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Les Nains : manuel de campagne
Den Patrick
Le Livre de Poche, Orbit, n° 33145, traduit de l’anglais (Grande-Bretagne), fantasy, 184 pages, novembre 2013, 10,50 €

Dans « Les Orcs : la voie du Saccage », Den Patrick nous avait expliqué l’origine des diverses races s’affrontant à travers plaines, montagnes et forêts. Si les Orcs sont conçus dans les incendies, si les Gobelins sont nés de simples brasiers ou même d’escarbilles, si les humains ne représentent guère qu’une espèce nuisible sans doute pas digne de trouver sa source dans les Éléments, les Nains, quant à eux, n’ont pas une origine très glorieuse : ils sont nés de la glaise.
De la glaise, oui, mais aussi d’un peu de lave, et leurs concepteurs ne sont autres que les Daginns ou Drakes, vers ailés pour les uns, dragons somptueux pour les autres.
D’abord esclaves, les Nains ont conquis leur indépendance, et depuis lors leur vaillance, leur opiniâtreté, leur courage, leur discipline leur permettent de résister à tous.



C’est donc à la lecture d’un véritable traité sur l’art de la guerre et de la résistance que nous invite Den Patrick avec « Les Nains : manuel de campagne. » Un traité qui certes aborde l’histoire mythique des Nains, mais aussi consacre une large part aux aspects techniques et tactiques des guerres, essentiellement défensives, que ceux-ci sont obligés de mener face aux Orcs, aux Trolls, aux Gobelins et à d’autres créatures tout autant malveillantes.
Que les Nains soient présentés par eux-mêmes ou à travers les commentaires de Sebastian Venghaus, anthropologue royal, ces personnages dont l’espérance de vie – hors combats – de près de trois siècles fait des êtres particulièrement éphémères par rapport aux Elfes pratiquement immortels, ils apparaissent certes défavorisés par le sort, mais également pourvus d’une combativité particulière face à l’adversité.

Sur un ton didactique mais surtout pragmatique, n’hésitant pas à glisser ici et là quelques jeux de mots (il existe au Royaume des Ombres, ont cru comprendre les Nains, un être mythique nommé Lenfer, aussi dénomment-ils un terrifiant guerrier ou un monstre horrible Lenfer incarné, ou Lenfer sur terre) Patrick Den nous invite à découvrir, à travers ce traité éclectique, ces êtres souvent considérés comme répugnants mais en fait humains et sensibles, qui n’aiment rien tant que rester à l’abri de leurs citadelles reculées dans les plus hautes montagnes.
Mais il est bien difficile, seuls au monde et sans alliés, d’y avoir la paix : si les Nains sont parvenus à conquérir leur indépendance à la force du marteau, ils sont obligés de le manier encore et sans cesse pour défendre leurs trésors, leurs territoires, leurs citadelles : le fer, les métaux, l’or sont convoités par l’ensemble des autres races. Et ne parlons pas de lycoses tombales, ces terribles araignées chasseresses grosses comme des poneys, qui leur rendent la vie infernale.

« Notre espoir ne réside que dans nos fortifications, nos armures et nos armes. Seules la méfiance, la suspicion et la vigilance peuvent nous protéger pour les années à venir  ». Cette citation résume le mode de vie des Nains, et constitue le sujet et programme de ce « Manuel de campagne  ».

Si les nains ont réussi à survivre, c’est d’abord et surtout – estiment-ils – parce qu’ils sont supérieurement organisés.
La discipline est en effet considérée comme la première qualité des Nains, et l’on ne manquera pas d’apprécier la glorification d’une telle qualité dans un ouvrage destiné à une jeunesse qui fait preuve d’une tendance certaine à la méconnaître. Autre intérêt pour nos charmants bambins, l’ouvrage décrit par le détail les différents types de haches et de marteaux, à une ou deux mains, et leurs effets sur les diverses pièces constitutives des armures. Ces chapitres donneront sans nul doute aux enfants l’envie de pratiquer avec ardeur la méthode expérimentale, et, armés desdits ustensiles trouvés dans le garage ou la resserre de jardin, à s’en aller gaillardement le tester sur ce qui ressemble le plus à des armures : à défaut d’avoir des policiers en tenue anti-émeute sous la main, ils se précipiteront sur les motards pour s’entraîner à fendre leurs casques, sur les maniaques du roller pour faire sauter leurs genouillères, ou sur les protections et carrosseries des rutilants quatre-roues-motrices-blindé-légers de prestige dont les propriétaires, eux, n’ont pas besoin de coups de hache puisqu’ils sont déjà pour la plupart trépanés à l’état naturel.

De la discipline, des armes, mais aussi, de la tactique. Leur petite taille les empêchant de se déplacer aussi rapidement que leurs adversaires, les Nains évitent les combats en milieu découvert, et plus encore dans les larges espaces. Ils sont experts pour conserver des positions en hauteur, user de la javeline et de l’arbalète, de l’onagre et de la baliste, déclencher des avalanches, tenir un pont, un col, user de la « pierre angulaire », un équivalent de la tortue romaine, et d’autres techniques – le fer de lance, le marteau caché – que nous laisserons au lecteur le soin de découvrir.
Acculés dans leurs citadelles, ils y pratiquent avec talent la projection d’un mélange de feu, de poix et de soufre, l’usage des pièges et chausse-trappes, le retrait à travers douves et enceintes, et sont également prêts au combat à travers halls et couloirs, où ils renversent bien souvent de situations que leurs adversaires, avec naïveté, estiment désespérées. Quant aux combats dans les souterrains, les Nains y excellent.

Il faut dire aussi que leur proximité avec les mines et la terre leur donne un talent tout particulier pour forger l’acier, y compris des cottes de mailles que les autres espèces leur envient. Dotés de protections de cuir rembourré, de cottes ou d’armures complètes, les Nains sont particulièrement difficiles à vaincre, surtout dans les milieux confinés où ils préfèrent combattre.
Ils sont parfois aussi aidés par des alliés : chaque citadelle possède en effet un gardien attitré, l’Huldurfolkas, qui n’est rien d’autre qu’un géant de pierre, et il arrive aux Nains d’avoir recours à des mercenaires humains, race détestable mais offrant l’avantage de se déplacer avec une rapidité toute particulière.
Quant à la magie, les Nains y répugnent ; mais ils acceptent certains ustensiles empreints de magie comme les ceintures en cuir d’auroch qui leur donne un courage supérieur, les lanternes à révéler les spectres ou les couronnes de granité conférant des pouvoirs divers et fort utiles.

C’est sur un grand récit de bataille, celle du Col des Crocs Écarlates, racontée par Sundin Hallestom, que se termine « Les Nains : manuel de campagne ». Une bataille qui permet de retrouver les éléments et protagonistes décrits ci-dessus, suivie par un épilogue de Sebastian Venghaus, anthropologue royal, qui revient sur l’histoire mythique des Nains et nous les présente comme une race fortement estimable.

Au final, « Les Nains : Manuel de campagne », présenté sous une couverture à rabats, agrémenté d’une carte géographique en double page, d’environ cent quinze notes de bas de page, d’une série d’illustrations intérieures d’Andrew James, et, sous le titre des « Notes de terrain » de Sebastian Venghaus, d’un glossaire riche d’une soixantaine d’entrées devrait plaire à ses jeunes lecteurs. Qui en redemanderont sans doute, un désir facile à combler s’ils n’ont pas encore lu les volumes précédents, Den Patrick ayant publié concomitamment Elves War-Fighting Manual (traduit au Livre de Poche sous le titre « Les Elfes ») et Orcs War Fighting Manual (traduit au Livre de Poche sous le titre « Les Orcs  ») Il est également l’auteur d’une trilogie de fantasy, « The Erebus sequence », dont le premier tome, « The Boy with the Porcelain Blade », doit paraître chez Gollancz début 2014


Titre : Les Nains : manuel de campagne (Dwarves War-Fighting Manual , 2013)
Auteur : Den Patrick
Traduction de l’anglais (Grande-Bretagne) : Guillaume Fournier
Couverture : Carr Design Studio
Éditeur : Le Livre de Poche
Collection : Orbit
Site Internet : page roman (site éditeur)
Numéro : 33145
Pages : 184
Format (en cm) : 12,8 x 19
Dépôt légal : novembre 2013
ISBN : 978-2- 253-16987-1
Prix : 10,50 €


Den Patrick sur la yozone :
- « Les Orcs : la voie du Saccage »
- « Les Elfes : l’Art de la guerre »


Hilaire Alrune
16 novembre 2013


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