Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Dose (La)
Melvin Burgess
Gallimard, Scripto, traduit de l’anglais (Grande-Bretagne), fiction, septembre 2014, 14,90€

Le Raid. Une nouvelle drogue jusqu’à présent inégalée, un cadeau fabuleux pour les perdants, pour ceux qui n’ont aucun avenir, ou qui sont persuadés de ne pas en avoir. Ses effets se prolongent sur une semaine entière : une semaine fabuleuse pendant laquelle on verra se réaliser ses rêves les plus fous. Oui, très bien, mais après, l’on meurt. Inévitablement. Mais comme la société n’a pas grand-chose à offrir aux jeunes, n’est-ce pas là la véritable solution ? Vivre mille fois plus vite, mille fois plus fort, et ensuite décamper à jamais ?



Le grand dérapage commence avec l’annonce de la consommation du Raid par Jimmy Earle, la pop star du moment, qui a promis d’offrir ses derniers instants à ses fans : après une semaine de folie, au sujet de laquelle courent les plus folles rumeurs, il mourra en plein concert. À ce concert, tout le monde se précipite, même si personne n’y croit. Il s’agit bien évidemment d’un simple coup de pub. Pourtant, la star tient ses promesses et lâche la rampe devant ses milliers de fans.

Il n’en fallait pas plus pour déclencher des émeutes à Manchester, qui mettent la ville à feu et à sang. Adam, qui vient d’assister à la mort du chanteur, se laisse un moment emporter par le mouvement. Quelle excitation que ces émeutes ! Mais il a également d’autres centres d’intérêt ; sa petite amie Lizzie, d’un milieu odieusement riche alors qu’il est odieusement pauvre, et ne pense pouvoir s’en sortir un jour qu’en devenant footballeur professionnel. Mais l’annonce de la mort de Jess, grand frère d’Adam, et seule ressource de la famille, va pousser Adam à commettre l’irréparable : après une rencontre brutale avec d’autres classes sociales, par désespoir, Adam avale une gélule de Raid.

Si la situation d’Adam est complexe et désespérée, celle de la société n’est guère meilleure. Qui sont réellement les Prosélytes, ces révolutionnaires à faces de rat qui vont jusqu’à commettre des attentats suicides ? Est-il vrai par ailleurs que des gélules de Raid ont été distribuées gratuitement dans les rues à l’issue du concert fatal ? Jess était-il réellement un Prosélyte, ou sa mort a-t-elle été accidentelle ? Autant d’éléments, qui, par effet de domino, font vaciller le pouvoir en place.

L’intrigue se complique alors d’une histoire de grand banditisme, inévitable lorsque l’on entre dans la thématique des drogues, et destinée sans doute à apporter son lot de problématiques et de péripéties, mais qui donne également l’impression que l’auteur recule devant l’arrière-plan socio-politique qu’il avait commencé à mettre en place, et qui restera toujours assez flou, comme une toile de fond, avant de revenir sur le devant de la scène pour les chapitres finaux. Une fin en « happy end » après toute une série de mésaventures passablement crues, violentes et dramatiques manifestement destinées à expliquer aux jeunes lecteurs les dangers du monde réel.

« La Dose » est-il finalement un roman à message ? Sans doute oui, parce que la conclusion va clairement à l’encontre du « no future » et que l’avenir apparaît en définitive comme quelque chose que l’on doit écrire soi-même. Mais peut-être pas tout à fait, parce que les moyens ne sont pas forcément les bons, les voies choisies par les protagonistes, pour irréfléchies qu’elles soient, n’apparaissent en définitive pas toujours comme des erreurs, ou pas comme des erreurs irréversibles, ce qu’elles le seraient sans doute dans le monde réel. Peu importe, au demeurant : ce qui compte, ce qui reste, ce sont les conclusions qu’en tireront les adolescents eux-mêmes, les interprétations qu’ils feront de ces aventures. En ce sens, « La Dose » atteint ses objectifs : par le biais de la fiction, mettre en scène les pièges et embûches du réel, et pousser les jeunes lecteurs à s’interroger sur la manière dont ils décideront, ou non, de construire leur propre existence.


Titre : La Dose (The Hit,2013)
Auteur : Melvin Burgess
Traduction de l’anglais (Grande-Bretagne) : Laetitia Devaux
Couverture : Steve Wells
Éditeur : Gallimard
Collection : Scripto
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 280
Format (en cm) : 13 x 20
Dépôt légal : septembre 2014
ISBN : 9782070655854
Prix : 14,90 €



Hilaire Alrune
26 septembre 2014


JPEG - 11.3 ko



Chargement...
WebAnalytics