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YOZONE
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Entretien avec Loïc Vaiarello
Illustrateur de « Aurignac »
24 octobre 2022

Loïc Vaiarello est illustrateur/graphiste et aime explorer des univers variés, métissant réel, fantastique et onirique.
Les éditions Oka Luda lui ont proposé de faire voyager les joueurs dans le passé lointain des hommes. Défi que l’artiste a relevé avec brio dans « Aurignac ».
Il a accordé un entretien à la Yozone pour nous révéler les coulisses de son parcours et de son travail.



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« Aurignac » est votre 3ᵉ jeu illustré publié. Mais comment êtes-vous arrivé dans le monde du jeu de société ?

Ce fut après mon premier salon du jeu à Cannes. Rêvant depuis mon plus jeune âge d’illustrer un jeu, j’ai pris mon courage à deux mains, et arpenté les couloirs à la rencontre de tous les éditeurs du salon, en espérant que mon travail puisse les intéresser. Ce fût très enrichissant de pouvoir avoir un retour de mon niveau, 2 ans après avoir quitté l’école. Les critiques furent pour la plupart difficiles à encaisser, mais extrêmement constructives et nécessaires pour avancer.
Après ce premier salon, j’ai pu illustrer 2 jeux de sociétés pour les éditions 2 Tomatoes games, avec qui j’ai réalisé « Escape pods » et « Petris ».

Quel est votre parcours ?

Pendant ma formation de 4 ans à l’école Axe Sud (aujourd’hui école de Condé), dans une section BD/illustration, j’ai appris en autodidacte le graphisme pour pouvoir intégrer plus facilement mon travail sur différents supports.
Après l’école, j’ai fait un stage de 6 mois dans une startup de jeux et applications mobiles en tant que graphiste 2D. Je m’occupais de la partie graphisme, illustration et UI design (conception de l’interface utilisateur pour une application, un logiciel ou tout dispositif digital, NDLR) de la boîte. Au fur et à mesure du stage, je me suis rendu compte que ce qui me faisait vraiment vibrer, c’était l’illustration pure.
Après avoir essuyé de nombreux échecs pour travailler dans diverses sociétés, je me suis lancé à mon compte, et ai continué à apprendre le graphisme, l’animation et l’illustration.
J’ai par la suite été pris sous l’aile d’un graphiste partant à la retraite, qui m’a réellement mis le pied à l’étrier pour le graphisme. Mais l’illustration restait ce qui me passionnait le plus. Je me suis donc entrainé sans cesse sur mon temps libre jusqu’au salon du jeu à Cannes.

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« Escape Pods » - © Loïc Vaiarello & 2Tomatoes Games

Comment avez-vous effectué vos recherches pour « Aurignac » ?

Loïc Lamy et l’un des éditeurs de Oka Luda, m’ont énormément guidé au début avec des images de documentations et des parties d’aspect plus technique sur la préhistoire.
Loïc Lamy étant en contact avec le musée de l’Aurignacien, spécialisé sur la préhistoire, cela nous a énormément aidés à être au plus proche de la réalité.
Par la suite, j’ai utilisé divers sites de documentations visuels pour compléter mes banques d’images (allant de la peinture rupestre à l’apparence d’animaux préhistoriques), pour me permettre de dessiner au mieux chaque partie du jeu.
L’éditeur souhaitait également avoir une sensation de survie et de difficulté de la vie à cette époque.
Ce qui m’a aidé à me plonger dans cet état d’esprit, c’est un jeu vidéo de survie à cette époque (« Farcry Primal »). Même si beaucoup d’aspects de ce jeu étaient loin de la réalité, ce qui m’intéressait particulièrement, c’était de comprendre la sensation d’insécurité et de mort imminente à tout moment.

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« Aurignac » - © Loïc Vaiarello & Oka Luda

La préhistoire était-elle une période qui vous intéressait déjà avant l’illustration du jeu ?

Non, je ne m’y étais pas plus intéressé que ça à l’époque. Je prends plaisir à écouter des documentaires en travaillant, donc j’ai pu découvrir des choses vraiment intéressantes sur cette période avant le projet, mais je n’avais jamais vraiment creusé le sujet.

Quelles techniques graphiques avez-vous utilisées pour « Aurignac » ?

J’ai réalisé des croquis sur papier, d’autres en numériques, et je les ai approfondis sur Ordinateur.
Mes années d’études en arts appliqués au lycée m’ont appris à m’intéresser aux jeux de textures. Cela m’a grandement aidé dans toute la recherche graphique.

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« Aurignac » - © Loïc Vaiarello & Oka Luda

Quelles sont les différences de travail entre les recherches des illustrations et celles des icônes ? Est-ce plus facile pour vous qui êtes graphiste-illustrateur ?

Oui, le fait d’avoir choisi d’améliorer mes compétences en graphisme rendent les choses beaucoup plus simples. À l’école, on nous avait déjà appris à penser l’illustration et l’espace pour placer le graphisme autour. Mais pas forcément à penser le graphisme nous-mêmes. L’un ne va pas sans l’autre. Développer davantage ces compétences m’a appris à pouvoir penser plus efficacement le tout. Augmenter ma capacité à synthétiser des formes (pour les iconographies par exemple), tout en conservant un maximum de compréhension.
La différence primordiale entre les deux concerne le style choisi. Trouver l’équilibre, pour garder en lisibilité, sans sortir de l’univers du jeu.
La maison d’édition a par la suite repris une partie de l’infographie, pour pouvoir l’adapter aux contraintes de productions, ainsi qu’aux retours qu’ils ont eus des joueurs. C’était un travail d’équipe sur ce jeu.

Comment avez-vous travaillé avec l’auteur Loïc Lamy ?

Par échanges de messages et de mails principalement.
Nous avions également un espace pour échanger des images et les règles du jeu.
Si jamais j’avais une question technique, c’est Loïc qui m’aidait. Si j’avais une question graphique, c’est plus l’éditeur qui intervenait.

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« Aurignac » - © Loïc Vaiarello & Oka Luda

Avez-vous joué au jeu avant de l’illustrer ? Est-ce ce qui vous a donné envie de l’illustrer ?

Oui, je joue toujours aux jeux avant de les illustrer. Pour penser un jeu de A à Z graphiquement, il faut impérativement comprendre son univers et son gameplay.
Cela m’a en effet donné envie de l’illustrer. Apprendre de nouvelles choses est ce qui rend ce métier passionnant. À chaque illustration ou infographie, j’en apprenais un peu plus sur cette période fascinante.

Comment s’est déroulé le travail graphique avec les éditions Oka Luda ?

Ça s’est très bien passé. Déjà, c’est tout bête, mais le fait que l’on vous choisisse pour le style qui vous correspond, c’est un véritable atout.
Ensuite, avoir carte blanche au début pour proposer des pistes, et les affiner au fur et à mesure avec l’éditeur, cela permet de ne pas être bridé aux prémices du processus de création.
La partie infographique a été plus complexe, due aux problèmes de fabrication que rencontrent les éditeurs dans le contexte actuel. Mais nous avons réussi à nous comprendre et à nous accorder.

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« Aurignac » - © Loïc Vaiarello & Oka Luda

Quelles techniques graphiques utilisez-vous ? Comment traitez-vous la couleur ?

Le style graphique vers lequel je souhaite de plus en plus tendre est assez pictural. Poser des coups de pinceaux plus ou moins dynamiques de part et d’autre me plaît énormément.
Pour la couleur, mes choix se font en fonction des ambiances que je décide de réaliser.
Pour le plateau commun, l’idée d’immensité devait prédominer. J’ai donc volontairement bleui les extrémités, pour renforcer la sensation de perspective atmosphérique.
Pour le plateau Néandertal et Mère Nature, les couleurs sont là encore bleuies, mais davantage pour faire ressentir la morsure du froid de cette époque.
Enfin, pour Sapiens, les couleurs se voulaient plus chaleureuses, pour souligner le côté rituel, en hommage aux merveilles de la nature.

Quelles sont vos techniques de travail ? Avez-vous des routines ?

Je divise toujours mon travail en plusieurs parties.
Dans la première, je passe énormément de temps sur la documentation et la compréhension de l’univers. Ensuite, je commence à réfléchir au placement des différentes infographies. Puis, je montre des croquis noir et blanc et couleur à l’éditeur, et enfin, je passe à la réalisation.
J’aime bien m’octroyer des pauses entre chaque réalisation afin de prendre du recul, et d’avoir un œil neuf dessus. Cela me permet de corriger les erreurs éventuelles que je n’aurais pas vues plus tôt.

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© Loïc Vaiarello

Quelles sont vos influences venant du jeu, du cinéma, des livres, de la BD, la peinture... ?

Dans mes études, on nous a appris que toute inspiration est bonne à prendre. J’ai choisi de pouvoir m’adapter à de nombreux styles en fonction de la demande. Mes deux premiers jeux illustrés ont des styles très différents d’« Aurignac ».
Je ne me limite pas au niveau des types d’influences. Cela peut aller du design d’objet, à de l’architecture, en passant évidemment par de la bande dessinée et de l’animation.
Malgré tout, ce qui m’a toujours plu, ce sont les œuvres dynamiques et riches en couleurs. Le travail du peintre Rob Rey, ou d’ambiances et de détails riches de la bande dessinée « Blacksad » (de Juan Díaz Canales et Juanjo Guarnido) sont de véritables inspirations.

Quels conseils pourriez-vous donner à un.e apprenti.e illustrateur.trice de jeux ?

Le plus gros conseil que je pourrais donner est de toujours accepter la critique, d’où qu’elle vienne. C’est ce qui nous permet de prendre du recul sur notre travail et de progresser plus rapidement. Il ne faut pas hésiter à faire des tests sur ce qu’on nous propose, pour améliorer une image. Même si l’idée ne nous paraît pas bonne à la base, on peut être surpris. C’est l’avantage avec la création sur ordinateur. On peut faire les tests, sans perdre notre travail initial.
Le deuxième, et le plus dur, est de dessiner même pendant son temps libre. De revoir ses bases sur la couleur, l’anatomie, la composition, etc.

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© Loïc Vaiarello

Avez-vous de futurs projets ?

J’adorerais travailler dans le monde du jeu vidéo. Mais l’illustration restera ma vocation première. Raconter mille histoires en une image est ce qui m’a toujours guidé.

Pouvez-vous conseiller 3 jeux à nos lecteurs ?

Je n’ai pas vraiment de jeux à conseiller. Cela ne correspond qu’à mes goûts personnels.
Ce que j’aime particulièrement, ce sont les jeux avec des gameplay très différents et très originaux.
Le premier que j’avais beaucoup apprécié, c’était « King of Tokyo ». Le fait de ne jouer qu’avec des dés, et des associations de faces, je ne connaissais pas à l’époque.
Pour l’atmosphère et la qualité des illustrations, « Mysterium » ou « Lueur » me plaisent énormément.
Pour le côté rejouablilité et jeux à plusieurs, tout en ayant des règles plutôt légères, des jeux comme « Carcassonne » et « Catan » sont des intemporels.
Mais il y a de nombreux jeux qui méritent d’être découverts, je ne me considère pas du tout assez objectif pour conseiller des jeux plus que d’autres.

Merci beaucoup pour vos réponses Loïc.


Liens utiles :
- le site officiel de Loïc Vaiarello
- le portfolio sur Art Station
- la page Facebook de Loïc Vaiarello
- le compte Instagram de Loïc Vaiarello

À lire sur la Yozone :
- « Aurignac », la chronique du jeu
- L’entretien avec Loïc Lamy, auteur d’« Aurignac »


Illustrations : © Loïc Vaiarello & Editeurs & Illustrateurs & D.R.


Michael Espinosa
Christelle Espinosa
7 novembre 2022



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© Rob Rey



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© Rob Rey



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© Juanjo Guarnido & Dargaud



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