Chargement...
YOZONE
Le cyberespace de l'imaginaire




Résidents (Les)
Amelith Deslandes
Éditions La Madolière, Myriades, roman (France), Fantastique/terreur, 164 pages, mars 2012, 13€

Le collectionneur d’antiquités maléfiques, Von Würssels, embauche Naëlle pour récupérer un objet dans le village de Saon-les-Forges. Problèmes : son accès est des plus énigmatiques, en revenir tient de la gageure et le coffret à ramener se trouve au cœur d’une maison-gigogne, véritable labyrinthe piégé.
Missy enquête sur des meurtres ressemblant étrangement à ceux du sinistre Jack l’Éventreur. En cours d’affaire, elle met la main sur une mystérieuse boule qui semble la cause de plusieurs morts. D’où provient-elle ?



Amelith Deslandes est connu pour ses nombreuses nouvelles parues dans des revues ou des fanzines et dans ses deux recueils : « Les Loges Funèbres » en 2006 et « Chair et Tendre » en 2010.
Beaucoup s’interrogeaient sur sa volonté à passer à un format plus long. Voilà chose faite avec « Les Résidents », court roman de 164 pages que l’on pourrait ramener à moins de 130 en décomptant les pages blanches ou juste avec quelques lignes. Amelith Deslandes reste donc dans ce qu’il sait faire en n’étendant pas outre-mesure la distance.

Derrière le romancier, l’influence du nouvelliste demeure bien présente, elle se fait tout du long sentir avec un fourmillement d’idées qui auraient pu donner plusieurs textes. En effet, Amelith Deslandes ne fait pas du remplissage avec des descriptions à tout-va, des dialogues pour ne rien dire, il préfère imaginer des situations étonnantes, des concepts chocs pour accrocher le lecteur à son histoire.
Ce qu’on pourrait lui reprocher, c’est le nombre important de personnages. D’ailleurs, certains gardent une part de mystère jusqu’au bout, leur rôle dans l’intrigue n’est pas forcément de premier plan et sert surtout à l’ambiance en rajoutant des éléments fantastiques ou horrifiques.
L’imagination fertile de l’auteur peut aussi nous entraîner dans des faits n’ayant finalement aucun intérêt. Par exemple, la sœur de Naëlle l’accompagne lors de sa visite chez Von Würssels et en profite pour lui dérober trois objets, dont l’utilité nous est explicitée. À la fin, on découvre leur sort, mais c’est en marge, relève de la bonne intention et pourrait très bien être développé en nouvelle.
Amelith Deslandes conserve donc tous ses tics de nouvelliste, ce dont, à bien y réfléchir, on ne peut que se féliciter, car « Les Résidents » est dense et d’une grande richesse.

Une autre chose peut surprendre, l’aparté de trois-quatre lignes avant chaque chapitre et mettant en scène des boules, des dominos interagissant. Cela débute au milieu d’une phrase, se finit par des points de suspension. Le curieux cherchera un schéma général : cela se suit-il ? Cela dépend-il des personnages du chapitre ? Y a-t-il finalement quelque chose à comprendre ?
Personnellement, j’en suis arrivé à les prendre comme une illustration de l’inéluctabilité du destin. Quel que soit notre choix, rien ne nous détournera de notre destinée. Et puis, cette interprétation arbitraire convient au concept du Temps Mort, nous apprenant que tout coexiste en même temps et que parfois, une porte s’ouvre, rendant la frontière entre les réalités perméable. C’est ainsi que Naëlle peut se rendre chez les Résidents à Saon-Les-Forges.

Si ce foisonnement d’idées fascine, il peut aussi dérouter. Amelith Deslandes est généreux, il ne conçoit pas de broder un roman autour d’un seul thème, il lui faut de la matière. Les petits reproches exposés relèvent justement de cette générosité dans l’écriture. Pour ceux qui le connaissent, ces travers figureront plutôt au rang de qualité. Ils révèlent surtout l’excellent nouvelliste.
Certains romans reposent sur si peu que « Les Résidents » ne peut que séduire. Chaque lecteur en conservera un souvenir : Naëlle affrontant la maison-gigogne, Von Würssels et sa collection d’antiquités maléfiques, rencontre avec un dément dans le noir, la secte de Malthus…
Des images marquent notre esprit, donnent froid dans le dos. Amelith Deslandes possède justement cette capacité de heurter l’imagination des lecteurs et d’y imprimer son imaginaire.

À coup sûr, « Les Résidents » nécessite une seconde lecture pour en saisir toutes les subtilités, les histoires dans l’histoire, le rôle de tout un chacun dans ce vaste ensemble.
En passant au roman, Amelith Deslandes n’a pas perdu sa patte de nouvelliste et prouve qu’il est également capable de tenir en haleine ses lecteurs sur une plus longue distance.
Pour ceux qui sont jusqu’à présent passés à côté de ce talent, car peu enclins à lire de courts textes, c’est l’occasion rêvée de le découvrir. Il le mérite vraiment.

En préface, Philippe Gindre qui lui a déjà ouvert les pages du « Codex Atlanticus » en parle très bien, faisant montre de son érudition habituelle.

Il est à noter que Philippe Jozelon a parfaitement illustré une des scènes finales et que Naëlle et Von Würssels figuraient déjà dans la nouvelle “Les échos clandestins” au sommaire de « Chair et Tendre ».


Titre : Les Résidents
Auteur : Amelith Deslandes
Couverture : Philippe Jozelon
Éditeur : Éditions La Madolière
Collection : Myriades
Site Internet : Roman (site éditeur)
Pages : 164
Format (en cm) : 14 x 21
Dépôt légal : mars 2012
ISBN : 978-2-917454-10-7
Prix : 13 €



Également sur la Yozone :
- la chronique de « Chair et Tendre », son second recueil de nouvelles
- un entretien avec Amelith Deslandes


François Schnebelen
10 juin 2012


JPEG - 13.7 ko



Chargement...
WebAnalytics