, motorisés et habillés de noir qui vont prendre en chasse le Dr Morgan pour une fin que l’on devine tragique mais chut...

Le dernier tiers (30 mn) de « The Last Man on Earth » est évidemment raté, détonne et rompt l’harmonie générale du scénario. On sait que Richard Matheson, insatisfait du résultat global de cette adaptation, refusa d’être crédité au générique sous son vrai nom. On suppute que cette fin, pas totalement déshonorante cependant, mais par trop rapide et touffue, est sans doute la cause principale de la fâcherie.
Ces minutes passées à amener une dernière scène académique sur les bases classiques du film à suspense (une poursuite, une fusillade, un héros coincé, une héroïne éplorée, etc) oblitère totalement la finesse et l’humour noir du roman de Matheson.
On comprend bien qu’il s’agissait d’être compréhensible par le plus grand nombre, patatra, c’est le contraire qui se produit. On passe de l’original et de l’inédit, au très commun que l’on oublie très vite.

Reste alors et quand même un bon film fantastique. Plus important et marquant qu’il n’y paraît. Pas assez connu et reconnu aussi ; une remarquable interprétation de Vincent Price et tout un paquet de bonnes idées basées sur l’optimisation de l’absence de moyens financiers importants en prime.
Les décors (extérieurs), sobres et ascétiques, sont utilisés avec une rare intelligence, la caméra cadre justement et le pouvoir de la lumière (et donc des zones d’ombres) ressort dans de nombreuses prises de vues centrées sur des bâtiments architecturalement originaux.

« The Last Man on Earth » mérite le visionnage et la conservation dans toute bonne vidéothèque contemporaine. Il s’agit d’une bonne série B made in 1964 qui n’a pas encore accédé au statut de film culte mais le mériterait sans problème. Et rien que pour cette première heure, originale et très riche, on peut certifier qu’il s’agit de cinéma et plutôt du bon.

Remakes : « Le Survivant - The Omega Man » (1971), « I Am a Legend - Je suis une Légende » (2007)

FICHE TECHNIQUE
Titre original : The Last Man on Earth-L’Ultimo Uomo della Terra (Le Dernier Homme sur la Terre).
Réalisation : Ubaldo B. Ragona, Sidney Salkcow
Scénario : Furio M. Monetti, Logan Swanson (Richard Matheson), Ubaldo B. Ragona
D’après le roman « Je suis une Légende » de : Richard Matheson
Adapté par : Richard Matheson & William F. Leicester

Producteur : Robert L. Lippert
Producteurs exécutifs : Samuel Z. Arkoff

Musique : Paul Sawtell, Bert Shefter
Photographie : Franco Delli Colli
Son : Enzo Silvestri, Armando Timpani, Bruno Zanoli
Décors : Brunello Serena Ulloa
Costumes : Angiolina Menichelli (Lilly Menichelli)
Maquillages : Piero Mecacci
Montage : Gene Ruggiero, Franca Silvi

Production : American International Television (USA)


Stéphane Pons
31 juillet 2007



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