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Les Elfes : l’Art de la Guerre
Den Patrick
Le Livre de Poche, Orbit, n° 33131, traduit de l’anglais (Grande-Bretagne), fantasy, 190 pages, novembre 2013, 10,50 €

Dans « Les Orcs : la voie du Saccage », Den Patrick nous avait expliqué l’origine des diverses races s’affrontant à travers plaines, montagnes et forêts.
Si les Orcs sont conçus dans les incendies, si les Gobelins sont nés de simples brasiers ou même d’escarbilles, si les Nains sont issus de la glaise, si les humains ne représentent guère qu’une espèce nuisible sans doute pas digne de trouver son origine dans les Éléments, les Elfes, eux, sont issus d’un principe supérieur : ils ont été enfantés par le vent.
Supérieurs ils sont, et bien souvent conscients de l’être ; mais conscients également de leurs limites, car seule cette conscience leur a permis de porter à leur plus haut niveau l’Art de la Guerre.



C’est donc à la lecture d’un véritable traité sur les Elfes, ou Aelfirs, que nous invite Den Patrick, un traité qui mêle technique et poésie et qui aborde leur relation quasi fusionnelle avec la forêt, leur goût pour la stratégie et la tactique, leur affinité pour la magie.
Que les Elfes soient présentés par eux-mêmes sous forme d’un traité écrit par LaDarielle Daellen Staern ou à travers les commentaires de Sebastian Venghaus, anthropologue royal, ces personnages, qu’une longévité particulière rend à nos yeux pratiquement immortels, apparaissent particulièrement attachants.

Sur un ton didactique mais néanmoins sans pesanteur, n’hésitant pas à glisser ici et là quelques références littéraires (la fille du haut roi Fuendil Asendilar se prénomme Machen), Patrick Den nous invite à découvrir, à travers de courts chapitres, ces êtres furtifs et subtils, qui n’aiment rien tant que se dissimuler dans les forêts, et, considérant que la guerre est « le signe du peu d’imagination des esprits inférieurs » et la violence « le dernier recours de l’incompétence », ne s’y adonnent qu’en dernier recours, mais toujours avec talent. Il faut dire aussi que les Orcs ne font guère que vouloir conquérir leurs territoires, que les nains convoitent leur savoir, que les humains se propagent partout comme de la mauvais herbe et que les gobelins, « race encore plus pitoyable que celle des hommes », voudraient bien s’accaparer leur magie. Sans compter les créatures de la Contrée de l’Ombre, dont la menace plane sans cesse.

C’est à travers un chapitre intitulé « La Voie Sombre » que l’on découvre les prémices à l’art de la guerre. La Voie Sombre, parce qu’il faut se résoudre à la guerre alors que les Elfes sont toujours en infériorité numérique, et qu’il leur faut prendre « pleine conscience de l’existence de la mort et de l’ombre qu’elle projette sur l’aura rayonnante de la vie éternelle.  »

Puis vient la description de la tactique des Aelfirs : pas de pillage, harcèlement du front ennemi, utilisation habile de la cavalerie, et enfin, au besoin, usage de la fameuse « Riis Maena », c’est à dire de la magie.
Outre leurs caractéristiques, on découvrira les noms élégants des armes : Le Souffle pour l’épée courte, l’Esprit pour l’épée longue, la Vue pour l’arc (on apprendra, ce qui peut toujours être utile, que l’arc est fragile et qu’il faut toujours en avoir plusieurs, et aussi qu’un bon tapis de flèches, au sol devant l’ennemi, entrave considérablement sa marche), l’Indignation pour l’épieu et le Défi pour la hache, inventée par les Elfes eux-mêmes.
Ces derniers maîtrisent également l’art des cuirasses et des armures telles que la Peau-de-feuilles (une légère protection de cuir ), la Peau-de-dragon ( des écailles de métal sur une tunique de peau), ou les armures plus classiques et plus complexes.

Pourtant, si les Elfes sont capables, en matière d’armures, de produire de véritables chefs-d’œuvre de métallurgie, leur atout principal reste leur don pour la grâce et la vitesse. Ils sont « ces esprits vengeurs de la forêt des contes et des légendes, qui se glissent comme des fantômes entre les lames ennemies. »

Des fantômes de la forêt : certes de par leur nature et leur entraînement, mais aussi parce que leurs vêtements les y aident, que ce soient leurs simples manteaux qui floutent et camouflent, leurs costumes de soie d’araignée, leurs « peaux de feuilles » ou autres vêtements magiques de spectre ou de radiance.

Car, oui, outre d’habiles tactiques (le « flanc de forêt » ou le « voile de feuilles », pour n’en citer que deux) les Elfes usent au besoin de la magie, qu’ils nomment également supplication.
Hiérophantes et requérants, par le chant et la poésie, communiquent en effet avec les étoiles. Ces chants, spécifiques aux Elfes, suffisent parfois à mettre en fuite humains et gobelins. Mais ils ont aussi d’autres effets : faire dégringoler un fragement de coeur d’étoile au milieu des troupes ennemies, ce qui se révèle parfois utile.
Chant de l’aube abondante, Lumière aveuglante, Vide, Pesanteur, Halo de garde, Marche fantôme et autres sorts, que nous ne détaillerons pas ici pour laisser au lecteur le plaisir de la découverte, viennent appuyer le courage et la stratégie des Elfes face à des troupes immuablement plus nombreuses.

C’est sur un grand récit de bataille, celui de la Fin-de-Fuendil, racontée par LaDarielle Daellen Staern que se termine « Les Elfes : l’art de la guerre ». Une bataille qui permet de retrouver les éléments et protagonistes décrits ci-dessus, et qui marqua la fin de guerres ayant duré plusieurs décennies.

Au final, « Les Elfes : l’art de la guerre », présenté sous une couverture à rabats, agrémenté d’une carte géographique en double page, d’environ quatre-vingts notes de bas de page, d’une série d’illustrations intérieures d’Andrew James, et d’un glossaire de plus d’une centaine d’entrées (avec des conseils de prononciation, ce qui, on ne sait jamais, peut toujours servir) devrait plaire à ses jeunes lecteurs. Qui en redemanderont sans doute, un désir facile à combler puisque Den Patrick a publié concomitamment Dwarves War-Fighting Manual (traduit au Livre de Poche sous le titre « Les Nains ») et Orcs War Fighting Manual (traduit au Livre de Poche sous le titre « Les Orcs »).
Il est également l’auteur d’une trilogie de fantasy, « The Erebus sequence », dont le premier tome, « The Boy with the Porcelain Blade », paraîtra chez Gollancz début 2014

P.S. : On regrettera que le traducteur se soit laissé aller, de façon parfaitement grotesque, aux tics lexicaux contemporains. Utiliser le terme « efficient » au lieu d’efficace, qui ne signifie pas du tout la même chose, apparaît dans un contexte mythique particulièrement risible et malvenu. Seule fausse note, il est vrai, pour ce fort sympathique ouvrage.


Titre : Les Elfes : l’Art de la Guerre (Elves War-Fighting Manual , 2013)
Auteur : Den Patrick
Traduction de l’anglais (Grande-Bretagne) : Guillaume Fournier
Couverture : Carr Design Studio
Éditeur : Le Livre de Poche
Collection : Orbit
Site Internet : page roman (site éditeur)
Numéro : 33131
Pages : 190
Format (en cm) : 12,8 x 19
Dépôt légal : novembre 2013
ISBN : 978-2- 253-16980-0
Prix : 10,50 €


Den Patrick sur la yozone :

- La Chronique de « Les Orcs : la voie du Saccage »
- La Chronique de « Les Nains : manuel de campagne »


Hilaire Alrune
11 novembre 2013


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