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Trains de cauchemar
Philippe Gontier (dir.)
Co-édition Les aventuriers de l’Art perdu & La Clef d’Argent, Terreurs anciennes, anthologie (France), terreurs ferroviaires, 300 pages, janvier 2012, 19€

Le train est aujourd’hui l’un des moyens de transport les plus sûrs au monde (entendez par là qu’il fait peu de morts par an, même s’ils sont nombreux en cas d’accident). Il n’en a pas toujours été ainsi : à ses débuts, il inspire crainte et méfiance. Un violent incident lors de son premier trajet, en 1830, tue le député de Liverpool, son plus ardent défenseur. La science appuie les divagations qui attribueraient à ce déplacement rapide des corps (30 km/h !) de graves conséquences sur la santé physique et mentale...
Et quand enfin vient la banalité sereine d’un usage désormais admis, ce sont les assassins qui se mettent à sévir dans les wagons !



Le train fait peur. Et cela bien avant les publicités de la SNCF. Si le train est aujourd’hui un moyen de transport banal et sûr, c’est le résultat de près de deux siècles d’évolution de la technique et des mentalités.
Les premiers trains font peur : déplacement à des vitesses inimaginables (30 km/h en pointe...)et défilement du paysage trop vite pour la bonne santé mentale, fumée de charbon nocive, inconfort et promiscuité dérangeante des wagons, et bien sûr violence sanglante des accidents de voie.

Le XIXe siècle étant aussi amateur de sensationnel morbide que le XXe ou le XXIe, la presse puis la littérature ont bien vite relayé les accidents liés au train, pour faire naître un autre mal du siècle, l’« angoisse ferroviaire ». Le train, de la machine à l’idée même du voyage à son bord, devient source de peur.

Philippe Gontier (du fanzine « Le Boudoir des gorgones », spécialiste des littératures anciennes du fantastique et de l’étrange) a patiemment collecté les 26 textes de cette anthologie, qui témoignent de la présence régulière de ces faits-divers en une des journaux, au point que de nombreux auteurs ont vu là matière à écrire.
Citant Maupassant, Level, Schwob, Zola (comment ne pas penser à « La Bête humaine » ?) et d’autres tombés dans l’oubli, il classe et décrypte les terreurs de l’époque : accident de voie, volontaire ou non ; perte de contrôle et déraillement ; mais aussi d’autres maux : maladies se propageant à grande vitesse (!) d’un pays à l’autre grâce au train, fous assassins poignardant ou violant dans les wagons...
La violence de la machine est l’écho de la violence des hommes qui la côtoient, techniciens comme passagers, et personne n’est exempt de l’influence diffuse qu’elle exerce, comme si les seuls rails étaient synonymes de danger.

Lieu mobile, hors du temps, le train est forcément propice au fantastique, au contact avec l’au-delà, et donc la mort quand bien même le voyage devient de plus en plus sûr. On notera également le caractère anticipatif des trois derniers textes, qui prouve que le train, même devenu quotidien, n’est pas pour autant déparé de son manteau de peur : la vitesse toujours croissante ou un éventuel tunnel sous-marin viennent s’ajouter aux sources d’inquiétude...

Critiquer des textes du XIXe siècle, rassemblés certes ici mais publiés très diversement, en écho à une actualité plus ou moins immédiate, dans une époque d’innovation rapide et effrayante d’un engin bruyant et fumant, n’aurait pas eu grand sens. On a affaire à un style populaire, des plumes parfois élevées à l’école du feuilleton journalistique. On ne cherchera donc pas systématiquement la qualité littéraire (même si elle est plus présente qu’on pourrait s’y attendre), et, en replaçant les textes dans leur contexte, on appréciera plutôt la force d’évocation des mots, souvent les mêmes, train et terreur, et pourtant différents, comme les sensations qu’ils procurent.

Quoi de mieux, pour vous sortir de la banalité du trajet quotidien en transport en commun, que la lecture de ces textes, soigneusement commentés ? Au-delà d’un petit frisson matinal, vous y trouverez une bonne dose de connaissances sur les débuts du rail, et un étonnant portrait de la société du XIXe, qui vous poussera, en creux, à vous interroger sur votre propre rapport, peut-être trop banal et détaché, au train.

Quelques extraits sont lisibles sur le site de l’éditeur, comme un avant-goût du voyage...
Prêts à embarquer ?


Titre : Trains de cauchemar
Sous-titre : anthologie d’épouvante et d’insolite ferroviaires
Collecteur des textes et présentation : Philippe Gontier
Auteurs (par ordre d’apparition) : Jules Claretie, Maurice Rollinat, Guy de Maupassant, Paul Hervieu, Émile Zola, Jean Lorrain, Rémy Saint-Maurice, Paul-Hubert, Georges Rouvray, Maurice Level, Pierre Vernon, Pierre Vernou, Alfred de Sauvenière, Marcel Schwob, Maurice Renard, Michel Jules Verne, Louis Mullem, Jean Jaubert
Documents en post-face : Hippolyte de Chavannes de La Giraudière, Pierre Giffard, Philippe Gindre
Couverture : Philippe Gontier
Éditeur : Les Aventuriers de l’Art Perdu / La Clef d’Argent
Collection : Terreurs anciennes
Site Internet : page roman avec table des matières détaillée (site éditeur)
Numéro : 1
Pages : 300
Format (en cm) : 20 x 13 x 2,5
Dépôt légal : janvier 2012
ISBN : 9782908254983
Prix : 19 €



Nicolas Soffray
11 février 2012


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