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Extraterrestres, ce que dit la science
Adam Frank
Dunod, essai, sciences, 308 pages, août 2024, 21,90€

Dans ses thématiques, cet ouvrage n’est pas sans faire écho à « Rencontrer la vie ailleurs avec Alien » d’Arnaud Cassan. Des concepts développés sont communs et certaines parties ne constitueront pas forcément de grandes découvertes pour les lecteurs. Là où Arnaud Cassan partait de scènes du film « Alien » pour développer certaines connaissances, Adam Frank fait un bilan de la recherche concernant les extraterrestres, du moins de la vie ailleurs. Cet ouvrage est aussi bien plus long que le précédent, permettant ainsi de mieux explorer les différents points.



Adam Frank est astrophysicien et professeur à l’université de Rochester aux États-Unis. Il est récipiendaire de la médaille Carl Sagan, chercheur principal du premier projet subventionné par la Nasa consacré à la recherche de technosignatures, c’est-à-dire les signes de civilisations avancées sur d’autres mondes, autant dire qu’il se situe au cœur de cette question qui hante les gens depuis bien longtemps.

Pourquoi un tel silence ? Où sont-ils donc ? Au cours des années 1950, le physicien Enrico Fermi a posé ces questions, s’étonnant de ne pas voir d’extraterrestres au coin de la rue. En partant de l’âge de l’univers, de la taille de la voie lactée, en imaginant des vaisseaux progressant à quelques pourcents de la vitesse de la lumière, voilà déjà bien longtemps qu’ils auraient dû atteindre la Terre. Pourtant il n’en est rien...
En 1961, en charge d’un séminaire sur les civilisations extraterrestres, le radioastronome Frank Drake a écrit une célèbre formule permettant d’en estimer le nombre. Elle est concise, simple, toute la difficulté réside dans l’évaluation de ses différents facteurs. Et puis, à l’époque les moyens d’observation ne permettaient pas de voir une planète hors de notre système solaire. En existe-t-il seulement ? Il a fallu bien des avancées technologiques pour qu’enfin, on puisse en détecter au XXIe siècle, soit bien plus tard.

La recherche de civilisations extraterrestres a toujours souffert de l’image déplorable des OVNIs (Objet Volant Non Identifié) vus à tour de bras aux États-Unis dans les années 1950-1960 en pleine guerre froide. Le 24 juin 1947, le pilote amateur Kenneth Arnold voit neuf objets volant en formation. Il fait part de cet étrange phénomène et ses propos sont déformés par la presse jusqu’à donner naissance aux soucoupes volantes, alors que les objets n’y ressemblaient pas. Cette déformation a influencé tous les observateurs de phénomènes inexpliqués par après. Un peu après, la famille Brazel trouve de drôles de débris sur son terrain à Roswell. L’explication des autorités ne fait qu’empirer les choses. Le secret couvait en ces temps, on cherchait à cacher des expériences, on s’interrogeait sur les avancées soviétiques, et cela alimentait la suspicion. Résultat : donner une explication rationnelle à une observation d’OVNI revenait à faire croire que l’on cachait la vérité au peuple. Rien de mieux pour décrédibiliser la recherche sérieuse en la matière. De plus, les Pulps aux couvertures inventives en rajoutaient une couche. Pendant bien des décennies, ce secteur a souffert de cette image négative, peu sérieuse et les crédits en ont souffert. Maintenant il n’est plus question d’OVNI, mais de PAN (Phénomène Aérien Non identifié). Un changement de sémantique pour montrer le changement d’approche. Chaque signalement doit faire l’objet d’une étude rigoureuse avec toutes les données à disposition.

« Extraterrestres, ce que dit la science » ne fait pas que dans le sensationnalisme à travers l’histoire de la discipline, mais elle explique les difficultés pour elle d’exister, d’avoir les moyens d’avancer dans la connaissance. SETI a été le programme précurseur, mais avec des moyens dérisoires et revenant à observer un point précis de l’espace. Les scientifiques n’en ont pas moins fait preuve d’imagination, mettant en place des modèles de détection, se demandant ce qu’il fallait observer pour en conclure possiblement en un signal extraterrestre. La recherche dans ce domaine a avancé doucement faute de moyens, mais ses acteurs n’ont jamais baissé les bras face à l’adversité. Les progrès scientifiques ont ouvert de nouveaux horizons avec notamment les télescopes spatiaux. Une flopée de planètes a été détectée, certaines dans ce qui est considéré comme la zone habitable autour de leur soleil (les exoplanètes), ce qui permet d’affiner un terme de l’équation de Drake.
Adam Frank fait appel à nombre de concepts dans cet ouvrage, il parle aussi bien de moyens de voyager dans l’espace que d’artefacts tels que les sphères de Dyson, des conditions favorables pour la naissance de la vie (présence d’eau notamment) que des formes qu’elle peut avoir. Les approches sont riches, bien développées pour être compréhensibles. Il est très intéressant de lire tous les moyens imaginés pour tenter de détecter si une planète abrite une civilisation technologique (technosignatures) et ce, rien qu’en observant son passage devant son soleil. C’est vraiment impressionnant.
Les regards envers la recherche de civilisations extraterrestres ont changé et depuis 2019, la Nasa finance même un programme dont Adam Frank est justement en charge. La recherche de l’autre fascine à présent, notamment pour répondre à cette question existentielle : sommes-nous seuls ?
En résolvant l’équation de Drake en tenant compte des connaissances actuelles et en partant de l’hypothèse que nous sommes les seuls, Adam Frank montre que cette possibilité est vraiment infinitésimale. Retour au paradoxe de Fermi : où sont-ils ? La science n’a pas fini de progresser pour tenter de répondre à cette question, peut-être sans réponse.

« Extraterrestres, ce que dit la science » se révèle un ouvrage passionnant, sérieux sur un domaine longtemps tourné en dérision, la faute aux croyances populaires, au sceau du secret, à une littérature trop imaginative. Adam Frank, un ponte en la matière, revient sur l’histoire de la recherche de civilisations extraterrestres, son évolution au fil des décennies avec les progrès de la science qui ont vraiment fait bouger les frontières. L’acronyme OVNI a encore de beaux jours devant lui, car même lui, l’utilise davantage que PAN qui est moins immédiat, moins intuitif.
Pour en apprendre plus sur le sujet, sans sensationnalisme mais sous le regard rigoureux de la science, la lecture de cet ouvrage est tout indiquée, tout comme celle, sur le même sujet, de l’essai de la scientifique française Nathalie Cabrol « À l’aube de nouveaux horizons ».


Titre : Extraterrestres, ce que dit la science
Auteur : Adam Frank
Couverture : Florie Bauduin
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Charles Frankel
Éditeur : Dunod
Site Internet : Essai (site éditeur)
Pages : 308
Format (en cm) : 14 x 20,5
Dépôt légal : août 2024
ISBN : 9782100857708
Prix : 21,90 €


Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
5 octobre 2024


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