Dorian Gray n’est plus que l’ombre de lui-même. Ce n’est plus qu’un vieillard ridé dont le souvenir de sa jeunesse n’est plus qu’un simple tableau. Mais cela reste son bien le plus important, si ce n’est le seul, et quand des gamins viennent le lui voler, il n’hésite pas à trancher la gorge d’un des deux. Toutefois, quand le gang du gamin tente de le passer à tabac, le hasard lui envoi un bel ange protecteur. Elle se nomme Phillis et son père est un politicien renommé. Alors, quand la jeune femme, plutôt rebelle dans l’âme, prend sa défense, Dorian est totalement déboussolé. Quelqu’un peut donc voir en lui autre chose qu’un être défiguré. Mais pourquoi sa main gauche a-t-elle retrouvé sa jeunesse ? Aurait-ce un lien avec les gouttes de sang qui se sont répandues sur son portait ?

« Le Portrait de Dorian Gray » a subi bien des adaptations depuis l’oeuvre originale d’Oscar Wilde, mais Stéphane Betbeder a choisi de le prendre sous un autre angle, en inventant une forme de séquelle à l’oeuvre de Wilde, en imaginant ce qu’aurait pu devenir un Dorian Gray souffrant des affres de la vieillesse, son portrait ne le préservant plus des désastres du temps. Mais il ne va pas s’arrêter là, car si le titre de la série ne s’arrête que sur Gray, le second personnage principal de la série n’est autre que l’homme invisible de H.G. Wells.
Betbeder nous présente cet homme invisible comme un mégalomane voulant profiter de ses nouvelles capacités pour prendre le pouvoir en Angleterre. Evidemment, cela ne va pas se présenter comme prévu et la perte progressive de son invisibilté, façon « Hollow Man, l’homme sans ombre », va le pousser à trouver une autre voie pour arriver à ses fins : le soulèvement populaire contre le nouveau roi.
Ce premier tome pose donc le contexte de cette série et les principaux personnages qui seront au centre de ce drame, un drame qui devra d’ailleurs trouver une conclusion rapide puisque « Le Retour de Dorian Gray » ne doit être qu’un diptyque. On sent bien que le deuxième tome nous offrira une confrontation entre ces deux monstres sacrés de la littérature qui ont aussi fait les beaux jours du cinéma. En tout cas, Betbeder a pris le temps de nous donner aussi un vrai contexte historique, que ce soit par les suffragettes ou la succession de Victoria, et c’est cela qui rend intéressant son histoire qui n’est pas la simple confrontation de deux êtres d’exception.
Mais c’est aussi grace à l’énorme travail de Bojan Vukic et Julie Ménard qui font de ce diptyque une très bonne série. Le style hyper réaliste de Vukic nous emmène réellement au coeur de ce Londres du début du XXe siècle, avec des teintes tirant toujours vers l’ocre et le sépia, comme pour donner un aspect de vieux livre à la série, une allure patinée nous ramenant dans la boue de l’Est-end et non dans la lumière des beaux quartiers. Vukic est un habitué de cette collection 1800, étant le dessinateur sur « Grands Anciens », et son duo avec Julie Ménard semble bien mieux fonctionner, avec un rendu très intéressant des planches, en particulier pour les décors et surtout la réapparition de l’homme invisible, évitant un rendu trop gore, trop organique.

Ce premier tome du « Retour de Dorian Gray » est plutôt convainquant, espérons maintenant que la conclusion sera digne de ce nom.
(T1) Le sacre d’Invisible 1er
Série : Le Retour de Dorian Gray
Scénario : Stéphane Betbeder
Dessin : Bojan Vukic
Couleurs : Julie Ménard
Couverture : Grzesiek Krysinski
Éditeur : Soleil
Collection : 1800
Dépôt légal : 18 janvier 2012
Format : 234 x 323 mm
Pagination : 48 pages couleurs
Numéro ISBN : 9782302018327
Prix public : 13,50 €
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