Court roman d’environ soixante-dix pages, « Les Dimanches de Jean Dézert » met en scène un modeste employé au Ministère d’Encouragement au Bien (section du matériel), personnage sans personnalité propre, qui aime à baguenauder le dimanche, et, sur son agenda, résume en un seul mot ses activités de la journée : « Néant ». Un « Néant », un seul mot qui paraît résumer l’individu lui-même. Le désœuvrement comme art de vivre, le néant de l’existence, entre passivité et volonté molle : Dézert se fiance par ennui, par la volonté d’une jeune fille rencontrée par hasard, et, une fois que celle-ci a rompu ces fiançailles on est bien en peine de savoir s’il éprouve vraiment quelque peine, car il donne l’impression de ne plonger par contrecoup, de manière éphémère, dans ce qui n’est qu’un semblant de débauche, que parce qu’un de ses amis lui a dit que c’est ce qui se fait dans ces cas-là. Entre désinvolture et distanciation, elles aussi passives, spontanées, plus nées d’un désintérêt pour tout que d’une pose travaillée, figure dont le vide intérieur surpasse l’être, non-existentialiste avant la lettre, laissant venir les choses sans jamais rien faire, flâneur impénitent et modérément attentif, âme perpétuelle de badaud, Dézert, sans jamais se poser la moindre question, ne fait guère qu’arpenter sa propre vacuité. Un personnage singulier, que Montal et Napias, dans « Cent courts chefs-d’œuvre » définissent comme « ayant opéré un repli stratégique hors de son existence ».
Avec « L’Horizon chimérique », qui a inspiré dans les années 1920 un cycle de mélodies au compositeur Gabriel Fauré, puis avec « Autres poèmes », la poésie occupe la partie centrale du volume. On trouvera dans ces vers de composition classique, souvent lyriques, des images puissantes et les échos d’un très fort appel du large auquel de la Ville de Mirmont n’a jamais succombé – mais il a, hélas, devancé l’appel pour partir au front, alors qu’il avait été récusé par l’armée quelques années plus tôt.
Huit contes de bonne tenue constituent la troisième partie du volume. Le lecteur y découvrira un vaisseau fantôme dépourvu d’équipage (“City of Bénarès”), des oiseaux partis à la poursuite du soleil (“Les Pétrels”), la fin méconnue du compagnon de Don Quichotte (“La Mort de Sancho”), un instrument de musique rétif et dangereux (“Le Piano droit”), une histoire d’alcool inspirée d’une « légende urbaine », ou plus exactement maritime, déjà connue à travers plusieurs versions, dont une relative à l’amiral Nelson, mais qui produit toujours son effet (“Les Matelots de la Belle-Julie”), une affaire imprudente avec le malin (“Entretien avec le Diable”), et une rêverie à l’approche de la tempête (“L’Orage”). Pour finir, un conte ironique relatif à la création d’une nouvelle religion présente avec une belle ambiguïté un hurluberlu destiné à terminer ses jours dans un asile, et dont on ne saura jamais si ses pouvoirs étaient ceux d’un homme ou ceux d’un dieu.
Titre : Les Dimanches de Jean Dézert, suivi de l’Horizon chimérique – Autres poèmes - Contes
Auteur : Jean de la Ville de Mirmont
Couverture : Benoit Preteseille
Éditeur : La Table Ronde
Collection : La Petite Vermillon
Site Internet : page roman (site éditeur)
Numéro : 378
Pages : 231
Format (en cm) : 10,7 x 17,7
Dépôt légal : juin 2019
ISBN : 9782710389927
Prix : 7,30 €
La Petite Vermillon sur la Yozone :
« Cent courts chefs-d’œuvre » de Napias et Montal
« César Capéran » de Louis Codet
« Le Club des longues moustaches » de Michel Bulteau
« En remontant le boulevard » de Jean-Paul Caracalla
« Vagabondages littéraires dans Paris » de Jean-Paul Caracalla
« Je connais des îles lointaines » de Louis Brauquier
« Quinzinzinzili » de Régis Messac
« Un peu tard pour la saison » de Jérôme Leroy
« La Nuit des chats bottés » de Frédéric Fajardie
« Journal de Gand aux Aléoutiennes » de Jean Rolin