Après sa « Trilogie 93 » dont le succès lui a permis de se mettre en disponibilité de son poste de capitaine de la PJ, Olivier Norek enfonçait le clou avec un thriller socialement très engagé, montrant sans le moindre fard la réalité des migrants sur le sol français, qui essaient de rejoindre l’Angleterre.
À son Victor Coste trop humain pour ce job, succèdent deux personnages confrontés à l’enfer. L’auteur, documentant là encore fortement sa fiction, nous plonge dans ce drame humain qui n’a hélas pas cessé avec le démantèlement de la Jungle en 2016, repoussant juste le problème plus loin des yeux et des caméras des grandes chaînes.
Nouveau venu à Calais, Bastien veut comprendre. Accompagnant la brigade dédiée, il participe à une intervention de nuit « classique » : d’un côté les passeurs font mine de s’en prendre à un camion, cela crée un bouchon qui favorise la dissimulation des migrants dans les autres poids lourds à l’arrêt. Le jeune officier apprend les lois absurdes, les amendes qu’on fait peser sur les chauffeurs ou les particuliers, faute d’arriver à quelque chose au niveau de l’État. Il découvre cette poche de non-droit qu’est Calais, et le tour de passe-passe administratif : jamais d’arrestations, pour ne pas faire rentrer ces gens dans la machine administrative qui serait alors obligée de les reconnaître comme migrants, réfugiés, humains...
Dans le camp, Adam s’accroche à l’espoir de retrouver les siens. Il est accueilli par Ousmane, le chef de la partie « calme » du camp, qui le présente aux bénévoles de la Croix-Rouge... et le met en garde contre les passeurs afghans, qui détiennent le monopole pour la traversée. Une nuit, Adam sauve un jeune garçon, Kilani, d’un viol collectif. Le gamin est muet, la langue arrachée depuis longtemps, un passé en Afrique qu’on devine à peine, que l’auteur nous dévoilera finalement : enfant-soldat, contraint à la violence pour ne pas la subir à son tour. Des aléas, la mort partout, jusqu’à être recueilli par une mère qui lui donne l’espoir de l’Angleterre.
Alors que l’on sait qu’Adam ne retrouvera jamais les siens, on s’accroche à son espoir, tout comme on s’accroche à Bastien qui enrage du rôle dans lequel la police calaisienne est confinée. Et comme eux tous, on espère une fin heureuse pour Kilani, une traversée réussie à laquelle tous participent.
Et par l’efficacité d’un scénario très bien ficelé, dont je tairai les détails ici, la destinée de tous converge jusqu’à ce point de bascule où toutes les certitudes sont bousculées, où les valeurs de chacun peuvent s’effondrer, où le mensonge, le silence ou l’incompréhension peuvent causer de profonds ravages.
Olivier Norek conclut tout de même sur une note d’espoir, un rayon de lune au milieu de ces nuits de peur, de lacrymo et de flammes, laissant voir qu’il y a du bon en l’Homme malgré toutes les horreurs dont certains sont témoins et d’autres, acteurs.
Très bien documenté, didactique juste ce qu’il faut pour bien comprendre l’horreur qu’on a sous les yeux, et romancé d’autant pour nous reconnaître dans les situations des personnages, « Entre deux mondes » est un thriller aussi noir que poignant, qui pose assez de questions dérangeantes pour rester, après sa lecture, toujours gravé dans notre mémoire.
Titre : Entre deux mondes
Auteur : Olivier Norek
Grand format
Couverture :
Éditeur : Michel Lafon
Collection : Polars/thrillers
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages :
Format (en cm) : 22,5 x 14 x 2,5
Dépôt légal : octobre 2017
ISBN : 9782749932262
Prix : 19,95 €
Poche :
Couverture :
Éditeur : Pocket
Collection : Polars/thrillers
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 384
Format (en cm) : 18 x 11 x 2,5
Dépôt légal : mars 2020
ISBN : 9782266286381
Prix :8,30 €