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Derniers jours du Paradis (Les)
Robert Charles Wilson
Gallimard, collection FolioSF, n°556, traduit de l’américain, science-fiction, 394 pages, août 2017, 7,99€

Après une série de romans ambitieux (la trilogie « Spin »), Robert Charles Wilson revient aux classiques du genre, pour une variation sur un thème déjà abondamment décliné.



Cassie, une jeune fille de dix-sept ans, est témoin devant chez elle d’un accident de la route bien étrange. Du corps de la victime s’écoule certes un peu de sang, mais surtout un bien étrange liquide verdâtre. La jeune fille s’empare d’une valise déjà prête sous son lit, remplit un sac d’aliments, réveille son petit frère et quitte à tout jamais son domicile.

Cassie sait que cette étrange créature était là pour elle. Pour la tuer. Car quelques années plus tôt, en 2007, ses parents et d’autres membres de la « Correspondence Society » ont été assassinés par de telles créatures. La « Correspondence Society » : un groupe de scientifiques qui a pignon sur rue – et dont on fait partie des savants de renom comme Alan Turing, Dirac, von Neumann, Fermi – mais qui travaille secrètement sur une thèse inconnue du grand public. Une thèse, mais aussi une réalité. La radiosphère, qui entoure l’atmosphère et qui permet la propagation des ondes radio, est habitée par une colonie d’entités microscopiques, invisibles, des entités individuellement sans personnalité mais qui prises ensemble constituent, à la manière une colonie de fourmis, un superorganisme dont l’intelligence collective se révèle considérable. Pas une intelligence au sens humain du terme, mais une organisation d’un ordre différent, et qui manipule l’humanité.

En, effet, en ce vingt et unième siècle, nous sommes dans un futur alternatif. Les avions sont le plus souvent à hélices, les plus modernes à réacteurs. L’histoire du vingtième siècle n’apparaît qu’en filigrane mais diffère sensiblement de la nôtre. Pas de téléphones portables ni d’ordinateurs, beaucoup de conflits locaux mais pas de guerre mondiale : en modifiant subtilement les signaux radios et les émissions télévisées, l’hypercolonie manipule en effet l’humanité de façon à ce qu’elle soit moins belliqueuse. Une sorte de symbiose dont, par définition, les deux parties seraient bénéficiaires : moins de guerres pour les hommes, une discrète ponction de produits manufacturés nécessaires à sa reproduction pour l’hypercolonie.

Mais les choses ne sont pas si simples. Peut-on parler d’accord mutuellement bénéfique alors que l’hypercolonie envoie de faux humains assassiner les membres de la Correspondence Society afin que son existence ne soit pas révélée au grand jour ? Quels sont ces faux humains qui tentent, peut-être, de manipuler la Correspondence Society en affirmant qu’ils sont eux-mêmes des parasites de l’hypercolonie et qu’ils souhaitent avant tout la détruire ? Tous les éléments sont en place pour un étonnant road-movie, une course folle depuis l’Amérique du Nord jusqu’au désert d’Atacama où tout se jouera. Un thriller qui ne pourra qu’être lourdement teinté de paranoïa dans la mesure ou chaque membre de la Correspondence Society peut être un imposteur lui aussi empli de ce fameux liquide verdâtre qui signe les espions tueurs de l’hypercolonie.

Des personnages sympathiques – une adolescente, un enfant, un entomologiste auteur d’un ouvrage remarquable, « Le Pêcheur et l’araignée », dont des extraits éclairent la thématique de ce roman, un paranoïaque intégral qui a peut-être raison – emportent le lecteur tout au long de cette science-fiction très classique qui pourrait très bien avoir été écrite à l’âge d’or du genre et, à quelques détails près, se dérouler dans les années cinquante ou soixante. On trouvera dans ce roman plus d’un écho du roman de Jack Finney, « Invasion of the body snatchers » (1955), connu en France sous les titres de «  Graines d’épouvante » ou de «  L’Invasion des profanateurs », et qui a connu plusieurs adaptations cinématographiques (Don Siegel, 1956, Philip Kaufman, 1978, Abel Ferrara, 1993). Difficile également de ne pas songer à certains romans de John Wyndham (ce n’est sans doute pas un hasard si ce roman fait allusion à un vétérinaire du même nom.)

Comme l’écrivait François Schnebelen dans sa chronique à l’occasion de la sortie de ce roman dans la collection Lunes d’Encre dirigée par Gilles Dumay, «  Les Derniers jours du Paradis » apparaît comme une œuvre secondaire dans la bibliographie wilsonienne. Reste donc un roman agréable et facile à lire, au parfum un peu ancien, qui n’est pas non plus sans évoquer le grand Clifford D. Simak (dont Robert Charles Wilson se rapproche assez souvent, ainsi du remarquable « A travers temps » que l’on jurerait avoir été écrit par Simak lui-même), une sorte de récréation pour l’auteur et de re-création de science-fiction classique sur le thème du « Ils sont parmi nous ». Notons, pour finir, quelques erreurs de traduction, et ceci jusque dans le paragraphe final de remerciements. Ainsi, lorsque l’auteur parle de faire justice à ses amis et à sa famille (c’est-à-dire les tuer), il s’agissait bien entendu de leur rendre justice (c’est-à-dire reconnaître leurs mérites) ce qui n’est pas tout à fait la même chose.


Titre : Les Derniers jours du Paradis (Burning Paradise, 2013)
Auteur : Robert Chalres Wilson
Traduction de l’américain : Gilles Goullet
Couverture : Manchu
Éditeur : Folio (édition originale : Denoël, 2014)
Collection : Folio SF
Site Internet : page roman
Numéro : 556
Pages :394
Format (en cm) :
Dépôt légal : août 2016
ISBN : 97820792276
Prix : 7,99 €



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Hilaire Alrune
19 février 2017


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