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Anges Foudroyés
Philippe Tessier
Black Book, à dé couvert, roman (France), dark fantasy, 317 pages, décembre 2011, 9€

Une ville maudite, porte vers l’Enfer, ceinte de hauts murs. Le village gris de Villecroix à ses pieds, peuplé de maudits, errants éternels privés de quelque chose en pénitence de leurs fautes. Et un Berger, amputé de son nom et de son passé, qui guide les âmes, troupeau de brebis, du pays lointain jusqu’à la cité du cauchemar.
Puis vint un chevalier, venu sauver une princesse injustement retenue en Enfer. Il insiste auprès du Berger pour qu’il l’aide à entrer. Et malgré les mises en garde, il entre, et ne revient jamais.
Puis trois héros arrivent, et malgré les paroles du Berger, ils veulent entrer à leur tour. Mais cette fois, l’homme sans nom les accompagne, car il se dit que son propre fardeau peut prendre fin, d’une façon ou une autre...



Philippe Tessier, auteur du jeu de rôle « Polaris », de plusieurs romans dans cet univers et d’autres, pour la plupart chez Black Book, nous offre avec « Anges Foudroyés » une escapade en terres infernales. Réédition retravaillée de « La Cité des Âmes » paru en 1997 chez Khom-Heïdon, ce petit bouquin m’a très agréablement surpris.

Notons déjà la plume. C’est mon premier roman de l’auteur, et si je l’imagine plus léger dans ses romans d’aventures sur « Polaris », je dois dire qu’il a su ici adapter la forme au fond. On est dans le gothique, et la narration, souvent portée par le Berger, nous immerge immédiatement dans le gris froid du village maudit de Villecroix, hors du temps, perpétuel. L’arrivée des héros, un cardinal, un chevalier et une templière, venant du pays de la vie (jamais nommé, jamais situé) pour sauver de l’Enfer la fille de leur roi Roland ainsi que leur camarade venu seul pour cette mission, est un bref rayon de soleil que les habitants, pourtant accueillants, étouffent bien vite.

Puis vient l’entrée en Vallefroy, et la longue errance dans des paysages de cauchemar. On sent une très nette inspiration des classiques, des peintures de Jérôme Bosch à l’« Enfer » de Dante : ce monde fantasmagorique puise bien plus dans le bestiaire hideux de la chrétienté, comme le laissait envisager la foi en Dieu des héros, que dans les univers imaginaires contemporains souvent très marqués par l’œuvre de J.R.R. Tolkien.

Si l’action est loin d’être absente dans « Anges Foudroyés », elle ne vient qu’après les descriptions d’ambiance qui sont le tissu même de ce roman. On remarquera la très forte influence du jeu de rôles et de la littérature de licence qui en est issue dans les quelques combats, où chaque héros fait bon usage de ses talents martiaux spécifiques et/ou de ses pouvoirs magico-divins, avec le cardinal en guise de clerc et le Berger comme mage. Néanmoins, les combats ne se limiteront pas à d’héroïques actions, au refoulement des nuées de cauchemar, d’un assaut victorieux à quatre contre mille. Ils ne sont là, pourrait-on dire, que pour redonner un bref sentiment de victoire aux protagonistes, avant que le paysage et la nature même du pays maudit ne les frappent, sournoisement, inexorablement.

Le roman prend une réelle dimension avec la rencontre avec les Valiars, êtres ailés qui vivent dans les sous-sols, se cachant du duc et de ses légions. Par une rupture de la chronologie, Philippe Tessier nous fait effleurer dès la moitié de son récit les indices pour en deviner la fin, et hisse son histoire bien au-delà d’une banale escapade en territoire démoniaque. Tout s’emballe dans les derniers chapitres, les dernières pièces éparses du puzzle se mettent en place, et la maigre victoire pourtant chèrement acquise aura un goût encore plus amer.

Difficile d’en dire plus sans trop en révéler, aussi m’arrêterai-je là pour le fond.
Dès les premières pages, je n’ai pu m’empêcher de penser au roman de Clifford Simak, « Au Pays du Mal » (publié il y a longtemps chez J’ai Lu), qui rompait avec la fantasy « classique » (allant de Tolkien aux licences Donjons et Dragons) en mettant en scène des Chrétiens allant combattre un Mal païen. La suite empruntait néanmoins à d’autres mythologies, également païennes, avec une figure de druide-mage.
Le roman de Philippe Tessier s’inscrit dans cette veine, tout en préférant mettre l’accent sur l’ambiance, avec une langue recherchée mais toujours plaisante, et l’aspect métaphorique de ce voyage, en plus du côté romanesque de l’aventure.


Titre : Anges Foudroyés
Réédition augmentée de : La Cité des âmes, 1997
Auteur : Philippe Tessier
Couverture : Sylvain Sarrailh
Éditeur : Black Book
Collection : à dé couvert
Site Internet : page roman (site éditeur)
Pages : 317
Format (en cm) : 17 x 11,2 x 2,2
Dépôt légal : décembre 2011
ISBN : 9782363280978
Prix : 9 €



Nicolas Soffray
3 février 2012


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