Dans la toute première, le narrateur Phil (Dick lui-même), se met en scène et retrace la période de sa vie où son ami, Nicholas Brady commence à lui faire part d’expériences étranges. Nicholas alors employé d’une maison de disques affirme recevoir des communications de plus en plus étonnantes de la part d’une entité qu’il nomme SIVA (Système Intelligent Vivant Agissant)ou Radio Libre Albemuth.
Schizophrénie, délires mégalomanes d’un personnage trop à l’étroit dans sa vie, ou contact réel entre un humain et une entité extraterrestre ? Le doute est permis, le narrateur se l’autorise, malgré une fascination évidente pour les récits de son meilleur copain.

Lorsque celui-ci, sous l’effet d’une vision quitte Berkeley avec femme et fils pour s’installer en Californie du sud, ce n’est plus un jeu.

Dans l’ambiance propice à la délation et à la terreur favorisée par le gouvernement tyrannique du président Ferris. F. Fremont, Nicholas, désormais directeur d’une importante maison de disques, voit se multiplier ses contacts avec ce SIVA qui, affirme-t-il, contribuera à la chute du pouvoir en place.

Inquiet pour Nicholas, Phil quitte Berkeley à son tour et constate que Brady a laissé une emprise totale sur sa vie à l’entité dont il se dit contrôlé. Mais après avoir été témoin de manifestations spectaculaires, Phil ne doute plus tant des dires de son ami et continue à élaborer avec lui des théories explicatives sur le phénomène. Convaincu parce qu’ayant vu, ou témoin parce que suffisamment convaincu ?

Rapidement, les autorités vont s’intéresser à Nicholas, à cause de son passé pacifiste et des possibilités de propagande subversive offertes par sa position professionnelle. De même, Phil, comme écrivain à la réputation douteuse, s’attire les regards des brigades civiles de Fremont.

Cette première partie présente un intérêt certain pour les amateurs de Dick. On y retrouve mention des anecdotes qui émaillent sa biographie, comme le cambriolage de son appartement, sa fascination pour les brunes aux yeux verts, les rumeurs sur sa toxicomanie. Lire ces récits de la main même de l’auteur peut avoir quelque chose d’émouvant pour le fan.

C’est dans la deuxième partie de l’ouvrage qu’on commence à s’arracher les cheveux.

Nicholas prend la parole et décrit avec force détails ses expériences paranormales et les spéculations auxquelles elles vont donner lieu de la part des deux compères.

Vision cosmique, cosmogonies orientales et (surtout) paraboles et prophéties de la tradition chrétienne se retrouvent mêlées dans un gloubiboulga des plus épais. Ce qui semblait à peu près logique ne cherche plus la vraisemblance, les événements succèdent aux événements de manière quasi-anarchique. On s’accroche où l’on peut, on se cramponne au fil du temps pour ne pas sombrer dans l’histoire abracadabrante autant que lugubre qui entraîne les deux personnages, leurs proches et le pauvre lecteur.

Ainsi, tant bien que mal, on retrouve Phil en narrateur de l’ultime partie d’un récit dont on se dit qu’il aurait dû rester inédit...

...Même si on l’a lu, jusqu’au bout. Comment faire autrement ? L’écriture reste prenante.

...Même si on s’est attaché à ces personnages un peu pitoyables et assez dingues, comme devait l’être l’auteur lui-même.

En somme, ce volume, loin d’être indispensable, est une pièce intéressante à mettre entre les mains de ceux qui se passionnent pour Dick l’homme, son œuvre et ses dernières années.

Les autres trouveront dans sa bibliographie, assez fournie, les romans qui lui ont assuré une place à part dans le paysage SF.

« Radio Libre Albemuth » reste donc une curiosité à réserver aux lecteurs avertis.

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Titre : Radio libre Albemuth : Prélude à la trilogie divine
Auteur : Philip K. Dick
Traducteur : Emmanuel Jouanne
Éditeur : Galimard
Collection : Folio SF
n° 237
Nombre de pages :378
Dépôt légal : 5 Janvier 2006
Format : Poche 11 x 2 x 18 cm, 200g
ISBN : 2070309517
EAN : 9782070309511
Prix : 6,40€