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Redbone
Christian Staebler, Sonia Paoloni et Thibault Balahy
Steinkis

Entre biographie et documentaire, une histoire de rock et de résistance ! Alors que l’American Indian Movement est fondé en 1968, quatre musiciens amérindiens veulent, eux aussi, défendre leur culture. Soutenus par Jimi Hendrix, ils fondent Redbone et deviennent rapidement des icônes pour la jeunesse de tout un peuple.



Redbone est original tout d’abord par son récit. Celui du premier groupe de rock amérindien. Le livre est organisé en différents chapitres montrant l’ascension puis la fin de Redbone. Tout commence quand la fille du guitariste et compositeur rejoint son oncle bassiste, devenu animateur radio. Lors d’un repas de famille, les questions des descendants permettent de revivre de l’intérieur l’histoire de la vie du groupe.
Le lecteur pénètre les coulisses du spectacle.
Deux frères adolescents, Pat et Lolly Vegas, connaissent un succès rapide en intégrant la communauté créative à Los Angeles. En quelques pages, ils trouvent un agent, enchaînent des concerts de plus en plus suivis, font de la télé et apparaissent même dans un film. Influents dans l’industrie, ils conseillent même aux Doors d’être plus énergiques.
C’est seulement à la fin du livre que l’on découvre leur enfance et que le succès n’est pas venu si vite, mais quand le cadet a rejoint son frère aîné à Los Angeles.
On sent que le scénariste Christian Staebler, au départ illustrateur et graphiste, est un fan. Une passion qui permet au récit d’être bien documenté, notamment par des interviews avec les membres du groupe et des proches.

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Le milieu musical de Los Angeles semble être une vitrine du melting-pot américain, mais derrière cette façade, le racisme reste très présent et oblige les deux frères à changer de nom de famille pour ne pas faire « trop indien ». Ils ont un look de rocker et rien d’indien car, pour réussir, ils doivent se conformer aux codes de la jeunesse. Mais après un concert impromptu, Hendrix (ndrec : dont la mère était d’origine Cherokee) leur propose de monter un groupe d’indiens. Cela ne se fera pas mais ils gardent l’idée. C’est peut être une rumeur mais comme le dit John Ford « entre la légende et la vérité imprimons la légende ».
On suit ensuite l’arrivée progressive des autres musiciens qui modifie le style du groupe – un guitariste dont le beau-père lui a appris le flamenco, un batteur dont le père pianiste de jazz… Des anecdotes de tournées amusent le lecteur comme le vol d’une casquette de douaniers en RDA ou un concert en prison. Le groupe refuse d’être laminé par le mainstream mais affirment progressivement son identité amérindienne par son style vestimentaire : Ils portent des cheveux longs et des ceintures traditionnelles...
Même s’ils sont tous amérindiens, les frères Vegas découvrent des parcours de vie très différentes en intégrant ces musiciens. Le batteur, par exemple, a vécu dans une réserve jusqu’à ce qu’il soit contraint d’aller dans une école d’assimilation. Un lieu où les violences physiques et l’éloignement cherchent à mater toute une jeunesse.
Créateur des écoles pour indigènes, Richard Henry Pratt dit « tuons l’indien, sauvons l’homme ». « Redbone » a en effet un objectif bien plus large que le récit sur un groupe de rock et s’inscrit comme un documentaire en BD sur les amérindiens.

Les scénaristes Christian Staebler et Sonia Paolini montrent bien que ce groupe n’est pas isolé dans ses revendications politiques mais qu’il est inséré dans un contexte général de revendications des droits par les minorités.
Des groupes contestataires émergent en 1968, dont l’American Indian Movement. Redbone lui reverse une grande partie de ses recettes.
La discussion entre Pat Vegas et sa nièce est l’occasion d’un rappel des étapes marquantes du mouvement, comme la marche vers Washington et l’occupation du mont Rushmore, mais aussi de faits moins connus, comme la fondation d’écoles et la re-création de danses rituelles. Par une chanson, on découvre la complexité d’une émeute à Wounded Knee.
D’ailleurs, le groupe se sépare en raison des tensions sur les droits d’auteurs mais aussi à cause d’un morceau sur cette révolte.

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Le dessin de Thibault Balahy reprend certains codes du roman graphique. Il n’y a pas de case mais des images autour de la page. Ses jolis traits épurés modernisent le biopic. Il permet de suivre très facilement le récit car pour le passé, les pages sont jaunies mais cela ne l’empêche pas d’être créatif : la musique, par exemple, est une fumée qui sort des studios.
Les éditions Steinkis nous offre donc l’opportunité de découvrir cette pépite et propose également de nombreux bonus : la préface de Frankie Vegas, le fils d’un des fondateurs de Redbone, ainsi qu’en fin de volume, une discographie critique et une interview de Pat Vegas, le personnage principal du récit.


Redbone
- Scénario : Christian Staebler et Sonia Paoloni
- Dessins : Thibault Balahy
- Éditeur : Steinkis
- Pagination : 168 pages couleur
- Format : 19 x 27 cm
- Date de parution : 30/01/2019
- Numéro ISBN : 9782368461808
- Prix public : 20 €


Illustrations © Thibault Balahy / Steinkis



Corentin Grebert
24 août 2019




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