A 23 ans, de nombreux critiques n’hésitent pas à comparer Samantha Shannon à J.K. Rowling. Une charge lourde pour une jeune femme au vu du succès de l’auteure en question. « Bone Season » est son tout premier roman et a déjà été traduit dans une vingtaine de langues. De quoi, effectivement, alimenter la comparaison.

L’histoire se situe en Grande-Bretagne. L’héroïne est irlandaise mais vit à Londres où elle tente de cacher son « anormalité ». Depuis quelques années, la jeune femme a compris qu’elle avait accès à l’Éther, ce qui fait d’elle une clairvoyante. Son don particulier la rend même particulièrement recherchée dans son milieu. Elle s’est placée sous la protection d’un Seigneur-mime et gagne sa vie au sein de la pègre. Cela ne l’empêche pas de devoir se cacher de la société dans laquelle elle vit, mais lui simplifie tout de même un peu l’existence. Au sein de la société de Scion, les gens comme elle sont effectivement considérés comme des anormaux. À ce titre, ils sont traqués, pourchassés jour et nuit, enfermés, torturés, exécutés. En tout cas, c’est ce que Scion raconte tout en exhortant la population normale à la délation.
Une fois capturés, les clairvoyants qui survivent se retrouvent confiés aux Réphaïms. Ces créatures ne correspondent à rien de ce que l’on a l’habitude de voir dans la littérature fantastique traditionnelle. Les plus proches sont probablement les fés tels que présentés dans « Ne Jamais Tomber Amoureuse » ou dans « Les Outrepasseurs ». Sous couvert de protéger la planète contre des envahisseurs venu de l’Outremonde, les Réphaïms réduisent les clairvoyants en esclavage. Paige refuse cet état de fait et, tout en tirant le maximum de ce séjour, elle va surtout chercher le moyen de s’enfuir et de s’émanciper de toute forme d’autorité.

L’idée de base du roman est originale, ce qui est déjà assez rare par les temps qui courent. L’univers parapsychique est relativement peu utilisé en littérature, adulte comme jeunesse, ce qui laisse une grande liberté aux auteurs en général. D’ailleurs Samantha Shannon semble avoir décidé de se cantonner aux dons médiumniques, pas de télékinésie, juste de la voyance et, pour certains, la capacité d’utiliser leur esprit comme une arme. Voici pour les humains. Pour les Rephaïms, l’auteure n’est pas très claire sur ce qu’ils sont. Sur la fin de ce premier tome, le lecteur aura un sérieux doute sur leur… composition. Cette espèce se rapproche du mythe des fés en ce qu’ils considèrent les hommes comme inférieurs, et ils ont accès de façon beaucoup plus facile et efficace aux mêmes capacités parapsychiques que les humains. Ils les utilisent donc comme serviteurs, manœuvres ou guerriers. Le fait que l’un de ses voyants, présentant des capacités exceptionnelles, se rebelle contre le système n’a rien de bien exceptionnel.
L’explication donnée à l’Éther et aux dons présentés par les humains tient la route, cependant la raison de la présence des Réphaïms est vite expédiée et laisse à désirer. Fort heureusement, il s’agit de la seule vraie faiblesse du récit. En dehors de cela, les personnages principaux sont attachants, leurs personnalités et individualités bien dessinées et la dynamique entre les gens et les espèces, pour le coup, tout à fait cohérente. L’action ponctue régulièrement le récit, ce qui donne une histoire sans gros ralentissement.

Un excellent premier ouvrage qui mérite amplement l’accueil qui lui a été réservé. Il faudra, bien sûr, attendre la fin de la série pour confirmer la qualité littéraire de l’auteure mais, dans l’immédiat, Samantha Shannon pourrait devenir le prochain auteur à succès.

Titre : Saison d’Os (Bone Season, 2013)
Série : Saison d’Os (Bone Season), tome 1
Auteur : Samantha Shannon
Traduction de l’anglais (Grande-Bretagne) : Benjamin Kuntzer
Couverture : David Mann
Éditeur : J’ai Lu
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 568
Format (en cm) : 13 x 18,9 x 4,1
Dépôt légal : mai 2014
ISBN : 9782290071045
Prix : 13,90 €