“La colonie” conte l’histoire des survivants du Victoria III sur cette nouvelle Terre.
Pour ceux qui lisent un tant soit peu de science-fiction, il y a de quoi grincer des dents à plus d’une reprise. Il suffit d’ouvrir l’album pour découvrir un plan du vaisseau, ce qui est une bonne idée en soi, mais il est précisé que les propulseurs permettent de voyager au-delà de la vitesse de la lumière. Pas de portes spatio-temporelles, de trous de ver ou autres astuces pour contourner les lois de la relativité d’Eisntein, ici la poussée suffit !
Le vaisseau s’écrase au sol sans être entièrement pulvérisé, il reste même relativement intact. L’atmosphère au sol est respirable. Quand Élise rencontre des autochtones, elle ne s’étonne guère qu’ils parlent la même langue. D’ailleurs les deux espèces ne sont pas sans points communs... C’est là que l’on pourrait se dire que le Victoria a fait une boucle et que sa vitesse relativiste leur offre une Terre purgée de l’humanité.
Philippe Ogaki ne s’encombre guère de vraisemblances. “Terra Prime” nous ramène à l’âge d’or de la SF.
Et pourtant, le lecteur se prend au jeu, il dépasse ces incohérences pour s’immerger dans le récit. Le débat à bord du vaisseau avec les camps qui s’opposent sur la suite à donner à la mission première éveille tout de suite la curiosité, d’autant que chacun cherche finalement à assoir son pouvoir, ne désire pas ouvrir le dialogue. Le maire n’a pas dans l’idée d’abdiquer, d’abandonner sa position dominante comme il le prouvera tout au long du récit. Il s’agit d’une personne butée qui oblige la majorité à adopter son point de vue.
Élise est une héroïne qui attire tout de suite la sympathie. Belle, intelligente, gentille, elle montre la voie à suivre pour vivre sur la planète. Elle étudie la flore locale et n’hésite pas à protéger un autochtone, avant d’aller bien plus loin pour échapper à la bêtise du maire.
En dépit des facilités mises au service du récit, le scénario s’avère prenant et le lecteur vibre pour Élise, tout en vouant le maire aux gémonies. La première partie dans l’espace a permis d’asseoir les personnages, avant de pleinement les révéler en surface pour le meilleur et le pire
Graphiquement il n’y a rien à reprocher à Philippe Ogaki. “La colonie” montre tout son talent de dessinateur et de créateur. Il s’avère aussi à l’aise dans la partie futuriste avec la ville à bord du Victoria III ou les aménagements en surface, que dans l’élaboration de paysages à la flore étrange inventée de toute part et qui nous emportent ailleurs. Plus d’une fois, on arrête la lecture pour mieux profiter des dessins et laisser notre imagination s’envoler, rêver à ces lieux enchanteurs. Ogaki possède un fort pouvoir d’évocation et il magnifie l’héroïne qui éclaire les pages de sa présence.
Une fois ce premier tome de “Terra Prime” achevé, il nous reste en mémoire la beauté de cette planète, d’Élise qui y a trouvé sa place, ainsi que la fourberie du maire. Philippe Ogaki a particulièrement soigné l’esthétique de son album et “La colonie” est une réussite sur ce point, nous faisant quasi oublier les quelques incohérences d’un scénario plus proche d’une SF old school qu’actuelle.
Qu’importe, le plaisir est bien présent et on tremble d’avance aux prochains développements de l’histoire dont la suite est programmée pour le premier semestre 2016.
(T1) La colonie
Série : Terra Prime
Scénario & dessin : Philippe Ogaki
Couleurs : Linda Aksonesilp & Philippe Ogaki
Éditeur : : Delcourt
Collection : Néopolis
Dépôt légal : 28 janvier 2015
Format : 19 x 28,3 cm
Pagination : 120 pages couleurs
Numéro ISBN : 978-2-7560-4054-7
Prix public : 16,95 €
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