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Monde en 2040 vu par la CIA (Le)
National Intelligence Council
J’ai Lu, n° 13470, traduit de l’anglais (États-Unis), prospective, 317 pages, avril 2022, 8 €

« Le Monde en 2040 vu par la CIA et le Conseil National du Renseignement » est la traduction intégrale du rapport « Global Trends, A More Contested World » paru en 2021 et disponible en ligne en version originale. Un rapport rédigé par le National Intelligence Council, un panel d’experts chargés de rendre ce type de rapport toutes les quelques années. Les éditions J’ai Lu avaient déjà publié les moutures précédentes : « Le Monde en 2035 vu par la CIA » et « Le Monde en 2030 vu par la CIA ». Des tours d’horizon qui, comme tout essai de prédiction du futur, prendront sans doute une saveur particulière une fois ces dates atteintes, mais qui pour l’heure permettent de pointer raisonnablement du doigt des tendances dont nous ne sommes peut-être pas tous conscients, et, ce faisant, de nous avertir quant aux horreurs et aux prodiges que d’aucuns voient se dessiner à relativement court terme.



Est-il encore possible, dans un monde de plus en plus instable, et donc de moins en moins prévisible, d’affirmer quoi que ce soit à l’échelle d’une vingtaine d’années ? Seul le temps le dira, mais certains éléments de ce rapport écrit en 2021, qui expliquait que le retrait et le repli de l’Amérique trumpiste avaient permis l’affirmation des « États-carnivores », Turquie, Chine et Russie, n’auront pas été longs à être confirmés par une tragique actualité.

Pour le plus long terme, jusqu’en 2040, donc, ce rapport ne prétend pas lire l’avenir. Après une préface de Piotr Smolar, “ Le Fracas du monde qui vient“, les articles thématiques, basés sur les forces structurelles et les dynamiques émergentes, usent souvent du conditionnel, et l’avenir est lu à l’aune des tendances et des courants du présent, tendances et courants soit déjà ostensibles, soit encore souterrains. Érosion des démocraties mais aussi vulnérabilité croissante des régimes autoritaires, nouveaux défis de société, part croissante des opérateurs non étatiques, environnement géopolitique plus complexe et marqué par des tensions internationales, prolifération du nucléaire, migrations et changements climatiques, hyperconnectivité, bascule vers l’Asie, domination de pays par l’intelligence artificielle, contestation de l’ordre international et risques accrus de conflits interétatiques, mais aussi développement global des mécanismes de résilience et solutions scientifiques. Ce sont en définitive plusieurs grands panoramas potentiels possibles qui émergent. On lira avec intérêt ces panoramas de futurs effrayants ou optimistes : “La renaissances des démocraties”, “Un monde à la dérive”, “Coexistence compétitive”, “Des silos séparés”, “Tragédie et mobilisation”.

Enrichi de tableaux, de graphiques, de cartes et d’infographies diverses, ce « Monde en 2040 vu par la CIA » se lit aisément. Destiné à tous, mais surtout aux décideurs, rarement de formation scientifique, il a pour lui la clarté et la neutralité des rapports factuels et des hypothèses logiques. Il apporte sur l’état du monde un éclairage synthétique bienvenu, mais tire aussi de l’ombre des tendances encore peu visibles, pointe du doigt des éléments disparates qui une fois mis en lien dessinent des futurs possibles.

Reste qu’en développant une vision de l’avenir à partir de tendances – certaines déjà ostensibles, d’autres encore peu visibles, ce rapport se positionne dans une anticipation par la continuité. La méthode est rationnelle et prudente, mais rien ne dit que les évènements viendront sur le long terme confirmer ces tendances. Si les auteurs prennent en compte le caractère de plus en plus instable des équilibres et des sociétés, la théorie scientifique du chaos, qui dit que des changements mineurs peuvent à terme modifier complètement les équilibres, met en garde contre toute prévision à long terme. Et des changements plus radicaux pourraient advenir. « Le changement, c’est maintenant  » : un slogan politique qui fait à présent sourire, mais dont la prise en compte sous l’angle scientifique apparaît plus que jamais nécessaire. Un saut qualitatif, une avancée scientifique majeure peuvent bouleverser la donne. Il n’est pas impossible que survienne bien avant 2040 un changement plus rapide encore que les innovations disruptives dont nous sommes devenus coutumiers. L’essor des connaissances et applications quantiques en particulier pourrait, en mettant à la disposition des chercheurs des puissances de calcul il y a peu inconcevables, amener à des changements plus fondamentaux encore, ces changements que les lecteurs de littératures de genre connaissent sous le terme de singularité.


Titre : Le Monde en 2040 vu par la CIA (Global Trench : A More Contested World, 2041)
Auteur : National Intelligence Council
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Laurent Barucq
Couverture : Studio J’ai Lu / TechSolution/ Shutterstock
Éditeur : J’ai Lu (édition originale : édition des équateurs, 2021)
Site Internet : page roman (site éditeur)
Numéro : 13470
Pages : 317
Format (en cm) : 11,1 x 17,7
Dépôt légal : avril 2022
ISBN : 9782290364215
Prix : 8 €



Hilaire Alrune
19 mai 2022


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