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Parasite par Bong Joon Ho
Film coréen de Bong Joon Ho (2019)
Le 5 juin 2019

Première Palme d’or pour Boog Joon Ho et la Corée du Sud.
Qui peut le mieux parler de son film que son concepteur ! Voici une interview de ce réalisateur talentueux.



Interview de Bong Joon Ho

 [1]

Quel est la signification du titre Parasite ?

Au premier abord, tout le monde s’attend avec un titre pareil à un film de monstres ou de science-fiction. Surtout parce que ça établit une forme de connexion, de continuité avec l’un de mes films précédents, THE HOST.
Mais comme je l’ai dit, les protagonistes du film sont au départ les membres d’une famille ordinaire. Ce sont des personnes qui aspirent à vivre avec autrui une relation proche de la symbiose, mais cela ne fonctionne pas, ce qui les amène à devenir des parasites. J’ai pensé PARASITE comme une tragicomédie qui dépeint l’humour, l’horreur et la tristesse qui surviennent lorsque vous voulez réunir tout le monde autour d’une même vie prospère, mais que vous vous heurtez ensuite à la réalité.
C’est un titre ironique, comme celui de MEMORIES OF MURDER, qui d’apparence fait référence à des souvenirs plaisants et agréables. Comment quelqu’un pourrait entretenir une forme de nostalgie pour un meurtre ? De la même manière que le film dépeint les souvenirs d’une époque par le biais d’une affaire de meurtres en série, PARASITE porte également une nuance ironique dans son titre.

A quel genre affilieriez-vous PARASITE ?

C’est avant tout un drame, mais qui est fortement imprégné du monde contemporain. Bien que l’intrigue se compose d’une série de situations incongrues, c’est une histoire qui aurait très bien pu se dérouler dans le monde réel. On peut le voir comme un incident qu’on aurait pioché dans les journaux ou sur les réseaux sociaux et sur lequel on se serait basé pour faire un film.

PARASITE est donc à mes yeux un drame plutôt réaliste, mais il pourrait tout aussi bien être perçu comme un polar, une comédie sociale ou encore un thriller horrifique. J’essaie toujours de dépasser au mieux les attentes du spectateur, et j’espère que PARASITE s’inscrira dans cette démarche.

Qui sont les deux familles au centre de l’histoire de PARASITE ?

La première famille est d’une origine sociale plutôt modeste, et vit dans un appartement sordide en sous-sol où elle mène une vie ordinaire, sans rien de spécial, qui s’avère pourtant difficile à mener. Le père de la famille a accumulé des échecs professionnels, la mère, quant à elle, n’a jamais eu un franc succès au cours de sa carrière d’athlète et le fils et la fille, pour finir, ont raté leurs concours d’entrée à l’université.

A l’opposé se trouve la famille très fortunée de Mr. Park, dirigeant d’une entreprise d’informatique. Le père de famille est un bourreau de travail, il est marié à une très belle femme et a deux enfants adorables. Les Park sont donc représentatifs de la famille idéale du monde moderne des élites.

Racontez-nous comment vous avez choisi les acteurs du film, le raisonnement qui a précédé vos choix ?

Pour ce film il était important de réunir un casting qui constituerait un ensemble homogène, comme une équipe de football. De ces acteurs devait se dégager au premier regard l’impression de voir une famille, j’y ai donc beaucoup réfléchi.

Le premier que j’ai choisi était Song Kang Ho, et quand je tournais OKJA avec Choi Woo Shik, je me suis dit que ce serait amusant de le voir jouer le film avec Song Kang Ho. Après cela, j’ai pris Park So Dam – dont la ressemblance avec Choi Woo Shik était forte – parce qu’elle avait de grandes compétences en terme de jeu. C’était important pour moi qu’ils se ressemblent pour faire le lien entre les membres de la famille. En ce qui concerne l’actrice Jang Hyae Jin, j’ai aimé la force dont elle faisait preuve dans le film THE WORLD OF US et je l’ai donc choisie pour le rôle de la puissante épouse de Song Kang Ho.

Pour la famille Park, je ne voulais pas du cliché parfait de la famille bourgeoise que l’on voit dans les drames coréens à la télévision, j’avais besoin à la place d’acteurs qui renvoient l’image d’une famille candide mais cultivée. J’ai toujours été fasciné par le charme aux multiples facettes de Lee Sun Kyun, d’où le fait que mon choix se soit porté sur lui. Cho Yeo Jeong qui joue la mère s’apparentait pour moi à une mine de diamants d’une profondeur incroyable, dont le potentiel n’avait pas été exploitée à fond, alors je l’ai choisie dans l’espoir d’en révéler ne serait-ce qu’une part.

Ce n’est pas un film avec un seul protagoniste, donc la façon dont les acteurs interagissaient était cruciale. A la fin du tournage, j’étais d’ailleurs très reconnaissant du travail que chacun avait accompli pour son rôle.

Quelle image de la société contemporaine vouliez-vous refléter à travers ce film ?

Je pense qu’il n’y a qu’une façon de décrire les inégalités qui s’emparent de notre société, c’est à travers une comédie dramatique. Nous vivons dans une époque où le capitalisme règne, sans aucune autre alternative possible. Ce n’est pas juste en Corée, le monde entier fait face à une situation où la doctrine du capitalisme ne peut être ignorée. Dans le monde réel, les familles Ki-taek et Park ne risqueraient jamais de se croiser. Le seul point de convergence entre les classes est autour de l’emploi, lorsque l’une est engagée en tant que domestique au service de l’autre.

Dans certains cas seulement, il arrive que les deux classes se rapprochent suffisamment pour entendre la respiration de l’autre.

Dans le film, bien qu’il n’y ait aucune intention malveillante de part et d’autre, les deux classes sont entraînées dans une situation où le moindre dérapage peut provoquer une fracture irrémédiable. Dans la société capitaliste d’aujourd’hui, il existe des rangs et des castes qui sont invisibles à l’œil nu. Nous les tenons éloignés de notre regard en considérant les hiérarchies de classes comme des vestiges du passé, alors qu’il y a encore aujourd’hui des frontières infranchissables entre les classes sociales. Je pense que ce film décrit ce qui arrive lorsque deux classes se frôlent dans cette société de plus en plus polarisée.

Qu’espérez-vous que les gens retiennent de votre film ?

J’espère juste qu’il donnera matière à réfléchir aux spectateurs. C’est à la fois drôle, terrifiant et triste et si cela peut pousser le public à discuter du film autour d’un verre, je serais déjà comblé.

En avant-première le 28 mai dans quelques salles partenaires :

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Images © The Jokers



Ingrid Etienne
25 mai 2019



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