Maintenant que le lecteur sait de quoi il s’agit, que dès que Molly saigne, des doubles d’elle peuvent naître, l’effet de surprise est passé. Les mantras qui dictaient sa vie, la rythmaient ont perdu de leur pouvoir d’évocation.
Intelligemment, Tade Thompson ne poursuit pas la description de la vie de Molly Southbourne, mais d’une Molly, c’est-à-dire d’une de ses doubles, car l’originale a choisi de se sacrifier, n’en pouvant plus de ces inutiles massacres de ses copies, perdant à chaque fois une part d’elle-même. Cette Molly de substitution possède la mémoire de sa génitrice, mais pas les propriétés, elle a beau se couper, rien n’y fait, elle n’est pas affligée de la même malédiction, elle est unique. Personne ne le sait, mais elle sent une présence, croit être surveillée. Pourquoi et par qui ?
Tade Thompson parvient à s’éloigner des « Meurtres de Molly Southbourne », d’une certaine manière à se réinventer en partant du même sujet, mais sans l’égaler, car ce court roman n’a pas la même force. Il ne dégage pas cette beauté sauvage, s’attachant plus à donner des bribes de réponses pas forcément satisfaisantes. Cette Molly cherche sa voie, sa raison d’être, car l’originale lui a confié le fardeau de survivre, de poursuivre là où elle a abandonné. De rencontre en rencontre, elle comprend mieux qui elle est, qui elles sont jusqu’à trouver son chemin.
Avec « La survie de Molly Southbourne », l’auteur parvient à se renouveler, à développer le personnage de Molly d’une autre manière, peut-être inattendue mais moins significative que la première fois où il a touché l’excellence. Y rester tient de la gageure, mais la présente novella fait bonne figure, prolongeant cette création si puissante, avant un ultime développement en cours d’écriture.
Je suis curieux de voir où Tade Thompson désire nous conduire. D’ailleurs avait-il seulement prévu d’écrire une trilogie au départ ?
Un auteur indubitablement à suivre pour son originalité.
Titre : La survie de Molly Southbourne (The Survival of Molly Southbourne, 2019)
Auteur : Tade Thompson
Traduction de l’anglais : Jean-Daniel Brèque
Couverture et conception graphique : Aurélien Police
Éditeur : Le Bélial’
Collection : Une Heure-Lumière
Numérotation dans la collection : 24
Directeur de collection : Olivier Girard
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 128
Format (en cm) : 12 x 18
Dépôt légal : juin 2020
ISBN : 9782843449642
Prix : 9,90 €
Autres titres de la collection :
1. « Dragon » de Thomas Day
2. « Le nexus du Docteur Erdmann » de Nancy Kress
3. « Cookie Monster » de Vernor Vinge
4. « Le choix » de Paul J. McAuley
5. « Un pont sur la brume » de Kij Johnson
6. « L’homme qui mit fin à l’histoire » de Ken Liu
7. « Cérès et Vesta » de Greg Egan
8. « Poumon vert » de Ian R. MacLeod
9. « Le regard » de Ken Liu
10. « 24 vues du mont Fuji, par Hokusai » de Roger Zelazny
11. « Le sultan des nuages » de Geoffrey A. Landis
12. « Issa Elohim » de Laurent Kloetzer
13. « La ballade de Black Tom » de Victor LaValle
14. « Le fini des mers » de Gardner Dozois
15. « Les attracteurs de Rose Street » de Lucius Shepard
16. « Retour sur Titan » de Stephen Baxter
17. « Helstrid » de Christian Léourier
18. « Les meurtres de Molly Southbourne » de Tade Thompson
19. « Waldo » de Robert A. Heinlein
20. « Acadie » de Dave Hutchinson
22. « Abimagique » de Lucius Shepard
23. « Le temps fut » de Ian McDonald
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francois.schnebelen[at]yozone.fr