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Collège Maléfique (le), tome 1 : Le marche-rêves
Cassandra O’Donnell
Flammarion Jeunesse, roman (France), fantastique, 310 pages, juin 2020, 12,50€

A 13 ans, le Ministère des Enfants Spéciaux vient chercher Emma. Elle avait jusque-là réussi à se faire discrète et vivre « normalement ». Arrachée à son père, elle intègre un collège où il n’y a que des Spéciaux. Mais à de rares exceptions leur différence est visible : Britt, sa camarade de chambre, a des oreilles immenses, Groump est un petit monstre poilu, Lola a des écailles et Misha a deux têtes... et il y a les sorciers, comme Hell, qui ont un pentacle brillant sur le front, et les yeux flamboyants.
Emma cache son don à ses nouveaux amis, mais elle se met vite à dos les sorciers et les profs du Manoir : leurs sorts glissent sur elle, mais elle est incapable d’en lancer. Deux questions taraudent l’adolescente : que fait-elle là ? Et pourquoi Hell, qui fait peur à tout le monde, prend-il sa défense ?



Après les professeurs magiques dans « Malenfer », Cassandra O’Donnell nous replonge dans un milieu scolaire fantastique, comme on les apprécie depuis « Harry Potter ». On apprécie d’y trouver une héroïne qui va en classe et suit des cours. Cursus « normal » oblige, elle est bien plus forte en maths qu’en magie, d’autant que son mystérieux pouvoir, dont le premier chapitre ne nous aura montré qu’un léger aperçu, ne relève pas de la magie enseignée au collège. Dès son arrivée, elle est partagée entre le bâtiment principal, avec classes « ordinaires » et dortoirs, et le Manoir, Repaire des sorciers où on enseigne la magie. Un lieu qui la met tout de suite mal à l’aise, parce qu’elle ne s’y sent pas à sa place, n’en maitrise pas les codes (et ni le prof, M. Cornedru, ni les autres élèves ne vont lui expliquer). Qu’elle soit incapable de lancer un sort énerve Cornedru - un type qui transpire la bonté pédagogique comme son modèle Severus Rogue - mais que les sorts ne lui fassent rien non plus l’énerve prodigieusement. On regrettera que, malgré la brièveté de l’intrigue (qui s’étale en fait sur quelques jours à la rentrée), l’équipe enseignante ne se bouge pas davantage pour comprendre le don d’Emma. Les deux rendez-vous chez le directeur, personnage à gros bras de mafieux un peu caricatural, ne suffisent pas à ce qu’on y croit.
Certes, on s’adresse à de jeunes ados, et c’est Emma, ses craintes et ses secrets qui mènent la danse, mais on aurait apprécié un peu plus de détail et de finesse en arrière-plan. On s’interrogera aussi sur Hector, le « traducteur » de Groumpf : son don des langues, plutôt discret, valait-il vraiment de l’interner avec les autres Spéciaux ?

Bref, au bout d’un tiers du roman, Emma nous lâche enfin l’info : elle peut aller dans les rêves des autres. Elle est le marche-rêves du titre. Les petits malins auront décortiqué son patronyme assez explicite : Dreamaker (dream-hacker ? ou dream-maker ?) Le souci, c’est que depuis son arrivée elle est attirée dans le cauchemar d’un garçon, Eden, dans lequel elle n’a pas la capacité de modifier les choses comme d’habitude. Et que dedans, il y a un démon, qui veut passer dans le monde réel grâce à elle, ce qui est 1) dangereux, 2) interdit, 3) passible d’une énorme punition, et Cornedru est assez sévère, la condamnant la première fois à faire le ménage dans toutes les classes, façon assez misogyne de punir la nouvelle, et je crois la seule fille de la classe de magie.

Par contre, la construction de la relation entre Emma et Hell est très bien faite, et même si la question du « pourquoi m’aide-t-il ? » traine un peu en longueur, elle a le mérite de conserver une part de doute tandis que la jeune fille hésite sur ses sentiments à son égard. Tout le monde lui a dit de se méfier d’Hell, l’a qualifié de dangereux, mais c’est Emma qui fait le premier pas dans sa direction, pour s’affirmer dans son nouvel environnement. Il y a là-derrière une bonne analyse des codes et rites scolaires autant qu’adolescents.

Des personnages avec du caractère, des bons sentiments, un poil de mystère, et une intrigue bien conçue et rythmée : ce premier tome du « Collège Maléfique » saura séduire les jeunes lecteurs, de l’âge des héros. L’autrice use de tous les biais permis par la narration interne pour entretenir la tension et le mystère, et concentrer son récit sur les moments les plus dynamiques, propices à dévorer l’ouvrage. Le pari est réussi, seuls les plus âgés regretteront sans doute la cruelle légèreté du fond, des rares descriptions, des personnages secondaires très superficiels, le grand nombre de questions sans réponses sur cet univers. Il faudra attendre la suite !


Titre : Le marche-rêves
Série : Le Collège maléfique, tome 1
Autrice : Cassandra O’Donnell
Couverture : Jean-Mathias Xavier
Éditeur : Flammarion
Collection : Jeunesse, 10-13 ans
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 310
Format (en cm) : 21 x 13,5 x 2
Dépôt légal : juin 2020
ISBN : 9782081513907
Prix : 12,50 €



Nicolas Soffray
18 juillet 2020


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