Le prologue mettant en scène Shannon face au Terminus en 2199 décrit très bien la menace et place d’emblée la barre très haut. Tom Sweterlitsch frappe d’entrée très fort et marque les esprits, tout en interrogeant sur qui est revenu du Terminus.
La manière dont il cadre l’espace-temps s’avère particulièrement bien vue et donne des développements très intéressants. 1997 est le présent, les futurs explorés ne sont que des possibilités qui s’effondrent lorsque le voyageur revient dans son présent. Ainsi quand Shannon quitte 2015, les personnes qu’elle y côtoyait cessent d’exister, tout ce qu’elles ont vécu n’a jamais eu lieu et c’est comme si elles repartaient de zéro en 1997. Pour ceux qui connaissent le programme Espace Profond, cela pose un cas de conscience, voir partir Shannon signifie la disparition dans le néant.

Parfois il est bon de poser le livre pour réfléchir aux subtilités du concept et apprécier la façon dont l’auteur joue avec la mécanique quantique mais aussi la causalité. Le Terminus n’est pas arrivé seul. Et pourquoi se rapproche-t-il irrémédiablement du présent comme les futurs explorés le démontrent ?
En cherchant à élucider l’affaire Mursult dont seule Shannon parmi les enquêteurs connait le passé, elle approche du phénomène déclencheur, de l’origine du mal, mais l’affaire est complexe, ses ramifications trop multiples pour être appréhendées.
À ses côtés, le lecteur est trimballé entre le présent et différents futurs, les personnes croisées différant à chaque fois. Il y a une trompeuse impression de déjà vu et il est bon de se perdre, de se laisser entraîner par le cours des événements qui tel un torrent furieux conduit vers la fin du temps.
Alors que Shannon a vécu plus de six mois dans le futur, elle revient dans le présent au moment où elle l’a quitté. Son âge ne reflète aucunement le nombre d’années vécues, ce qui est cocasse à plus d’une occasion. En 1997, elle se rapproche physiquement de sa mère, alors que dans le futur, elle semble ne pas avoir vieilli pour les connaissances qu’elle croise.

Tom Sweterlitsch signe un thriller de science-fiction particulièrement bien tourné et ébouriffant quant à ses implications. L’histoire est passionnante, elle flirte parfois avec l’horreur, car le Terminus s’apparente à l’enfer de la chrétienté avec une éternité de souffrances. Cette fin programmée heurte les imaginations et provoque un irrépressible frisson. Shannon s’avère un personnage magnifique, s’interrogeant souvent et à juste titre sur qui elle est vraiment. Courageuse, elle ne recule pas face au danger, consciente que sa vie pèse bien peu face au destin de l’humanité.

« Terminus » s’avère une lecture enthousiasmante, Tom Sweterlitsch maîtrise son sujet et lui donne de l’épaisseur tant au niveau des idées que des émotions.
Il s’agit d’une très belle publication des éditions Albin Michel qui se font une belle place dans le paysage de l’imaginaire français avec de telles pépites.
Un livre tout simplement magistral !

Titre : Terminus (The Gone World, 2018)
Auteur : Tom Sweterlitsch
Illustration de couverture : Aurélien Police
Traduction de l’anglais (États-Unis) : Michel Pagel
Éditeur : Albin Michel
Collection : Albin Michel Imaginaire
Directeur de collection : Gilles Dumay
Sites Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 446
Format (en cm) : 14 x 20,5
Dépôt légal : mai 2019
ISBN : 9782226439932
Prix : 24,90 €

Autres livres de la collection sur la Yozone :
 « Mage de bataille, tome 1 » de Peter A. Flannery
 « American Elsewhere » de Robert Jackson Bennett
 « Les étoiles sont légion » de Kameron Hurley
 « La cité de l’orque » de Sam J. Miller

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