Maria, seize ans, orpheline, deux ans d’avance, souhaite commencer à travailler très vite, malgré les encouragements de son tuteur Pierre-Alexandre, qui la pousse à faire des études. Elle convoite un poste à l’Assurance, dont le directeur, Charles d’Astier, lui confie une mission : se faire embaucher par le cirque de la société Vazatta, qui développe également Vaz Assurances, une filière concurrente. D’Astier sait que les parents de Maria sont morts lors d’un accident dans ce cirque : elle ne porte donc pas les Vazatta dans son cœur et pourrait bien être le meilleur agent de d’Astier, qui rêve de trouver des motifs suffisamment compromettants pour mettre fin aux activités des Zavatta.

Des motifs compromettants, on peut toujours en trouver dans cette société très policée d’un futur proche où le parti Zéro Risque a pris le pouvoir depuis plusieurs années, désormais nommées en « années sécuritaires » selon un tout nouveau calendrier. Dans ce monde orwellien marqué par une police omniprésente, « tracker santé » suit chacun à tout instant. Être malade ressemble déjà à une forme de délinquance, aussi celui qui s’écarte du droit chemin reçoit-il instantanément conseils médicaux et rappels à l’ordre. La rééducation forcée à la sécurité n’est pas loin.

Mission d’infiltration, donc. Mais cet univers qu’elle a connu étant toute petite l’accueille beaucoup mieux qu’elle ne s’y attendait, la fascine, lui ouvre les yeux sur un monde exceptionnellement humain. Malgré sa tâche, elle découvre vérité sur vérité, et réalise que le décès de ses parents n’était peut-être pas dû entièrement à la négligence. Dès lors, son esprit balance : va-t-elle trahir son employeur, Charles d’Astier qui, élevé au rang de ministre de la sécurité, apparaît de plus en plus machiavélique et dépourvu de pitié, et n’hésite pas à la faire chanter. Papy Vaz, le patron du cirque, de son côté, semble n’être que bienveillance : ne serait-il pas trop doux pour ne pas être, lui aussi, quelque peu machiavélique ?

Au cours de cette intrigue, on découvre en compagnie de Maria le monde du cirque avec ses personnages, Papy Vaz, Mathieu, dix-huit ans, trapéziste récalcitrant qui veut devenir clown, Julia la contorsionniste, Amandine, Little Tom, Jean, Nico et quelques autres. On s’en doute : entre le travail, entre les numéros, entre acceptation et refus, entre méfiance et fascination, au cours d’une tournée qui emmènera le cirque à travers la France jusqu’à Bordeaux, puis Montpellier, une idylle ne manquera pas d’advenir.

Pièces de tribunaux, extraits du quotidien « France Matin » et relation classique se succèdent pour tisser une histoire qui devrait plaire aux plus jeunes. En alternant les points de vue, en adoptant celui de protagonistes différents sur des segments de temps très court, parfois durant la même scène, Célia Flaux propose une narration sans cesse changeante qui donne à l’intrigue un aspect dynamique et répond à l’intention de l’auteur : faire comprendre aux lecteurs / lectrices que rien n’est jamais aussi simple qu’il y paraît et qu’il importe toujours de multiplier sources et approches pour de se faire une juste opinion. L’aspect dystopique aurait sans doute gagné à être plus détaillé – seuls les éléments utiles à l’intrigue sont mentionnés, si bien que cette société future demeure à peine esquissée – plutôt que d’être résumée par son propos, à savoir les dangers d’une société de surveillance et de contrainte, hygiéniste jusqu’à faire sans cesse entrave aux libertés individuelles. Une pointe de science-fiction, une pointe de romance, une pointe de poésie : en rappelant que ce cirque, dont beaucoup souhaitent la fin, constitue l’une des marges dans lesquelles subsistent beauté et créativité, « Le Cirque interdit » apparaît comme un petit roman plein de bonnes intentions.

Titre : Le Cirque interdit
Auteur : Célia Flaux
Couverture : Dpcom
Éditeur : Scrineo
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 253
Format (en cm) : 13,5 x 21
Dépôt légal : janvier 2019
ISBN : 9782367406572
Prix : 16,90€