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Cité Nymphale (La)
Stéphane Beauverger
La Trilogie du Chromozone, T.3, roman (France), SF, 285 pages, La Volte, 18€

Cendre, l’arme anti-Noctivores, est devenu le petit messie de la Parispapauté.
La cité de Brest tente de survivre au milieu du chaos.
Un tueur de la faction Orange va tenter de remplir sa dernière mission.
Les Noctivores ont quelques idées bien précises derrière la tête mais personne ne sait lesquelles...
Etc.

Et puis, tout ce bordel, c’est la faute à qui ? Hein, à qui ?




En tant qu’ardent défenseur de cette trilogie, j’ai pris mon temps (ça, on peut le dire ! NDLR). Une histoire de digestion, une envie précise de voir apparaître -ou pas- les séquelles mémorielles laissées par Stéphane Beauverger et sa conclusion du cycle du « Chromozone ».

Après un premier volume acéré (« Chromozone »), un deuxième plein de bruit et de fureur (« Les Noctivores »), nous voici donc parvenu au bout du bout : « La Cité Nymphale ».
Terminus, tout le monde descend, no future au programme !

Parce qu’après tout, il ne s’agit que de ça. À trop déconner, l’homme a réussi à tout faire exploser-imploser.
Certes, il subsiste encore quelques îlots de résistance, mais la nouvelle espèce, les Noctivores, va tout submerger. Et je ne sais pourquoi, se fixe en moi l’image de ces colonies de fourmis évoluées, décrites par C. D. Simak dans « Demain les chiens », qui finissent par même dégoutter -et chasser de la planète- les canidés.
Mais à contrario d’un Simak qui laisse toujours une porte ouverte sur l’espoir, chez Stéphane Beauverger, d’espoir, il n’y en a plus depuis longtemps. Il faudra se débrouiller avec la rage et la volonté d’exister à tout prix, jusqu’à l’épuisement et au renoncement inéluctable.

Nous l’avions déjà dit, alors que « Chromozone » semblait construit sur des phéromones très testostéronées et masculines, « Les Noctivores » donnait la primauté aux personnages féminins. Point de tout cela dans « La Cité Nymphale », les deux premiers opus n’étaient que le prélude à un enfantement mortel ; un enterrement de première classe pour une humanité au bout du rouleau. Car la ville chrysalide des Noctivores que l’on aperçoit fugitivement, signe l’émergence d’une entité forcément inhumaine. Et c’est sans doute là qu’une partie du lectorat découvrant Stéphane Beauverger avec ce dernier volume risque de s’étonner.
La fin n’est pas le happy end que certains souhaitaient, et alors ? Faudra bien fermer le bouquin en imaginant quelques noires réponses (évidentes) et se dire qu’on ne pouvait point se saluer autrement. “This is the end, my old friend. The end...”

Peu importe, après tout, qu’une formidable bataille dope le récit, il faudra chercher la vérité derrière le rideau de fumée dressé par le romancier et ses marionnettes combattantes. Autant, les deux premiers volumes pouvaient être pris au premier degré, autant cette conclusion est à lire entre les lignes. Les personnages, les événements ne sont plus que des pions animés par un destin qui dépasse la petite race humaine (ou ce qu’il en reste). Mourir, être transformé de gré ou de force, se shooter avec toutes les substances vénéneuses disponibles, attendre le déluge les doigts de pieds en éventail, faudra pas chercher plus loin.
De rédemption, il n’y en a point. Heureux, qui comme Ulysse fit un beau voyage et s’en revint dans un pays en ruine (en résumé).

Pas marrant, me direz-vous. Et oui, mais pas déséspérant non plus. Logique, totalement logique. À force de jouer avec le feu, l’humanité s’est consummée, carbonisée, dans le bûcher des vanités qu’elle avait allumé. Évidemment, c’est ici qu’un niveau de lecture contemporain est censé titiller le lecteur et le faire réfléchir sur ce qu’il vit actuellement...

La trilogie du « Chromozone » ne serait-elle finalement pas qu’une chronique alternative, et pourquoi pas quasi contemplative, d’une dégringolade en cours ? Un “vous qui naissez ici et maintenant, perdez tout espoir !”

Avoir choisi Hint comme illustration sonore dans un CD bonus, ne fait que confirmer le propos. Sous des accents métalliques et synthétiques évidents, on en appelle souvent aux cadavres exquis du King Crimson et de Pinhas-Heldon. Musicalement, ça flingue dans les coins, l’artillerie lourde est de sortie et on ne mourra pas en silence. Échos de percussions tribales, mix carbonisés de mélodies « world », le CD est un vrai régal pour les oreilles qui fait instantannément ressurgir les mots de la trilogie du Chromozone.

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Hint, groupe angevin dont il faut se souvenir à travers une discographie à redécouvrir.


Idem pour le travail d’illustration, beaucoup plus concret et réaliste qu’auparavant. Cris et hurlements graphiques de Corinne Billon au service d’une trilogie qui chuchote sa détresse dans un relatif silence critique.

Ici ou là, on stigmatise la légéreté stylistique de quelques dialogues, l’outrance du propos ou de quelques scènes. Et l’humour, qu’en fait-on ? Une évidence saute aux yeux du lecteur, l’écrivain en rajoute volontairement, histoire de forcer le trait et de pousser au bidonnage et à l’humour noir. Faute d’espoir, autant se marrer. Stéphane Beauverger l’a bien compris. Quand tout est perdu, le rire d’un clown triste, seul subsiste...

On l’a dit, redit, crié, sussuré, les trois volumes du cycle du « Chromozone » parfaitement édités par La Volte, sont une des très belles réussites de la SF Française.
Une vision cauchemardesque et concrête, bâtie sur un imaginaire personnel, nourrit aux mamelles d’un véritable écrivain qui n’hésite pas à faire tomber les masques et à se dévoiler.

Faites ce que vous voulez, mais ne passez pas à côté !

Titre : La Cité Nymphale
Série : Chromozone
Précédents volumes : « Chromozone » (T.1) et « Les Noctivores » (T.2), paragraphe inédit.
Auteur : Stéphane Beauverger
Illustratrice : Corinne Billon (couverture et illustrations intérieures)
Musique : CD du groupe « Hint »
Conception graphique : Stéphanie Aparicia
Éditeur : La Volte
Collection : SF
Site Internet : Chromozone
Pages : 285
Dépôt légal : 9 novembre 2006
ISBN : 978-2952221771
Prix : 18€ (avec le CD du groupe Hint).

© Illustrations, couvertures, textes : Corinne Billon, La Volte, Stéphane Beauverger (2006).

Stéphane Beauverger sur la Yozone

Critiques
Alors là pardon, moi j’dis chapeau ! Ça c’est champion ! (La Volte - Délices et Daubes n°151 (Henri Bademoude)

Chromozone (La Volte)
Chromozone (Folio SF)
Les Noctivores (La Volte)
Les Noctivores (Folio SF)
La Cité Nymphale (La Volte)

Infos
Stéphane Beauverger (vidéo 2006)
Avis de Publication Trilogie chez Folio SF
Interview Yo-Utopiales de Stéphane Beauverger
Stéphane Beauverger sur France Culture-“Mauvais Genre”
Le Déchronologue de Stéphane Beauverger


Stéphane Pons
19 octobre 2007


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Troisième et dernier volume d’une trilogie SF de Stéphane Beauverger à lire absolument.



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Chromozone (T1, La Volte).



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Les Nocivores (T2, La Volte).



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Stéphane Beauverger par Corinne Billon.



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Corinne Billon (autoportrait).



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Et un CD tonitruant du groupe Hint en prime !



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