Mais quand arrive le moment d’abattre Zhu, Freddy hésite et finit par suivre le chinois. Il découvre que ce dernier recherche une jeune fille, enlevée de son village en Chine pour être vendue en France, comme véritable esclave moderne. Freddy trouve que Zhu se prend un peu trop pour Zorro, et pourtant une sorte de collaboration naît entre les deux hommes, pour ne pas dire une forme de respect. Et ce duo va se révéler très efficace et mettra la main sur la demoiselle. Toutefois, Zhu a pour mission de la ramener en Chine auprès de ses parents, mais la jeune femme a trop goûté aux plaisirs de l’Occident pour retourner là-bas et elle compte bien mettre le Français dans sa poche.

« Belleville Story » a ce bon goût des polars d’antan, des films noirs qui ont fait la renommée du cinéma français. C’est en 2006 que Arnaud Malherbe quitte son métier de journaliste à l’Express, passant des conteurs de la réalité aux conteurs de fiction. D’abord dans l’audiovisuel où il tourne des courts métrages puis va réaliser une petite originalité avec « Belleville Story », deux versions, une destinée à la télévision et une autre pour la BD que nous avons entre les mains.
N’ayant pas vu l’adaptation télévisuelle, je me bornerai donc à la bande dessinée et il faut avouer que Malherbe sait parfaitement vous plonger dans le côté obscur des nuits parisiennes, celui qui doit être caché aux touristes, pour qu’ils ne profitent que de la vitrine. Le monde du racket, de la prostitution et de l’esclavage moderne sont des sujets très sérieux qui ont fait et font toujours les beaux jours du roman noir. Pas de détective privé ici, mais une petite frappe comme héros, ou plutôt anti-héros. En fait, Freddy est un faux dur, un pauvre gars qui a mal tourné mais qui laisse des espoirs de rédemption. Et la jeune chinoise est un peu son Graal.
Avec Zhu, il forme une espèce de duo façon « Rush Hour » ou « 48 heures », mais avec un humour très troisième degré, celui des bas-fonds. Zhu oscille entre le vieux sage et la brute épaisse, mais comme pour Freddy, ce n’est qu’apparence.
Malherbe s’est de nouveau attaché les services de Vincent Perriot pour les dessins, son complice de la série « Taïga Rouge ». Finis les grands espaces, place aux ruelles étroites de Belleville. Il faut vraiment être un habitué pour reconnaître la ville et le dessinateur semble plus à l’aise quand ses personnages se retrouvent dans les bouges parisiens que dans les rues du quartier chinois. Le graphisme de Perriot est bien particulier, tranchant le classissisme, désarticulant à loisir ses personnages, leur donnant de véritables gueules cassées. Oubliés les beaux gosses de la franco-belge, ils n’existent pas chez Perriot, mais vous avez par contre des personnages de caractère qui resteront dans vos mémoires et qui seront reconnaissables au premier coup d’oeil. Des dessins qui rythment parfaitement le récit et créent une véritable atmosphère pour une série qui prend ainsi de l’épaisseur.
« Belleville Story » est un excellent diptyque, dépeignant avec soin et talent cet univers des nuits chaudes parisiennes.
(T1) Avant minuit
(T2) Après minuit
Série : Belleville Story
Scénario : Arnaud Malherbe
Dessin : Vincent Perriot
Couleurs : Isabelle Merlet
Éditeur : Dargaud
Dépôt légal : 18 juin 2010 et 4 mars 2011
Pagination : 88 (T1) et 84 (T2) pages couleurs
Prix public : 15,95 €
Numéro ISBN : 9782205063769 ; 9782205066494
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