
Le récit débute doucement, à l’ombre des arbres de l’ambassade, en sirotant tranquillement un verre, avant le départ pour l’aéroport et un brusque déchaînement de violence. Du calme à la tempête ! Puis une fuite alternant les moments calmes avec de nouvelles montées d’adrénaline sous les coups de feu.
Entre passé et présent, l’histoire de chacun apparaît parsemée de taches indélébiles, avec lesquelles il faut vivre et qu’il faut surtout assumer. Fred Duval se sert du parcours des deux protagonistes pour montrer la situation géopolitique ambiguë du pays et dénoncer la présence envahissante de l’ancienne puissance coloniale estimant toujours avoir un droit d’ingérence. Martin n’est pas l’homme qui transparaît tout d’abord, il est dangereux et sans pitié, obéissant aux ordres. Il fait bien sûr penser à des espions célèbres, mais sans nous pousser à la comparaison.

“Constantine” mêle action brute de décoffrage, affichée à la vue de chacun, sans que la réaction des autorités soit proportionnée à la menace, avec des propos intelligents explicitant la situation récente du pays. Le scénariste apporte une touche plus personnelle quand une victime expose son cas. Le récit s’avère très prenant, aussi bien par son déroulement mouvementé que par ses pages plus intimistes pour l’information des lecteurs. Le procédé passe très bien et touche parfaitement sa cible.

Au dessin, Stéphane Créty nous livre un Martin aux traits acérés comme une lame, ce qui pose bien le personnage. Il ne tombe pas dans l’écueil d’une copie trop réaliste, permettant de garder une certaine distance avec la réalité. Avec la colorisation, son travail fonctionne très bien, le tout sachant alterner et traduire les ambiances. Dès le début, il nous en met plein la vue avec la ville de Constantine, avant des scènes pleines de bruit et de fureur, servies par un découpage efficace.
Prévu comme un diptyque, “Nom de code : Martin” s’impose avec le premier volet “Constantine”, comme une BD alliant action et réflexion sur un pays en pleine transformation, dans lequel concilier présent et passé s’avère compliqué. Le résultat est aussi prenant qu’instructif.
Espérons que la conclusion, “Hoggar”, tiendra toutes ses promesses.
(T1) Constantine
Série : Nom de code : Martin
Scénario : Fred Duval
Dessin : Stéphane Créty
Couleur : Jérôme Maffre, assisté par Guillaume Grzeczka
Éditeur : Delcourt
Collection : Neopolis
Pagination : 56 pages couleurs
Dimensions (en cm) : 24 x 32
Dépôt légal : 30 mars 2016
ISBN : 978-2-7560-7255-5
Prix public : 14,95 €
Illustrations © Stéphane Créty & Delcourt (2016)