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L’humanité disparaîtra, bon débarras
Yves Paccalet
J’ai Lu, Collection Essai, n°8438, essai, 251 pages, mars 2021, 7,50 €

Une vision du monde, des dernières décennies et de celles qui nous attendent. Un tour d’horizon des cris d’alarmes qui n’ont jamais été entendus et des erreurs qui nous conduisent au pire. Le sort que nous réservons à nos enfants et à leurs enfants après eux.



En 2013, Yves Paccalet publiait aux éditions Flammarion un essai sarcastique et plus qu’alarmant intitulé « L’Humanité disparaîtra, bon débarras ». Les choses ne s’étant pas vraiment améliorées en près d’une décennie, c’est agrémenté du sous-titre « édition revue et aggravée  » que cet ouvrage revient au format de poche chez J’ai Lu. Et au rythme où vont les choses, l’humanité pourrait être suffisamment mal en point, si toutefois elle existe encore, pour que cet essai n’ait aucune chance de bénéficier d’une édition supplémentaire dans la troisième décennie de notre (peu) glorieux vingt-et-unième siècle.

Ancien bras droit du commandant Cousteau, Yves Paccalet connaît particulièrement bien notre planète. Sa position privilégiée d’observateur le qualifie pour en prendre le pouls. Le diagnostic fait peur. Le pronostic épouvante. Le certificat de décès pointe son nez. L’ode aux merveilles du monde qui partout transparait dans cet essai est aussi déjà son chant funéraire. Nous le savons depuis des décennies. Nous nous le masquons chaque jour.

Avec une acuité et un sens de la formule qui n’excluent pas l’autodérision (“s’il existait, le diable ne pourrait emporter de ma personne qu’une âme trouée comme une serpillière, et inintéressante à carboniser pour l’éternité”), Yves Paccalet inspecte, ausculte, écoute, et fait l’anamnèse. Le remède a toujours été là, mais nécessitait des décisions fermes et communes qui – la seule politique universelle étant celle de l’autruche – n’ont jamais été prises. D’où la tonalité profondément désabusée d’un ouvrage qui plutôt que de sombrer dans le désespoir surnage par la grâce d’une ironie grinçante. Il y a chez Yves Paccalet, naturaliste et philosophe, un peu de son confrère en philosophie Cioran – mais un Cioran dont le champ mental se serait encore élargi. Prolifération incontrôlable de l’humanité (un milliard de personnes en plus tous les trente ans, à un rythme qui ne fait qu’accélérer), gaspillage éhonté, pollution paroxystique, carnages et massacres, asservissements en tous genres, disparition accélérée de la faune, de la flore, des milles merveilles de ce monde – un carrousel qui n’en finit pas de tourner, et qui ne laisse nul espoir.

Constat sans appel d’échec, examen de l’état du monde et des perspectives à court terme, « L’Humanité disparaîtra, bon débarras  », apparaît également comme un examen de ces caractéristiques fondamentales de Humanité qui le conduisent à sa perte. Une humanité que l’auteur considère avec un œil de naturaliste, ou de clinicien, et qu’il observe avec un effarement plein d’ironie. Une humanité qu’il se garde bien de condamner – il n’en est nul besoin puisqu’elle s’affaire avec la plus grande et la plus grande énergie à tout faire pour se condamner elle-même.

Dans une dernière partie intitulée “Treize bonnes raisons pour une extinction” , Yves Paccalet esquisse quelques scénarii possibles. Les trois premiers sont indépendants de l’espèce humaine : météorite tueuse, nuage de poussières interstellaires, éruptions volcaniques cataclysmiques. Des scénarii que l’on pourrait considérer comme un moindre mal : au moins aurions-nous l’ultime satisfaction de périr sans que cela soit dû à notre bêtise. Hélas, les autres projections nous mettent toujours au tout premier plan : le destin de l’île de Pâques, les armes de destruction massive, la modification insensée des reliefs, la destruction des biotopes, la pollution universelle, les nouvelles épidémies, l’absence de maîtrise d’organismes génétiquement modifiés, la poursuite de l’érosion de la couche d’ozone, les dangers des nanoparticules, les dérèglements climatiques.

C’était de la science-fiction il y a quelques décennies, ce n’est plus le cas à présent. Avec « L’Humanité disparaîtra, bon débarras », Yves Paccalet nous renvoie au visage l’insondable bêtise de notre espèce. Un ouvrage que l’on se gardera de conseiller aux dépressifs, car, une fois le livre refermé, le lecteur est forcé de convenir qu’il ne dispose pas d’énormément d’options : soit se replonger la tête dans le sable, soit se refroidir sans tarder la cervelle. Pour peu qu’il choisisse la seconde solution, cela fera déjà un lecteur de moins – bon débarras !


Titre : L’Humanité disparaîtra, bon débarras
Auteur : Yves Paccalet
Couverture : Studio J’ai Lu / D.I.B. / Getty Images
Éditeur : J’ai Lu (édition originale : Flammarion, 2013)
Collection : Essai
Site Internet : page roman (site éditeur)
Numéro : 8438
Pages : 251
Format (en cm) :11 x 18
Dépôt légal : mars 2021
ISBN : 9782290259719
Prix : 7,50€



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Hilaire Alrune
23 mai 2021


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