Série dérivée de la saga d’“Arkeod”, créée et développée par Nicolas Mitric, La Voie du Silence : Morne Crépuscule est un album étonnant, exhalant des parfums guerriers et sanguinaires.
Si comme moi, votre culture BD contemporaine est un peu allégée ou aléatoire, vous allez sûrement vous demander si la lecture de Morne Crépuscule , tome 2 de « La Voie du Silence », nécessite la découverte préalable de la saga d’« Arkeod » dont elle est dérivée (spin off en bon Français !). Et bien, rassurez-vous, on peut très bien tomber directement dedans et y prendre un grand plaisir.
Le phénomène est assez surprenant car l’œil averti repère avant tout ce qu’il pense être des défauts : graphisme des personnages un peu perturbant, se jouant souvent des conventions graphiques établies, visages aux traits exagérés, scénario métaphysico-japonais un rien secoué et violent.
Et pourtant, au bout de trois pages, on s’immerge totalement dans l’histoire, s’attachant à des personnages dont on perçoit vraiment la complexité entre les cases. En tout cas, beaucoup plus qu’à travers ce qui est explicitement dit ou vu via les dialogues ou les dessins.
En résumé, voici les aventures d’une bande de samouraïs, drivés par un senseï plus vrai que nature, sur une Terre ravagée par un cataclysme dont l’origine reste brumeuse (accident technologique, invasion alien, guerre planétaire ?).
La narration se concentre autour de Scalp, jeune homme torturé par son passé, mais qui n’ignore pas non plus ses compagnons d’infortunes sanglantes (et du sang, il y en a pas mal !). Toutefois, l’intrigue ne s’attarde pas trop sur la psychologie des uns ou des autres.
Si l’errance de la petite troupe à travers un monde dévasté est plutôt de bonne tenue, c’est surtout la partie consacrée au mythe des samouraïs qui passionne et fait preuve d’une belle inventivité. L’absence de pitié dégagée par la petite bande, cette énergie noire et dévastatrice livre les clefs d’une conclusion qui évoque justement la ligne inspiratrice du « Elric » de Moorcock.
On pourrait reprocher au tamden Mitric (scénario) - Grey (dessins) une simplification graphique des visages et des corps, un allègement sentimental un peu primaire des personnages ou une surabondance de scènes hyperviolentes.
Certes, ces arguments ne sont pas sans fondements. Pourtant, l’histoire m’a paru d’une grande clarté, créant une identification certaine du lecteur avec les destinées, souvent fatales, proposées. Et puis, le contexte global de la narration est au post-apocalyptique et donc, par essence, aux sentiments bruts de fonderie !
Bref, sans trop savoir pourquoi, j’ai été assez scotché par cet album, ce Morne Crépuscule (superbe couverture) m’incitant à me procurer le premier volet (Aube Ardente) illico presto.
Une BD coup de poing, perturbante, passionnante, et qui exhale un parfum d’ailleurs saisissant. Une pulsation triste et vitale s’échappe de ce très bon “survival”.
Parfois, on ne s’explique pas tout et on s’en fout largement quand l’ivresse est là ! Concours de circonstances, hasards de lectures (le bon album au bon moment ?), la magie opère et on n’en demande pas plus !
Morne Crépuscule (T2)
Tome 1 : Aube Ardente
Série : La Voie du Silence
Univers : Arkeod
Scénario : Nicolas Mitric
Dessin : Grey
Couleurs : Alexe
Éditeur : Soleil, la suprême connexion
Conception et réalisation graphique : Studios Soleil
Page Internet BD : Morne Crépuscule - Site Soleil
Pagination : 48
Format : 23,4 x 1 x 32,3 cm (cartonné)
Dépôt légal : 27 septembre 2006
ISBN : 2-84946-380-9
EAN : 9 782849 463802
Prix public : 12,90 €
Droits photos et illustrations © Éditions Soleil - Mitric et Grey (2006)