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Young Elites, tome 1 : Young Elites
Marie Lu
Castelmore, roman traduit de l’anglais (USA), fantasy, 280 pages, juin 2015, 16,90€

XIVe siècle, royaume îlien de Kenettra. Adelina Amouterou est la fille aînée d’un marchand dont les affaires périclitent. Un soir, elle surprend son père accepter de la vendre à un noble, avant sa majorité, pour en faire sa maîtresse. Elle décide de s’enfuir, parce que c’est la goutte d’eau.



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Adelina est une malfetto. Lorsque 10 ans avant, la fièvre du sang a ravagé le pays, tuant de nombreux adultes, certains enfants ont suvécu, au prix de marques plus ou moins visibles. Adelina a perdu un œil et ses cheveux et sourcils ont viré au gris argent. D’abord considérés comme miraculés, les malfetto sont vite devenus, vous vous en doutez, des boucs émissaires pour tous les malheurs du monde.
Et parmi les malfetto, il y a les Elites : un petit nombre d’adolescents à avoir développer d’étranges et terrifiants pouvoirs. Il sont traqués par l’Inquisition, qui n’aiment pas trop les marqués en temps normal, et les gens capables de s’opposer à eux et au pouvoir en place, encore moins.
La nuit où elle fugue, Adelina déclenche son pouvoir, et tue son père. Condamnée au bûcher, elle est sauvée des flammes par la Confrérie de la Dague, un groupe d’Elites mené par Enzo, le prince légitime.
Emportée à la capitale, Estenzia, Adelina va apprendre à maîtriser son pouvoir (provoquer des apparitions cauchemardesques) grâce à Enzo et Raffaele. Mais Teren, le Grand Inquisiteur, la retrouve, et la contraint à espionner les Dagues pour son compte, sinon il torturera Violetta, la petite sœur d’Adelina. Cruel dilemme pour la jeune fille.

Anakin au Quattrocento

Car Adelina n’est pas une oie blanche. Ainsi que lui explique Raffaele, elle tire son pouvoir de la peur et de la colère (les siennes et celles des autres), et son ambition comme sa passion influe fortement sur sa puissance. Toute son enfance l’a forgée ainsi : son père, faute de pouvoir bien marier une malfetto, a tenté, par la douceur puis la force, de réveiller un pouvoir en elle, pour la vendre à l’Inquisition. Mais sans jamais provoquer l’électrochoc suffisant. Il faudra qu’il essaie de la tuer ce soir d’orage, et il en paiera le prix...
Toute l’ambivalence d’Adelina naît de sa relative fragilité, de ses hésitations, de ses peurs (de la douleur, du rejet surtout) et de son ambition et de sa soif de revanche après la découverte de son pouvoir : plusieurs fois, emportée par la colère elle rêve de faire souffrir ses contradicteurs. Cette rage en elle nourrit un pouvoir qui effraie Raffaele et captive Enzo.
Parlons d’eux, justement : Enzo a été écarté de la succession au profit de sa sœur, Giulietta, une sal... manipulatrice qui n’a rien à envier à Cersei Lannister (et qui couche avec Teren, l’Inquisiteur, pour mieux s’assurer sa fidélité). Il contrôle le feu. Raffaele est le « savant » du groupe : son pouvoir lui permet d’analyser les talents des autres et de contrôler les émotions. Il met très tôt en garde Enzo sur la dangerosité d’Adelina.
Raffaele est intéressant sur un autre point : son métier. Il est consort. Courtisan. Prostitué. C’est dans l’établissement où il officie (à des tarifs exorbitants), la Cour de Fortunada, qu’il cache Adelina après son sauvetage. C’est l’occasion pour l’autrice de parler de nombreux sujets (la prostitution, la violence, le besoin de protection) en inversant les genres, tout comme elle inverse les rôles avec son héroïne, méchante et rebelle malgré ses sentiments pour le prince.

On a tout de même quelques passages obligés, comme la romance contrariée et cette longue hésitation d’Adelina entre révéler la vérité aux Dagues (quitte à encourir le rejet d’Enzo) et les trahir. La puissance de ses sentiments la pousse aux extrêmes, notamment pour se venger de Dante, un Elite qui digère mal qu’elle lui ait volé la place de chouchou du prince. Quand en plus il la suspecte de jouer double jeu, ses scrupules s’envolent.
Mais cela nous conduit à un finale fracassant, dont je ne vous dit rien. Le dernier quart du roman se lit d’une traite, parce qu’on sent bien que le pouvoir du nouvel Elite apparu tombe trop à pic pour que tout se passe bien.
Sachez juste, en esquisse du tome 2 sorti ce printemps, qu’Adelina fera cavalier seule, le divorce sera consommé.

« Young Elites » est mené tambour battant, entre des scènes d’action boostées aux superpouvoirs, des passages introspectifs glaçants sur la jeunesse de l’héroïne, une trame politique certes légère mais réjouissante. L’ambiance italienne du Quattrocento, qu’on retrouve dans le vocabulaire, l’architecture et les costumes ne souffre que d’une imperfection, la « nécessaire » conservation du titre anglais. Le « young » est cependant rapidement éludé pour ne conserver qu’un « Elite » qui passerait presque pour italien.

La « méchanceté » d’Adelina, son indépendance, son besoin de contrôle, de domination (qui sont les nôtres aussi, ne nous leurrons pas) sont en tout cas très rafraîchissants dans la littérature ados/jeunes adultes, aux héros souvent plus positifs.
L’épilogue laisse imaginer une hausse du niveau de jeu entre pouvoirs politiques et différents groupes d’Elites. Du bon en prévision, dont on vous parlera sous peu !


Titre : Young Elites
Série : Young Elites, tome 1
Auteur : Marie Lu
Traduction de l’américain (USA) : Olivier Debernard
Couverture : Alexandra V BAch
Éditeur : Castelmore
Site Internet : page roman (site éditeur), un wiki sur l’univers des romans (en anglais)
Pages : 280
Format (en cm) :
Dépôt légal : juin 2015
ISBN : 9782362311482
Prix : 16,90 € ou 9,99€ en numérique


La trilogie Young Elites
- Young Elites
- La Confrérie de la Rose
- L’Etoile de Minuit


Nicolas Soffray
8 septembre 2016


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