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Tourmentées (les)
Jules Barbey d’Aurevilly
Omnibus, romans et nouvelles (France), romantisme du terroir, 1059 pages, février 2009, 28€

Réédition d’une partie de l’œuvre pléthorique d’un admirateur de Balzac…



En littérature comme partout, tout n’est qu’action et réaction. De même que la société victorienne engendra les plus grands excentriques, notre culte du vulgaire actuel devait forcément engendrer un retour de manivelle.
Vulgarité totalitaire par définition, qui se veut valeur universelle alors qu’elle n’est que parenthèse et qui tente de survivre par quelques mantras répétés ad libitum (« Ah que plus personne ne lit de nos jours, coco, d’ailleurs les jeunes, ils ouvrent plus un bouquin », disent les télécrates ringards.
Les millions d’exemplaires vendus des « Harry Potter », « Tara Duncan » et autres « Pendragon » doivent être un coup du complot judéo-maçonnique), se prétendant « moderne » alors que sa pensée confite dans l’immobilisme est en voie de se fossiliser. Hé oui, on a beau se gaver de magazines people (pour combien de temps ?), la foule délaisse TF1 pour, en réaction, célébrer « La Princesse de Clèves » ou se livrer à des activités aussi peu top-giga-cool que les ateliers de calligraphie, qui affichent complets.

En ce cas, il est tentant de se tourner vers un passé définitivement étiqueté « inférieur » par le vulgaire qui ne peut envisionner une civilisation sans SMS, qui apparaît désormais comme une contrée lointaine… et proche à la fois. Quel meilleur antidote à la vulgate anti-intelligence que le romantisme et ses valeurs impossible à empaqueter, étiqueter et vendre en tête de gondole ?

Cette réédition d’un maître mineur tombe donc à pic. Pour qui en fait l’effort, il peut être délicieux de se confronter à celui qui, en son temps, fit scandale, coincé entre provocation et réactionnariat viscéral (encore que sa pensée insaisissable et contradictoire soit certainement plus complexe.)

Dans l’univers de Barbey d’Aurevilly, les passions sont forcément exacerbées, voire mortelles, des inconnus racontent au narrateur des récits d’amour impossibles menant parfois au meurtre ou à la consomption, la religion est cause de tourments métaphysiques, le statut de militaire un titre de vertu et où le fantastique subtil pointe parfois.
Et, comme le rappelle la postface, l’œuvre de d’Aurevilly est aussi une histoire d’amour envers sa Normandie natale, alors étiquetée d’arriérée, ce qui donne lieu à des descriptions enfiévrée. Ainsi, à son corps défendant, d’Aurevilly sera le créateur (pour le meilleur ou pour le pire) de cette littérature dite « du terroir » tant méprisée maintenant que le parisianisme bas du front fait son grand retour.

Cette plongée dans le passé, aidée par un style gentiment vieillot mais nullement rébarbatif, ne peut être du goût de tout le monde, et on pourra se passer d’Aurevilly pour plonger plutôt dans Maupassant ou Balzac, d’une autre envergure.
Mais grâce à Omnibus, qui nous réserve décidément de bonnes surprises, l’œuvre de ce romantique tourmenté ne sera plus réservée à prendre la poussière des ans dans les bibliothèques.
Pour 28 euros les plus de mille pages, on aurait tort de bouder son plaisir…



Titre : Les Tourmentées
Textes : Léa, Une Vieille Maîtresse, L’Ensorcelée, Un Prêtre Marié, Les Diaboliques, Une Histoire sans Nom
Auteur : Jules Barbey d’Aurevilly
Couverture : Gustav Klimt / atelier Didier Thimonier
Editeur : Omnibus
Site éditeur : Page roman
Pages : 1059
Format (en cm) : 13,5 x 20
Dépôt légal : février 2009
ISBN : 978-2-258-07943-4
Prix : 28 €



Thomas Bauduret
19 octobre 2009


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