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Ubik
Philip K. Dick
J’ai Lu, Nouveaux Millénaires, traduit de l’anglais (États-Unis), science-fiction, 254 pages, janvier 2022, 18 €

Depuis sa création en 2011, la collection Nouveaux Millénaires de chez J’ai Lu a publié en grand format plusieurs classiques déjà disponibles en édition de poche, comme « Des Fleurs pour Algernon » de Daniel Keyes, « La Guerre éternelle » de Joe Haldeman, « Un Bonheur insoutenable » d’Ira Levin, « Starship Troopers » de Robert Heinlein ou « Au Carrefour des étoiles » de Clifford D. Simak. Dans le registre des classiques, cette collection a déjà beaucoup republié Philip K. Dick (« Romans 1953-1959 », « Romans 1960-1963 », « Romans 1963-1964 », « Le Maître du Haut-Château », «  Blade Runner,  » Le Dieu venu du Centaure , « Coulez mes larmes, dit le policier ») et même les deux volumes encore inédits de « L’Éxègèse ». Il n’est donc pas étonnant, à l’occasion des 40 ans de la mort de Philip K. Dick, d’y voir apparaître une nouvelle traduction d’« Ubik ».



Nous ne ferons pas ici une énième chronique d’ « Ubik ». Nous n’en ferons ni critique, ni analyse, ni exégèse. Un tel roman, qui a marqué des générations de lecteurs, n’en a pas besoin. « Ubik  » a été pour beaucoup une lecture sismique, une tectonique mentale. Ludique, enlevé, vertigineux, « Ubik  » écaille la surface des choses, fissure les certitudes, fait sauter un à un les verrous du réel.

Enchâssement kaléidoscopique d’indices, de doutes, de preuves, de concepts, d’invalidations, de cartes sans cesse battues et rabattues, « Ubik  » n’apparaît pas comme un simple jeu où les dés seraient pipés, car, avec Philip K. Dick, c’est bel et bien le réel qui est truqué jusqu’à l’os. « Ubik  » dévoile non pas la réalité ultime, mais l’irréalité ultime. Le lecteur innocent n’a pas seulement l’étrange impression de rater une marche mentale, mais de rater marche après marche dans un escalier sans fin qui pourrait bien le mener au délire.

Fallait-il retraduire « Ubik  », qui s’est toujours révélé parfaitement efficace ? Dick n’a jamais été un grand styliste, et ses idées importent plus que la forme. Mais peut-être n’était-il pas inutile de le revoir avec un vocabulaire plus en adéquation avec le présent, la première traduction française remontant à 1970. À la manœuvre, Hélène Collon, spécialiste de l’auteur, déjà aux commandes du « Kalédickoscope », recueil d’essais sur Philip K. Dick, et qui a déjà fourni un travail important de retraduction de ses œuvres.

Pourquoi relire « Ubik  » ? “Parce qu’il devient meilleur à chaque lecture”, répond Etienne Barillier dans son « Petit guide à trimbaler de Philip K. Dick » (éditions ActuSF). ”Parce qu’il peut être lu de mille façons différentes”, explique Ariel Kyrou dans son volumineux « ABC Dick  ». Parce que, comme l’écrit sans sa postface Laurent Queyssi, “le texte possède quelque chose de plus, un facteur X qui le place parmi les chefs-d’œuvre du genre”. Parce que ce n’est pas si souvent, et jamais avec une telle maîtrise, ajouterions-nous, que l’on peut avoir l’impression de voir le réel secoué en même temps dans le tambour d’une lessiveuse industrielle et d’une centrifugeuse destinée à tester la résistance des futurs astronautes.

Alors, une petite balade, à vos risques et périls en compagnie de l’immortel Joe Chip ? Mais en reviendrez-vous réellement ?

On pourra se poser la question en rencontrant à travers « Ubik  » une phrase célèbre, « Je suis vivant et vous êtes morts  », qui a servi de titre à Emmanuel Carrère pour sa biographie de Dick. Après avoir tourné la dernière page d’« Ubik », le lecteur ne pourra sans doute pas s’empêcher de se demander à quel monde il appartient. Est-il vivant ? Est-il mort ? Bien malin qui saurait répondre, car, avec Philip K. Dick, le doute dépasse à la fois la réalité et la fiction. Mais une chose est certaine : pour ceux qui sont vivants ou qui croient l’être, il serait vraiment dommage de mourir avant d’avoir lu « Ubik  ». Et celui qui n’a pas lu « Ubik  » a manqué quelque chose de si énorme qu’il ne saurait être considéré comme réellement vivant.


Titre : Ubik (Ubik, 1969)
Auteur : Philip K. Dick
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Hélène Collon
Couverture : Studio J’ai Lu AkuMimpi d’après Shutterstock / LeoTryoanski
Éditeur : J’ai Lu (édition originale : Robert Laffont, 1970)
Collection : Nouveaux Millénaires
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 254
Format (en cm) : 13,4 x 19,9
Dépôt légal : janvier 2022
ISBN : 972290365458
Prix :18 €



Philip K. Dick sur la Yozone :

- « Au bout du labyrinthe »
- « Glissement de temps sur Mars »
- « Le Temps désarticulé »
- « L’œil dans le ciel »
- « Les Chaînes de l’avenir »
- « Docteur Futur »
- « Blade runner »
- « Les Joueurs de Titan »
- « Petit déjeuner au crépuscule »
- « La trilogie divine »
- « Phil, une vie de Philip K. Dick
- « Dick en cinq livres », par Étienne Barillier



Hilaire Alrune
23 février 2022


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