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Compte à rebours
Martin Holmén
Hugo et Compagnie, Hugo Thriller, roman traduit du suédois, policier, 352 pages, juin 2017, 19,95€

Stockholm, 1935, l’ancien boxeur Harry Kvist sort de prison et retrouve ses habitudes : son appartement au-dessus des pompes funèbres de Lundin, son chien, ses cigares Meteor, l’alcool... Dans le quartier, personne ne l’a oublié et pas pour sa gentillesse mais plutôt pour ses poings, car il en a rossé plus d’un.
Dans une semaine, son compagnon Gusten sera aussi libéré, ce qui pousse Harry à voir l’avenir différemment et à se ranger en dénichant une activité recommandable.
Pendant son incarcération, Beda la blanchisseuse, une des rares personnes à l’apprécier, aurait été assassinée par Petrus, son fils sourd-muet, ce que Harry ne peut pas croire. Et il avait promis à Beda de s’occuper de Petrus en cas de problème. Comme il est homme de parole, il va plonger dans les ennuis...



Rien ne le laisse deviner mais « Compte à rebours » est le second tome de la série « Metropol » entamée avec « Corps-à-corps ». Cette mention était alors bien précisée en couverture, mais là, en dehors de la page du livre sur le site éditeur, il n’en est pas fait état. Cette série s’attache à l’ex-boxeur Harry Kvist dans le Stockholm des années 1930.
Ne pas avoir lu « Corps-à-corps » n’est en rien gênant pour s’attaquer à « Compte à rebours ». Le titre fait référence à la semaine qu’il faut à Harry pour retrouver Gusten. En plus, il lui a promis un costume à sa libération. Pour ce jeune homme, Harry entrevoit la vie différemment et désire lui offrir une situation, ce qui est louable et montre son attachement.

Deux points dominent ce roman : Harry Kvist et la ville de Stockholm des années 1930.
Martin Holmén n’offre pas aux lecteurs un personnage central sympathique. Il est quasi impossible de se prendre d’affection pour lui ; même lorsqu’il affiche ses sentiments pour Gusten, il parvient à peine à apitoyer les lecteurs. Il faut dire qu’il est antipathique en diable, sa réputation il la doit à ses poings, à son passé de boxeur et de recouvreur de dettes musclé. Il suffit de voir comment il traite un témoin qui a vu le corps de Beda évacué pour le prendre en grippe. La politesse, il ne connaît pas, il cogne d’abord et pose les questions ensuite. Il fume ses cigares partout, boit trop d’alcool, mais ce constat colle un peu à son époque où les plaisirs devaient être rares et où la fuite du quotidien obéissait à ces petits plaisirs.
Dans son portrait, tout n’est pas noir, car il s’attache à la promesse faite à Beda et n’abandonne pas Petrus à son sort. De plus, connaître la vérité prime sur toutes autres considérations et, quand la situation devient trop dangereuse, il cherche à épargner Elin, la demi-sœur de Petrus. Un gamin peut aussi le ramener dans sa propre enfance et le pousser à aider son prochain.
Martin Holmén en a aussi fait un homme préférant les hommes que les femmes, ce qui en ce temps-là était très mal vu. Gusten le pousse à changer, à chercher la respectabilité. Ce qu’il n’aurait pas fait pour lui, il le fait pour son compagnon.
Harry Kvist se révèle un personnage fort, marquant, obligé de surnager dans des conditions difficiles en se basant sur ses points forts.

Le contexte est très bien rendu par Martin Holmén. À force détails, il dépeint Stockholm en 1935, il donne vie à la ville, n’hésitant pas à nommer les quartiers, les rues. Même si les dénominations sont difficiles à prononcer pour nous, Français, et n’évoquent rien en sus, cela donne un indéniable cachet et apporte un gage d’authenticité. D’ailleurs Martin Holmén est professeur d’histoire et il a consacré trois années aux recherches pour dresser un portrait réaliste du Stockholm des années 1930. Le résultat s’en ressent, il est sérieux, appliqué et aussi sans concessions. Le cadre s’avère sombre, noir, dur pour la majorité. Lundin, le croque-mort et ami de Harry, a du travail, mais à quel prix ! Sa santé est vacillante, rien que se lever lui prend une plombe. Personne n’est épargné par les conditions difficiles.

Dans ce contexte, le récit ne pouvait guère receler d’espoir ou si peu. Fouiller le passé de Beda comporte de nombreux dangers, d’autant que Harry quitte son milieu défavorisé. Qu’importe pour lui, il n’obéit à aucune règle et n’est pas du genre à baisser la tête. De toute sa carrière, il n’a jamais été compté, alors ce n’est pas maintenant que cela arrivera ! La fin reste ouverte, tout n’est pas soldé, bien des réponses demeurent en suspens. Rien d’étonnant, car il s’agit d’une trilogie consacré à Harry Kvist. Ce dernier n’a pas fini de recevoir des coups ni d’en donner. Et pour un gars comme lui, il ne semble pas y avoir de salut comme en témoigne la conclusion implacable mais logique.

Martin Holmén fait remonter le temps aux lecteurs grâce au Stockholm de 1935 très bien rendu. Il n’a pas choisi la facilité en prenant comme personnage central Harry Kvist, un homme antipathique au possible mais abritant tout de même des parcelles de bonté. « Compte à rebours » est sombre, noir, violent, un peu à l’image de cette époque où suivant sa condition, la vie pouvait être très difficile et que tous les moyens étaient bons pour survivre.
Par son contexte et les péripéties d’Harry, ce roman se révèle prenant et pousse à s’intéresser aux autres volumes de cette trilogie. Si « Corps-à-corps », le premier volet est bien sûr disponible, il reste à attendre la traduction du dernier.
À suivre...


Titre : Compte à rebours (Nere för räkning, 2016)
Série : Metropol, tome 2
Auteur : Martin Holmén
Couverture : © Miroslav Sokcic
Traduction du suédois : Marina Heide
Éditeur : Hugo et Compagnie
Collection : Hugo Thriller
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 352
Format (en cm) : 14 x 21
Dépôt légal : juin 2017
ISBN : 9782755629736
Prix : 19,95 €


Pour écrire à l’auteur de cet article :
[email protected]


François Schnebelen
21 juin 2017


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