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Flibustiers de la mer chimique (Les)
Marguerite Imbert
Albin Michel Imaginaire, roman (France), Science-Fiction, 456 pages, octobre 2022, 22,90€

Un avenir peu engageant : le niveau des eaux est monté, les mers sont devenues acides, grignotant les terres et des créatures gigantesques et féroces les peuplent, la population mondiale est décimée, seules des enclaves subsistent ça et là.
La plus connue est Rome assiégée par les flots et gouvernée par la Métareine qui subjugue ses sujets, leur laissant entrevoir la possibilité de dépasser leur condition.
D’un côté, elle a envoyé son naturaliste Ismaël mener à bien une mission et de l’autre, une équipe récupérer Alba, peut-être la dernière Graffeuse de la planète. Le premier est capturé par les flibustiers voguant à bord d’un sous-marin à travers les mers chimiques, pendant qu’Alba est ramenée à Rome.



Marguerite Imbert nous immerge dans un avenir peu réjouissant, plausible par bien des aspects avec les mers envahissant les terres. Le lecteur comprend qu’il y a eu une catastrophe, qu’elle a été sans pitié pour l’humanité réduite à peau de chagrin. L’auteure ménage longtemps le suspense sur son origine et l’explication ne manque d’élégance. Sparth, l’illustrateur de la couverture, a trouvé les tons justes avec ces teintes acidulées, car tout a viré au chimique et puis le récit pétille, part un peu dans tous les sens avec des personnages haut en couleurs. Si Ismaël s’avère sage, le capitaine des flibustiers Jonathan est un électron libre n’en faisant qu’à sa tête et instillant à bord du sous-marin de drôles de coutumes. Alba laisse aussi douter de ses capacités mentales. Il faut dire qu’elle vivait seule dans une grotte, la tête bourrée de données disparates et dessinant sur les parois pour conserver une trace visuelle de son savoir. D’une humeur très inconstante, elle peut exploser d’un instant à l’autre, parle souvent seule... Ces Graffeurs sont rares, ils font peur, mais ce sont des mines d’informations.
L’histoire oscille ainsi entre Ismaël et Alba, le premier sillonnant le monde et l’autre se retrouvant à Rome. Le déroulement est rythmé, plein d’inventivité au niveau des lieux (Rome au milieu des eaux, une île de plastique) et aussi du parler avec des jurons dans lesquels la mer prend la place d’un mot plus long commençant de la même façon, comme si elle était la source de tous les maux. Il est clair qu’elle est vénéneuse, ronge l’imprudent qui y tombe et abrite bien des monstres. L’évolution de la société est bien sûr aussi exploitée par Marguerite Imbert qui montre comment elle a changé, les tentatives romaines pour la redresser. Du dérisoire, du pathétique se dégage de ces descriptions, notamment lors de cérémonies aux accents transhumanistes, alors que la technologie a été perdue. Le sous-marin ultramoderne apparaît presque comme un anachronisme, le reflet du monde d’avant définitivement perdu.
Les personnages se débattent au milieu d’un jeu aux règles floues, changeantes sur un échiquier dénaturé. Le tableau est beau, triste mais enchanteur sous la plume fluide de Marguerite Imbert.

À travers les pérégrinations de quelques personnages pleins de vie, « Les flibustiers de la mer chimique » transporte les lecteurs dans un avenir peu réjouissant mais ô combien stimulant. L’imaginaire de Marguerite Imbert est bourré d’inventivité, il est pétillant, original et évite l’écueil du pathos, lui préférant le souffle de l’aventure.
Une entrée dans l’imaginaire remarquable !


Titre : Les flibustiers de la mer chimique
Auteur : Marguerite Imbert
Illustration de couverture : Sparth
Éditeur : Albin Michel
Collection : Albin Michel Imaginaire
Directeur de collection : Gilles Dumay
Sites Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 456
Format (en cm) : 14 x 20,5
Dépôt légal : octobre 2022
ISBN : 9782226468338
Prix : 22,90 €


Pour écrire à l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
25 septembre 2022


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