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Bifrost n°97
Rédacteur en Chef : Olivier Girard
Revue, n°97, nouvelles - articles - entretiens - critiques, janvier 2020, 200 pages, 11,90€

Pour le dossier Sabrina Calvo, pas de photographies pour se la représenter, mais la couverture très réussie de Chloé Veillard qui colle bien au personnage me semble-t-il après lecture du long entretien qu’elle a accordé à Richard Comballot. L’auteure y apparait pleine de contradictions, il n’est pas facile de comprendre ce qu’elle cherche vraiment, car ses projets partent dans tous les sens et elle a de doux rêves qui ne collent pas forcément avec ce qui est écrit. De plus, en-dehors de quelques rééditions, ses livres sont attribués à David Calvo, je pensais que ce changement d’importance serait abordé, mais tout au long de l’interview, un voile pudique est jeté sur ce qui est nommé une transition. L’absence de photos va sûrement dans ce sens. Par contre, il est agrémenté de nombreux dessins, œuvres de Sabrina Calvo, ce qui n’est pas désagréable.
Ce long entretien me laisse tout de même un sentiment de fouillis dans un certain sens et de trop peu dans un autre, comme si l’auteure n’avait pas voulu se livrer entièrement, ce qui est bien sûr son droit.



En complément, Fabrice Colin évoque son amitié avec Sabrina Calvo qu’il a finalement toujours côtoyé en tant que David. Cet entretien est rempli d’humour et corrobore un peu le sentiment suscité par les mots de l’auteure. Mathias Echenay, le fondateur des éditions La Volte, se prête aussi au jeu des questions. Les lectures commentées de ses romans et recueils, ainsi que la bibliographie des œuvres de Sabrina Calvo, achèvent de dresser son portrait.

La nouvelle “Baiser la face cachée d’un proton” permet de se faire une idée de sa production qui défie les catégorisations. Il faut s’accrocher pour suivre, mais elle le mérite largement. Par moments, je croyais lire une nouvelle de la revue « Solaris » ou « Brins d’Éternité » avec des expressions francophones outre-Atlantique. Rien d’étonnant, si j’ai bien suivi, elle vit à Montréal. Il faut adhérer au style, accepter de ne pas tout saisir pour embrasser l’histoire que je me garderais bien de résumer. L’image de danser entre les flocons de neige ne manque ni de force ni de poésie et j’aime beaucoup. Je sors de ce texte avec l’impression de ne pas avoir tout compris, mais très satisfait de l’expérience. Et je pense sincèrement la renouveler avec « Toxoplasma » que Folio SF vient de rééditer.

Également au sommaire des nouvelles bien plus abordables de Ken Liu et Daryl Gregory.
Dans “Pensées et prières”, une femme ne peut faire le deuil d’une de ses filles, morte dans une fusillade de masse. Sans consulter son mari ni son autre fille, elle partage sa douleur sur la toile, en fait tant pour que personne ne puisse oublier qu’elle déchaîne les avis haineux. La suite d’événements s’avère inéluctable, fatale et destructrice. Ken Liu décrit ce qui revient à tuer une seconde fois un être, à l’effacer totalement de sa vie. C’est très fort, car il concilie beaucoup de choses dedans !

Daryl Gregory suit quelques étapes de la vie de LT qui, petit garçon, a assisté à une pluie de météorites, en réalité des semences d’outre-espace. Au fil des années, des espèces invasives poussent, prenant la place des végétaux terrestres. LT les étudie, vit une relation amoureuse avec Doran, évolue dans un monde en changement sous la menace perpétuelle d’une invasion alien... “Les neuf derniers jours sur Terre” regorge de qualités et est baigné d’une aura d’étrangeté, de mystère, le tout au milieu d’une existence qui poursuit vaille que vaille son chemin. C’est passionnant, le lecteur ne peut qu’être happé par l’imaginaire de Daryl Gregory, une fois de plus énorme.

Beaucoup d’ouvrages sont chroniqués dans les pages de ce « Bifrost », une partie encore plus vaste l’est sur la version numérique ou le blog de la revue. Thierry Fraysse, le directeur des éditions Callidor, répond à quelques questions. Son dévouement pour remettre en avant des ouvrages précurseurs de la fantasy s’avère admirable.
Dans une tribune, Romain Lucazeau revient sur la polémique des dernières UtopialesAlain Damasio s’était insurgé contre la présence de l’Agence d’Innovation de Défense désirant recruter des auteurs de SF pour élaborer des scénarios et menaces inattendues pour enrichir la réflexion stratégique. C’est clair et bien envoyé.
Le professeur Roland Lehoucq s’est adjoint les services de l’astrophysicien Bertrand Cordier pour décrypter une notion de « Diaspora », le dernier Egan publié chez Le Bélial, à savoir le sursaut Gamma. Bien présenté et assez limpide. D’ici à ce qu’un futur volume de la collection « Parallaxe » soit consacré à l’œuvre de Greg Egan...

Ce numéro consacré à Sabrina Calvo, une auteure à la voix particulière et stimulante, contient de très bonnes nouvelles et une partie rédactionnelle toujours intéressante.


Titre : Bifrost
Numéro : 97
Rédacteur en chef : Olivier Girard
Couverture : Chloé Veillard
Type : revue
Genres : SF, études, critiques, nouvelles, entretien, etc.
Sites Internet : le numéro 97, la revue (Bifrost) et l’éditeur (Le Bélial’)
Dépôt légal : janvier 2020
ISBN : 9782913039940
Dimensions (en cm) : 14,9 x 21
Pages : 200
Prix : 11,90€



Pour contacter l’auteur de cet article :
francois.schnebelen[at]yozone.fr


François Schnebelen
24 avril 2020


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