
Et précisément, c’est au coeur d’un tel paradoxe qu’apparaît Khaal, Empereur des humains, dans toute sa bestiale majesté. Khaal, pur homme de guerre qui fait de la terreur son mode de gouvernance et qui, fût-ce au prix de massacres, entend bien étendre son pouvoir absolu aux deux autres races de parias que compte son monde oublié de l’Histoire.
Khaal, qui n’hésite pas à en découdre en public et dans l’arène avec ceux qui oseraient remettre son autorité en question. Khaal, dont l’ordinaire est fait de tortures et de tueries, de cadavres lacérés que l’Empereur, comme il le ferait à des chiens affamés, abandonne à Khânys, un être anthropophage dont on doute qu’il soit humain.
Ainsi la première partie de l’album accumule-t-elle des violences à la limite de la gesticulation, comme si l’affirmation de soi n’avait d’autre vecteur que la destruction d’autrui, en des scènes d’une sauvagerie foncière où le space opera flirte avec le space-peplum.

La violence conçue comme une fin en soi ? A moins qu’il ne s’agisse d’une fuite en avant... D’une façon qu’aurait Khaal d’éviter de prendre pleinement conscience de ses failles. Tuer, pour éviter que ne le submerge une terreur intime, laquelle trouverait sa source dans cette absence d’identité, ce vertigineux vide intérieur qui le mine...
Jusqu’à ce que le voile se lève partiellement sur les origines de Khaal, en même temps qu’il comprend que les trois races en présence ont leur destins indissolublement liés, et que leur évasion de la bulle d’espace-temps où elles sont reléguées va nécessiter de faire cause commune. Si tant est, bien sûr, que ne soit pas remise en question la toute-puissance de l’homme de guerre...
Dès ce premier volet du triptyque, le scénario de Louis dessine un portrait plus nuancé que prévu d’un être au comportement trompeur, et dont on va découvrir que la personnalité reflète la complexité du monde dont il est issu. En même temps que, d’emblée, s’impose la maîtrise graphique du jeune Valentin Sécher. On n’en a pas fini d’apprécier ce dessin puissant, qui fait d’abord penser à l’esthétique d’un Vicente Segrelles que Richard Corben aurait survitaminée. Etant entendu que, une fois assouvi l’instinct de comparaison, l’on se contentera bientôt, en voyant du Sécher, de se dire que c’est bien du Sécher !
A lire sur la Yozone :
Khaal, Chroniques d’un Empereur Galactique (Livre premier)
(T1) Livre premier
Série : Khaal, Chroniques d’un Empire galactique
Scénario : Louis
Dessins et couleurs : Valentin Sécher
Editeur : Soleil
Parution : 22 juin 2011
Pagination : 48 planches couleurs
Making of : cahier graphique de 8 pages en supplément
Format : 23,4 x 32,3 cm
Numéro ISBN : 978-2-3020-1617-0
Prix public : 13,50 €
Illustrations © Valentin Sécher et Soleil (2011)