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Codex Atlanticus n° 19
Revue : Philippe Gindre (dir.)
La Clef d’Argent, revue, nouvelles (anthologie, France), fantastique, juin 2010, 120 pages, 10€

« Codex Atlanticus » n’a pas d’éditorial, mais Philippe Gindre nous narre en conclusion une aventure de Coolter et Quincampoix, se passant dans une quincaillerie. Sur fond de nostalgie et avec la manière, “Rétrolfaction” enfonce bien le clou sur le problème de mise en librairie d’une anthologie telle que celle-ci. À cause des étagères surchargées par la pléthore de publications de certains éditeurs, « Codex Atlanticus » peine à toucher un plus vaste public.
Ce qui est vraiment dommage au vu de certaines excellentes nouvelles au sommaire de ce numéro 19…



Toutefois, reconnaissons que le démarrage est un peu poussif.
Gilles Bailly (« Malbosque ») plante bien le décor et, alors que l’on pense que l’histoire va décoller, la fin tombe comme un couperet. L’auteur n’est pas allé jusqu’au bout ou a insuffisamment exposé son idée, pour que le lecteur adhère à “La suora africana”. Dommage…

Anne Morin nous décrit sur quatre pages “La maison dans le bois”. Si l’on enlève l’atmosphère se dégageant de ces lignes, il ne reste plus rien. Sans grand intérêt.

L’insomnieuse” de Sylvie Huguet (« Le Passage », « Le Dernier Roi des Elfes ») ne relève guère du fantastique. Une femme cherche à se passer des somnifères prescrits par son mari médecin. Pour ce faire, elle voit un soi-disant docteur et freine tout simplement le nombre de cachets, jusqu’à l’arrêt. Bien sûr, cela ne va pas sans mal. L’ensemble est prévisible et, comme avant, n’apporte rien à l’anthologie.

Transformation” d’Arthur Z. Balogh s’avère d’un autre acabit. Tout le monde s’interroge sur l’après-vie. Qu’y a-t-il donc après ? L’auteur nous donne sa version, bien tournée et non dénuée de poésie.

Dans “Commedia” de Timothée Rey, un ingénieur de Paris descend dans un petit village de province pour la réfection d’un pont. Le soir, il assiste à un curieux spectacle.
La réputation de Timothée Rey (« Caviardages ») n’est plus à faire et il nous prouve ici son talent. Il mène parfaitement son récit ancré au début du XXe siècle. De facture classique, mais impeccable tant au niveau du rendu que de la conclusion.

Jean-Pierre Favard lui donne parfaitement la réplique avec “La collection Prescott”. Il se dégage les mêmes points forts que ci-dessus. Même si l’on se doute de son terme, ce dîner d’un jeune homme chez une famille prestigieuse du début XXe est tout aussi intéressant.

Barnum chrysanthème” est tout aussi dispensable que les deux précédentes contributions de Denis Moiriat au « Codex Atlanticus ». Moins d’une heure après lecture, j’en avais déjà oublié le sujet. L’art de la short story est plus compliqué que ce que semble croire l’auteur.

Les Dunes diagrammes” de Thomas Desbrières ressemble à un traité de science. Que signifie la complexité de la disposition des dunes dans une partie du désert ? Texte étonnant, n’ayant à mon sens pas sa place dans une revue de fantastique, mais que Philippe Gindre a bien fait de nous présenter. Il plaira ou non, mais on ne peut lui dénier de la recherche et une certaine érudition. Une surprise agréable !

À travers “La vie du maudit” et un article de François Migeot, ce numéro nous présente l’écrivain vénézuélien José Antonio Ramos Sucre (1890-1930). “La vie du maudit” relève du fantastique morbide, la forme est recherchée et le lecteur curieux éprouvera l’envie d’en découvrir plus sur Ramos Sucre.
Cette ouverture sur des écrivains plus ou moins tombés dans l’oubli est justement une des forces de cette anthologie.

Nihil Messtavic intrigue. Qui est-il vraiment ? La présentation ne nous éclaire pas beaucoup et on pourrait presque croire à un canular. Pourtant, “Ma prison de chair” s’avère une belle pépite. Le personnage perd peu à peu ses sens et subit impuissant son calvaire, qu’une expérience lui permet de signaler. Fait froid dans le dos quant à ses implications.

Amelith Deslandes (« Chair et Tendre ») ancre “Faux Frère” dans notre quotidien. Des gens enlevés, un juge disparu, une grande demeure lugubre… autant d’ingrédients pour une incontestable réussite. L’auteur a l’art de dérouler son intrigue sur presque trente pages, nous tenant en haleine sur le sort des personnages. Ce n’est qu’à la fin que les différentes trames se rejoignent. Pour le pire, bien sûr !

Voilà donc un très bon numéro du « Codex Atlanticus », dont les deux tiers des textes sont de très belle facture, soit plus des trois quarts en terme de pages. Certains ne s’oublieront pas de sitôt et serviront dans le futur de références.

Au passage, remarquons que, pour le même prix, « Codex Atlanticus » a une tendance à l’embonpoint (80 pages pour le numéro 17, 102 pour le 18 et 120 pour celui-ci) et que cela lui va très bien.

« Codex Atlanticus » représente un rendez-vous annuel incontournable pour les amateurs de fantastique. Messieurs les libraires, il serait bon de le mettre en avant, afin que le plus vaste public y ait accès et s’intéresse donc à ce genre un peu passé de mode.


Titre : Codex Atlanticus
Numéro : 19
Auteurs (par ordre d’apparition) : Gilles Bailly, Anne Morin, Sylvie Huguet, Arthur Z. Balogh, Timothée Rey, Jean-Pierre Favard, Denis Moiriat, Thomas Desbrières, José Antonio Ramos Sucre, Nihil Messtavic, Amelith Deslandes et Philippe Gindre
Sous la direction de : Philippe Gindre
Couverture : Mélusine
Type : anthologie
Genre : fantastique
Périodicité : annuelle
Éditeur : La Clef d’Argent
Site Internet : anthologie, avec un numéro inédit téléchargeable gratuitement
ISSN : 1145-6892
ISBN : 978-2-908254-81-5
Dépôt légal : juin 2010
Dimensions (en cm) : 14 x 20
Pages : 120
Prix : 10 €



À lire également sur la Yozone, les chroniques de :
- « Codex Atlanticus 17 »
- « Codex Atlanticus 18 »


François Schnebelen
8 août 2010


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Illustration de Mélusine



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