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Sur les traces de Garcia Lorca
Carlos Hernandes et El Torres
Vertige Graphic

1936, Pedro Tomas Hernandes Redondo se prépare à fuir Grenade avec sa famille. La situation de la ville n’est plus supportable pour ceux qui n’adhèrent pas aux idées défendues par les troupes phalangistes. Tomas a vu ses amis disparaître les uns après les autres, d’abord José Palanco, puis Jesus Yoldi. Et puis il y eut l’arrestation de Garcia Lorca. Le fils de Tomas aimait jouer et discuter avec l’artiste qu’était Garcia Lorca, mais Tomas sait parfaitement qu’être arrêté par les fanatiques de Franco est synonyme d’une seule chose : la mort. Il est temps qu’il parte de Grenade avec sa famille. Heureusement, une connaissance lui a fourni un laisser-passer permettant de franchir les barrages érigés par les phalangistes mais surtout d’éviter une arrestation sommaire...



Garcia Lorca... dire qu’en 1929, le poète espagnol était la personne qu’il était bon d’avoir dans ses soirées. Comme lors de cette fête organisée par Nella Larsen, écrivain d’Harlem, qui n’hésita pas une seconde pour inviter ce blanc espagnol qui non seulement était un grand poète mais également un pianiste particulièrement doué. Federico n’eut pas beaucoup de mal à séduire les invités présents, laissant libre cours à la désinhibition des hommes et des femmes. Mais si Garcia Lorca était reconnu et adoré outre-Atlantique, son propre pays ne le voyait que comme un marginal prônant des idées révolutionnaire et contre nature. Pourtant, certains avaient un tout autre souvenir de Garcia Lorca, comme celui d’un enfant plutôt réservé qui parvenait à s’entourer d’amis capables de le protéger quand cela devenait nécessaire... sauf, malheureusement, au moment où il aurait tant fallu le faire...

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Federico Garcia Lorca est une figure marquante de l’Espagne de la première moitié du XXe siècle. Artiste complet, Garcia Lorca était à la fois poète réputé, pianiste, compositeur et peintre. Ultra moderne pour son époque, il était l’incarnation de tout ce que pouvait détester les franquistes : homosexuel, beau, talentueux, cultivé, particulièrement intelligent et surtout aux pensées tournées à gauche. Le malheur de cet artiste incontournable fut de vivre au moment de la prise de pouvoir de Franco en Espagne. Il paya du prix le plus cher sa liberté de pensée et d’agir : il fut exécuté par les troupes phalangistes en 1936. Alors que le monde reconnaissait son talent, son propre pays bannissait ses œuvres et interdisait que l’on évoque même son nom. Il faudra attendre la chute de Franco pour que les œuvres de Garcia Lorca sortent enfin de la clandestinité dans son pays. Toutefois, un certain mystère demeure sur le lieu exact où a été assassiné Federico Garcia Lorca, certains experts remettant en cause le fait que l’auteur fasse partie des corps retrouvés dans la fosse commune du champ d’Alfacar.

En s’attaquant à ce monstre sacré à la vie sulfureuse et à la fin tragique, Carlos Hernandes devait marquer les esprits par une BD qui ne serait pas une simple biographie. Carlos Hernandes a donc choisi de reprendre dans “Sur les traces de Garcia Lorca” douze événements en lien avec Garcia Lorca et, plus précisément, quasiment la moitié en lien avec son exécution. En fait, les saynètes illustrant la vie de Garcia Lorca nous montrent tout ce qui a pu le faire détester par l’intelligentsia bien pensante et fascisante de l’Espagne de Franco. Carlos Hernandes nous fait raconter Federico Garcia Lorca par des personnes l’ayant croisé ou ayant même partagé sa vie controversée, lui l’artiste homosexuel affichant ses penchants et son attirance pour les milieux gauchisants. On retrouvera par le hasard des rencontres Salvador Dali et Luis Bunuel, ce dernier apparaissant comme un artiste égocentrique et jaloux de Garcia Lorca. La structure de cet album n’est pas linéaire, Carlos Hernandes faisant des allers-retours dans le temps pour rappeler pourquoi Garcia Lorca a pu être ainsi arrêté et exécuté comme tant d’autres victimes de l’épuration franquiste.

Le lecteur vit tout particulièrement les derniers instants de Garcia Lorca, apprend des éléments sur la vie de ce grand poète et peut même découvrir une de ses œuvres, le poème “Mort à l’Aube”, qui clôture ce livre, en espagnol et traduit en français. Le style graphique de Carlos Hernandes mélange des personnages réalistes et des personnages plus caricaturaux, chaque chapitre étant introduit par un portait de Garcia Lorca, seul ou avec des amis, uniquement à l’encre noire. La mise en couleur est très simple : le sépia ombrage l’encrage pour donner ce côté de livre ancien et de recueil de souvenirs. La guerre est omniprésente mais jamais vraiment présentée, les phalangistes faisant quelques apparitions mais le feu du combat n’étant présenté que par ses conséquences et non au cœur de l’action. D’ailleurs, l’exécution de Garcia Lorca ne sera pas montrée car l’auteur ne présente que ce que les témoins de vie du poète ont vu. Et le seul qui aurait pu, en fait, nous raconter ce moment tragique, n’apparaît que dans un événement récent.

“Sur les traces de Garcia Lorca” est plus une rencontre originale et tragique avec cet artiste de grand talent qu’était Federico Garcia Lorca qu’une biographie pour tout connaitre de sa vie. Mais nul doute que le lecteur ayant terminé cet album cherchera à mieux connaitre l’artiste tout autant que l’homme hors du commun qu’il était.


Sur les traces de Garcia Lorca
- Scénario  : Carlos Hernandes, El Torres
- Dessin et couleurs : Carlos Hernandes
- Traduction : Elsy Gomez
- Éditeur : Vertige Graphic
- Format :17 x 24 cm
- Pagination : 112 pages
- Numéro ISBN  : 978-2849991176
- Dépôt légal : 26 novembre 2015
- Prix public : 18 €


Illustrations © Editions Vertige Graphic - Tous droits réservés



Frédéric Leray
29 novembre 2015




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