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De l’autre côté de la nuit
Mel Andoryss
Castelmore, roman-France, fantastique, 317 pages, janvier 2014, 10,90€

« Les Enfants d’Evernight », c’était jusqu’à présent une bande dessinée de Mel Andoryss et Marc Yang en deux volumes chez Delcourt. Mais si Mel Andoryss a repris la plume, ce n’est pas à l’occasion d’un nouveau scénario, mais pour un passage à la forme romanesque. Si les romans transposés en bandes dessinées sont nombreux, la transition inverse n’apparaît pas particulièrement fréquente.



De l’autre côté de la nuit : un monde étrange où vivent essentiellement des animaux dotés d’intelligence, et par lequel de très rares enfants humains transitent. Ainsi en est-il de Mathias, qui y est devenu Maître du Temps, de Maximilien, le Marchand de Sable, et de North, la Vendeuse de Nuit. Les enfants humains n’y sont à vrai dire pas vraiment désirables, car ils y sont toujours les artisans de grands changements ; aussi, lorsque la jeune Camille se réveille dans ce monde, elle devient très rapidement l’enjeu d’une convoitise à laquelle elle ne comprend rien. Il semble que certains essaient de la capturer, que d’autres souhaitent à tout prix s’en défaire, que d’autres encore veuillent la cloîtrer dans un orphelinat.

Le récit commence sur un mode résolument steampunk, avec fiacre et profusion de montres et d’engrenages, continue sur le mode futuriste avec l’entrée en scène d’une jeune fille et hybride génétiquement modifiée venue du futur, puis, avec ces mêmes composantes, se poursuit dans un monde évoquant surtout un film d’animation, essentiellement habité par des animaux aux comportements humains, et même agrémenté de créatures habituellement aquatiques s’ébattant entre les nuages, créatures qui, elles, semblent n’avoir qu’un rôle purement décoratif.

« De l’autre côté de la nuit  » apparaît donc comme le fruit d’un vaste mélange d’inspirations et d’emprunts à des types de fictions et à des thématiques différentes. Le lecteur a par moments l’impression de tracer son chemin, en même temps que Camille, à travers une œuvre composite. Et la surprise de fin – qui donc est le mystérieux Sam qui est venu à sa rescousse ? – n’en sera pas une pour les jeunes lecteurs déjà rodés au roman et simplement avertis : comme il n’y a manifestement pas beaucoup d’enfants en ce monde, il s’agit forcément de l’un d’eux.

Une réponse, donc, mais surtout beaucoup de questions. Bien des éléments restent obscurs (il s’agit du premier volume d’une trilogie : gageons que des éclaircissements seront apportés par les tomes suivants). On ignore quel est ce monde et pourquoi de rares enfants y apparaissent, on ignore comment ils en repartent. On se demande comment ceux qui sont restés ont pu être acceptés, et occuper des positions manifestement de première importance. Et par quelle magie peuvent-ils venir d’époques différentes ? Quant aux périls qui menacent ce monde, ces cauchemars aqueux que sont les Egrygors, sont-ils uniquement des Monstres ex machina venus apporter un peu de piment à l’intrigue, ou bien cette guerre entre rêves et cauchemars que l’on devine en filigrane est-elle plus consistante ? Que sont exactement ces mystérieuses montres qui permettent de pister les enfants ? Quelle est la mystérieuse Autorité à laquelle il est plusieurs fois fait allusion ? À ce stade, la trame de fond du roman reste trop lâche pour véritablement convaincre.

« De l’autre côté de la nuit » est proposé « à partir de 10 ans ». Tout laisse penser que des lecteurs plus jeunes pourront s’y atteler, car ses trois cents pages sont imprimées en gros caractères et sa prose demeure assez simple. Les plus âgés, ceux qui frôlent déjà cet autre monde qu’est l’adolescence, lui reprocheront sans doute cet aspect enfantin, à moins qu’au contraire ils ne se réjouissent de revenir quelques années en arrière.

En toute subjectivité, ce que nous retiendrons surtout de ce volume, ce sont les images que font naître certaines descriptions dans l’esprit du lecteur : le château des horloges, l’usine à raffiner les rêves, le lièvre pilotant son aéronef, la bibliothèque régie par le rat géant et sa légion de rongeurs, la course-poursuite avec les belettes. Autant de passages qui font penser à Lewis Carroll illustré par Tenniel, pour ceux qui lisent en noir et blanc, ou par Rodney Matthews pour ceux qui préfèrent les couleurs. Un aspect très visuel qui n’a rien d’étonnant dans un roman tiré d’une bande dessinée, et où l’on trouve cités quelques artistes comme Mucha et Jules Verne.

« De l’autre côté de la nuit » se termine sur une note un tantinet frustrante, avec l’entrée de Camille à l’orphelinat du Cheval Pendu, et beaucoup de questions. Mais « De l’autre côté de la nuit » n’est que le premier tome d’une série de romans consacrés aux Enfants d’Evernight. Il faudra donc patienter un moment pour connaître la suite, à moins de se jeter sans attendre sur la bande dessinée, déjà disponible et intitulée « L’orphelinat du Cheval Pendu ».


Titre : De l’autre côté de la nuit
Série : Les Enfants d’Evernight , tome 1
Auteur : Mel Andoryss
Couverture : Marc Yang
Éditeur : Castelmore
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 317
Format (en cm) :13 x 19,5
Dépôt légal : janvier 2014
ISBN : 978-2- 36231-103-1
Prix : 10,90 €


Mel Andoryss sur la yozone :

- La chronique de « Sept naufragés »
- La chronique du tome 1 de « Le cercle »


Hilaire Alrune
22 janvier 2014


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